LES
SEPT SACREMENTS
DEUXIÈME SECTION
LES SEPT SACREMENTS DE ÉGLISE
1210 Les sacrements de la Loi Nouvelle sont
institués par le Christ et ils sont au nombre de sept, à savoir le
Baptême, la Confirmation, l’Eucharistie, la Pénitence, l’Onction
des malades, l’Ordre et le Mariage. Les sept sacrements touchent
toutes les étapes et tous les moments importants de la vie du chrétien :
ils donnent naissance et croissance, guérison et mission à la vie de
foi des chrétiens. En cela il existe une certaine ressemblance entre
les étapes de la vie naturelle et les étapes de la vie spirituelle
(cf. S. Thomas d’A., s. th. 3, 65, 1).
1211 En suivant cette analogie on exposera
d’abord les trois sacrements de l’initiation chrétienne (chapitre
premier), ensuite les sacrements de guérison (chapitre deuxième),
enfin les sacrements qui sont au service de la communion et de la
mission des fidèles (chapitre troisième). Cet ordre n’est, certes,
pas le seul possible, mais il permet de voir que les sacrements forment
un organisme en lequel chaque sacrement particulier a sa place vitale.
Dans cet organisme, l’Eucharistie tient une place unique en tant que
" sacrement des sacrements " : " tous
les autres sacrements sont ordonnés à celui-ci comme à leur fin "
(S. Thomas d’A., s. th. 3, 65, 3).
CHAPITRE PREMIER
LES SACREMENTS DE L’INITIATION CHRÉTIENNE
1212 Par les sacrements de l’initiation chrétienne,
le Baptême, la Confirmation et l’Eucharistie, sont posés les fondements
de toute vie chrétienne. " La participation à la nature
divine, donnée aux hommes par la grâce du Christ, comporte une
certaine analogie avec l’origine, la croissance et le soutien de la
vie naturelle. Nés à une vie nouvelle par le Baptême, les fidèles
sont en effet fortifiés par le sacrement de Confirmation et reçoivent
dans l’Eucharistie le pain de la vie éternelle. Ainsi, par ces
sacrements de l’initiation chrétienne, ils reçoivent toujours
davantage les richesses de la vie divine et s’avancent vers la
perfection de la charité " (Paul VI, const. ap. " Divinæ
consortium naturæ " ; cf. OICA prænotanda 1-2).
ARTICLE 1
LE SACREMENT DU BAPTÊME
1213 Le saint Baptême est le fondement de toute
la vie chrétienne le porche de la vie dans l’Esprit (vitæ
spiritualis ianua) et la porte qui ouvre l’accès aux autres
sacrements. Par le Baptême nous sommes libérés du péché et régénérés
comme fils de Dieu, nous devenons membres du Christ et nous sommes
incorporés à l’Église et faits participants à sa mission (cf. Cc.
Florence : DS 1314 ; CIC, can. 204, § 1 ; 849 ;
CCEO, can. 675, § 1) : " Le Baptême est le sacrement
de la régénération par l’eau et dans la parole "
(Catech. R. 2, 2, 5).
I. Comment est appelé ce sacrement ?
1214 On l’appelle Baptême selon le rite
central par lequel il est réalisé : baptiser (en grec baptizein)
signifie " plonger ", " immerger " ;
la " plongée " dans l’eau symbolise
l’ensevelissement du catéchumène dans la mort du Christ d’où il
sort par la résurrection avec lui (cf. Rm 6, 3-4 ; Col 2, 12),
comme " nouvelle créature " (2 Co 5, 17 ; Ga
6, 15).
1215 Ce sacrement est aussi appelé " le
bain de la régénération et de la rénovation en l’Esprit
Saint " (Tt 3, 5), car il signifie et réalise cette naissance
de l’eau et de l’Esprit sans laquelle " nul ne peut entrer
au Royaume de Dieu " (Jn 3, 5).
1216 " Ce bain est appelé illumination,
parce que ceux qui reçoivent cet enseignement [catéchétique] ont
l’esprit illuminé ... " (S. Justin, apol. 1, 61, 12). Ayant
reçu dans le Baptême le Verbe, " la lumière véritable qui
illumine tout homme " (Jn 1, 9), le baptisé, " après
avoir été illuminé " (He 10, 32) est devenu " fils
de lumière " (1 Th 5, 5), et " lumière "
lui-même (Ep 5, 8) :
Le Baptême est le plus beau et le plus
magnifique des dons de Dieu... Nous l’appelons don, grâce,
onction, illumination, vêtement d’incorruptibilité, bain de régénération,
sceau, et tout ce qu’il y a de plus précieux. Don, parce
qu’il est conféré à ceux qui n’apportent rien ; grâce,
parce qu’il est donné même à des coupables ; Baptême,
parce que le péché est enseveli dans l’eau ; onction,
parce qu’il est sacré et royal (tels sont ceux qui sont oints) ;
illumination, parce qu’il est lumière éclatante ; vêtement,
parce qu’il voile notre honte ; bain, parce
qu’il lave ; sceau, parce qu’il nous garde et
qu’il est le signe de la seigneurie de Dieu (S. Grégoire de Naz.,
or. 40, 3-4 : PG 36, 361C).
II. Le Baptême dans l’économie du salut
Les préfigurations du Baptême dans l’Ancienne
Alliance
1217 Dans la liturgie de la Nuit Pascale, lors de
la bénédiction de l’eau baptismale, l’Église fait
solennellement mémoire des grands événements de l’histoire du salut
qui préfiguraient déjà le mystère du Baptême :
Par ta puissance, Seigneur, tu accomplis des
merveilles dans tes sacrements, et au cours de l’histoire du salut
tu t’es servi de l’eau, ta créature, pour nous faire connaître
la grâce du Baptême (MR, Vigile pascale 42 : bénédiction de
l’eau baptismale).
1218 Depuis l’origine du monde, l’eau, cette
créature humble et admirable, est la source de la vie et de la fécondité.
L’Écriture Sainte la voit comme " couvée " par
l’Esprit de Dieu (cf. Gn 1, 2) :
Dès le commencement du monde, c’est ton Esprit
qui planait sur les eaux pour qu’elles reçoivent en germe la
force qui sanctifie (MR, Vigile pascale 42 : bénédiction de
l’eau baptismale).
1219 L’Église a vu dans
l’Arche de Noé une préfiguration du salut par le Baptême. En effet,
par elle " un petit nombre, en tout huit personnes, furent
sauvés par l’eau " (1 P 3, 20) :
Par les flots du déluge, tu annonçais le Baptême
qui fait revivre, puisque l’eau y préfigurait également la mort
du péché et la naissance de toute justice (MR, Vigile pascale 42 :
bénédiction de l’eau baptismale).
1220 Si l’eau de source symbolise la vie,
l’eau de la mer est un symbole de la mort. C’est pourquoi il pouvait
figurer le mystère de la Croix. De par ce symbolisme le baptême
signifie la communion avec la mort du Christ.
1221 C’est surtout la traversée de la Mer
Rouge, véritable libération d’Israël de l’esclavage d’Égypte,
qui annonce la libération opérée par le Baptême :
Aux enfants d’Abraham, tu as fait passer la mer
Rouge à pied sec pour que la race libérée de la servitude préfigure
le peuple des baptisés (ibid.).
1222 Enfin, le Baptême est préfiguré dans la
traversée du Jourdain, par laquelle le peuple de Dieu reçoit le don de
la terre promise à la descendance d’Abraham, image de la vie éternelle.
La promesse de cet héritage bienheureux s’accomplit dans la nouvelle
Alliance.
Le Baptême du Christ
1223 Toutes les préfigurations de l’Ancienne
Alliance trouvent leur achèvement dans le Christ Jésus. Il commence sa
vie publique après s’être fait baptiser par S. Jean le Baptiste dans
le Jourdain (cf. Mt 3, 13), et, après sa résurrection, il donne cette
mission aux apôtres : " Allez donc, de toutes les
nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils
et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai
prescrit " (Mt 28, 19-20 ; cf. Mc 16, 15-16).
1224 Notre Seigneur s’est volontairement soumis
au Baptême de S. Jean, destiné aux pécheurs, pour " accomplir
toute justice " (Mt 3, 15). Ce geste de Jésus est une
manifestation de son " anéantissement " (Ph 2, 7).
L’Esprit qui planait sur les eaux de la première création, descend
alors sur le Christ, en prélude de la nouvelle création, et le Père
manifeste Jésus comme son " Fils bien-aimé " (Mt
3, 16-17).
1225 C’est dans sa Pâque que le Christ a
ouvert à tous les hommes les sources du Baptême. En effet, il avait déjà
parlé de sa passion qu’il allait souffrir à Jérusalem comme d’un
" Baptême " dont il devait être baptisé (Mc 10,
38 ; cf. Lc 12, 50). Le Sang et eau qui ont coulé du côté
transpercé de Jésus crucifié (Jn 19, 34) sont des types du Baptême
et de l’Eucharistie, sacrements de la vie nouvelle (cf. 1 Jn 5, 6-8) :
dès lors, il est possible " de naître de l’eau et de
l’Esprit " pour entrer dans le Royaume de Dieu (Jn 3, 5).
Vois où tu es baptisé, d’où vient le Baptême,
sinon de la croix du Christ, de la mort du Christ. Là est tout le
mystère : il a souffert pour toi. C’est en lui que tu es
racheté, c’est en lui que tu es sauvé, et, à ton tour tu
deviens sauveur (S. Ambroise, sacr. 2, 6 : PL 16, 425C).
Le Baptême dans l’Église
1226 Dès le jour de la Pentecôte, l’Église a
célébré et administré le saint Baptême. En effet, S. Pierre déclare
à la foule bouleversée par sa prédication : " Convertissez-vous,
et que chacun de vous se fasse baptiser au nom de Jésus Christ pour
obtenir le pardon de ses péchés. Vous recevrez alors le don du
Saint-Esprit " (Ac 2, 38). Les Apôtres et leurs
collaborateurs offrent le Baptême à quiconque croit en Jésus :
juifs, craignants-Dieu, païens (cf. Ac 2, 41 ; 8, 12-13 ; 10,
48 ; 16, 15). Toujours le Baptême apparaît comme lié à la foi :
" Crois au Seigneur Jésus ; alors tu seras sauvé, toi
et toute ta maison ", déclare S. Paul à son geôlier de
Philippes. Le récit continue : " Le geôlier reçut le
Baptême sur-le-champ, lui et tous les siens " (Ac 16, 31-33).
1227 Selon l’apôtre S. Paul, par le Baptême
le croyant communie à la mort du Christ ; il est enseveli et il
ressuscite avec lui :
Baptisés dans le Christ Jésus, c’est dans sa
mort que tous nous avons été baptisés. Nous avons donc été
ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le
Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père nous vivions
nous aussi dans une vie nouvelle (Rm 6, 3-4 ; cf. Col 2, 12).
Les baptisés ont " revêtu le Christ "
(Ga 3, 27). Par l’Esprit Saint, le Baptême est un bain qui purifie,
sanctifie et justifie (cf. 1 Co 6, 11 ; 12, 13).
1228 Le Baptême est donc un bain d’eau en
lequel " la semence incorruptible " de la Parole de
Dieu produit son effet vivificateur (cf. 1 P 1, 23 ; Ep 5, 26). S.
Augustin dira du Baptême : " La parole rejoint l’élément
matériel et cela devient un sacrement " (ev. Jo. 80, 3).
III. Comment est célébré le sacrement du baptême ?
L’initiation chrétienne
1229 Devenir chrétien, cela se réalise dès les
temps des apôtres par un cheminement et une initiation à plusieurs étapes.
Ce chemin peut être parcouru rapidement ou lentement. Il devra toujours
comporter quelques éléments essentiels : l’annonce de la
Parole, l’accueil de l’Évangile entraînant une conversion, la
profession de foi, le Baptême, l’effusion de l’Esprit Saint,
l’accès à la communion eucharistique.
1230 Cette initiation a beaucoup varié au cours
des siècles et selon les circonstances. Aux premiers siècles de l’Église,
l’initiation chrétienne a connu un grand déploiement, avec une
longue période de catéchuménat et une suite de rites préparatoires
qui jalonnaient liturgiquement le chemin de la préparation catéchuménale
et qui aboutissaient à la célébration des sacrements de
l’initiation chrétienne.
1231 Là où le Baptême des enfants est devenu
largement la forme habituelle de la célébration de ce sacrement,
celle-ci est devenue un acte unique qui intègre de façon très abrégée
les étapes préalables à l’initiation chrétienne. De par sa nature
même le Baptême des enfants exige un catéchuménat postbaptismal.
Il ne s’agit pas seulement du besoin d’une instruction postérieure
au baptême, mais de l’épanouissement nécessaire de la grâce
baptismale dans la croissance de la personne. C’est le lieu propre du catéchisme.
1232 Le deuxième Concile du Vatican a restauré,
pour l’Église latine, " le catéchuménat des adultes,
distribué en plusieurs étapes " (SC 64). On en trouve les
rites dans l’Ordo initiationis christianæ adultorum (1972). Le
Concile a par ailleurs permis que, " outre les éléments
d’initiation fournis par la tradition chrétienne ", on
admette, en terre de mission, " ces autres éléments
d’initiation dont on constate la pratique dans chaque peuple, pour
autant qu’on peut les adapter au rite chrétien " (SC 65 ;
cf. SC 37-40).
1233 Aujourd’hui,
donc, dans tous les rites latins et orientaux, l’initiation chrétienne
des adultes commence dès leur entrée en catéchuménat, pour atteindre
son point culminant dans une seule célébration des trois sacrements du
Baptême, de la Confirmation et de l’Eucharistie (cf. AG 14 ;
CIC, can. 851 ; 865 ; 866). Dans les rites orientaux
l’initiation chrétienne des enfants commence au Baptême suivi immédiatement
par la Confirmation et l’Eucharistie, tandis que dans le rite romain
elle se poursuit durant des années de catéchèse, pour s’achever
plus tard avec la Confirmation et l’Eucharistie, sommet de leur
initiation chrétienne (cf. CIC, can. 851, 2° ; 868).
La mystagogie de la célébration
1234 Le sens et la grâce du sacrement du Baptême
apparaissent clairement dans les rites de sa célébration. C’est en
suivant, avec une participation attentive, les gestes et les paroles de
cette célébration que les fidèles sont initiés aux richesses que ce
sacrement signifie et réalise en chaque nouveau baptisé.
1235 Le signe de la croix, au seuil de la
célébration, marque l’empreinte du Christ sur celui qui va lui
appartenir et signifie la grâce de la rédemption que le Christ nous a
acquis par sa croix.
1236 L’annonce de la Parole de Dieu
illumine de la vérité révélée les candidats et l’assemblée, et
suscite la réponse de la foi, inséparable du Baptême. En effet, le
Baptême est d’une façon particulière " le sacrement de la
foi " puisqu’il est l’entrée sacramentelle dans la vie de
foi.
1237 Puisque le Baptême signifie la libération
du péché et de son instigateur, le diable, on prononce un (ou
plusieurs) exorcisme(s) sur le candidat. Il est oint de l’huile
des catéchumènes ou bien le célébrant lui impose la main, et il
renonce explicitement à Satan. Ainsi préparé, il peut confesser la
foi de l’Église à laquelle il sera " confié "
par le Baptême (cf. Rm 6, 17).
1238 L’eau baptismale est alors consacrée
par une prière d’épiclèse (soit au moment même, soit dans la nuit
pascale). L’Église demande à Dieu que, par son Fils, la puissance du
Saint-Esprit descende dans cette eau, afin que ceux qui y seront baptisés
" naissent de l’eau et de l’Esprit " (Jn 3, 5).
1239 Suit alors le rite essentiel du
sacrement : le Baptême proprement dit, qui signifie et réalise
la mort au péché et l’entrée dans la vie de la Très Sainte Trinité
à travers la configuration au Mystère pascal du Christ. Le Baptême
est accompli de la façon la plus significative par la triple immersion
dans l’eau baptismale. Mais depuis l’antiquité il peut aussi être
conféré en versant par trois fois l’eau sur la tête du candidat.
1240 Dans l’Église latine, cette triple
infusion est accompagnée par les paroles du ministre : " N.,
je te baptise au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ".
Dans les liturgies orientales, le catéchumène étant tourné vers
l’Orient, le prêtre dit : " Le serviteur de Dieu, N.,
est baptisé au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ".
Et à l’invocation de chaque personne de la Très Sainte Trinité, il
le plonge dans l’eau et le relève.
1241 L’onction du saint chrême, huile
parfumée consacrée par l’évêque, signifie le don de l’Esprit
Saint au nouveau baptisé. Il est devenu un chrétien, c’est-à-dire
" oint " de l’Esprit Saint, incorporé au Christ,
qui est oint prêtre, prophète et roi (cf. OBP 62).
1242 Dans la liturgie des Églises d’Orient,
l’onction postbaptismale est le sacrement de la Chrismation
(Confirmation). Dans la liturgie romaine, elle annonce une seconde
onction de saint chrême que donnera l’évêque : le sacrement de
la Confirmation qui, pour ainsi dire, " confirme "
et achève l’onction baptismale.
1243 Le vêtement blanc symbolise que le
baptisé a " revêtu le Christ " (Ga 3, 27) :
est ressuscité avec le Christ. Le cierge, allumé au cierge
pascal, signifie que le Christ a illuminé le néophyte. Dans le Christ,
les baptisés sont " la lumière du monde " (Mt 5,
14 ; cf. Ph 2, 15).
Le nouveau baptisé est maintenant enfant de Dieu
dans le Fils Unique. Il peut dire la prière des enfants de Dieu :
le Notre Père.
1244 La première communion eucharistique. Devenu
enfant de Dieu, revêtu de la robe nuptiale, le néophyte est admis
" au festin des noces de l’Agneau " et reçoit la
nourriture de la vie nouvelle, le Corps et le Sang du Christ. Les Églises
orientales gardent une conscience vive de l’unité de l’initiation
chrétienne en donnant la sainte Communion à tous les nouveaux baptisés
et confirmés, même aux petits enfants, se souvenant de la parole du
Seigneur : " Laissez venir à moi les petits enfants, ne
les empêchez pas " (Mc 10, 14). L’Église latine, qui réserve
l’accès à la sainte Communion à ceux qui ont atteint l’âge de
raison, exprime l’ouverture du Baptême sur l’Eucharistie en
approchant de l’autel l’enfant nouveau baptisé pour la prière du
Notre Père.
1245 La bénédiction solennelle conclut
la célébration du Baptême. Lors du Baptême de nouveau-nés la bénédiction
de la mère tient une place spéciale.
IV. Qui peut recevoir le baptême ?
1246 " Tout être humain non encore
baptisé, et lui seul, est capable de recevoir le Baptême "
(CIC, can. 864 ; CCEO, can. 679).
Le Baptême des adultes
1247 Depuis les origines de l’Église, le Baptême
des adultes est la situation la plus courante là où l’annonce de
l’Évangile est encore récente. Le catéchuménat (préparation au
Baptême) tient alors une place importante. Initiation à la foi et à
la vie chrétienne, il doit disposer à l’accueil du don de Dieu dans
le Baptême, la Confirmation et l’Eucharistie.
1248 Le catéchuménat, ou formation des catéchumènes,
a pour but de permettre à ces derniers, en réponse à l’initiative
divine et en union avec une communauté ecclésiale, de mener leur
conversion et leur foi à maturité. Il s’agit d’une " formation
à la vie chrétienne intégrale... par laquelle les disciples sont unis
au Christ leur Maître. Les catéchumènes doivent donc être initiés
... aux mystères du salut et à la pratique d’une vie évangélique,
et introduits, par des rites sacrés, célébrés à des époques
successives, dans la vie de la foi, de la liturgie et de la charité du
Peuple de Dieu " (AG 14 ; cf. OICA 19 et 98).
1249 Les catéchumènes " sont déjà
unis à l’Église, ils sont déjà de la maison du Christ, et il
n’est pas rare qu’ils mènent une vie de foi, espérance et charité "
(AG 14). " La Mère Église les enveloppe déjà comme siens
dans son amour en prenant soin d’eux " (LG 14 ; cf.
CIC, can. 206 ; 788, § 3).
Le Baptême des enfants
1250 Naissant avec une nature humaine déchue et
entachée par le péché originel, les enfants eux aussi ont besoin de
la nouvelle naissance dans le Baptême (cf. DS 1514) afin d’être libérés
du pouvoir des ténèbres et d’être transférés dans le domaine de
la liberté des enfants de Dieu (cf. Col 1, 12-14), à laquelle tous les
hommes sont appelés. La pure gratuité de la grâce du salut est
particulièrement manifeste dans le Baptême des enfants. L’Église et
les parents priveraient dès lors l’enfant de la grâce inestimable de
devenir enfant de Dieu s’ils ne lui conféraient le Baptême peu après
la naissance (cf. CIC, can. 867 ; CCEO, can. 681 ; 686, 1).
1251 Les parents chrétiens reconnaîtront que
cette pratique correspond aussi à leur rôle de nourricier de la vie
que Dieu leur a confiés (cf. LG 11 ; 41 ; GS 48 ; CIC,
can. 868).
1252 La pratique de baptiser les petits enfants
est une tradition immémoriale de l’Église. Elle est
attestée explicitement depuis le deuxième siècle. Il
est cependant bien possible que, dès le début de la prédication
apostolique, lorsque des " maisons " entières ont
reçu le Baptême (cf. Ac 16, 15. 33 ; 18, 8 ; 1 Co 1, 16), on
ait aussi baptisé les enfants (cf. CDF, instr. " Pastoralis
actio ").
Foi et Baptême
1253 Le Baptême est le sacrement de la foi (cf.
Mc 16, 16). Mais la foi a besoin de la communauté des croyants. Ce
n’est que dans la foi de l’Église que chacun des fidèles peut
croire. La foi qui est requise pour le Baptême n’est pas une foi
parfaite et mûre, mais un début qui est appelé à se développer. Au
catéchumène ou à son parrain on demande : " Que
demandez-vous à l’Église de Dieu ? " Et il répond :
" La foi ! ".
1254 Chez tous les baptisés, enfants ou adultes,
la foi doit croître après le Baptême. C’est pour cela que
l’Église célèbre chaque année, dans la nuit pascale, le
renouvellement des promesses du Baptême. La préparation au Baptême ne
mène qu’au seuil de la vie nouvelle. Le Baptême est la source de la
vie nouvelle dans le Christ de laquelle jaillit toute la vie chrétienne.
1255 Pour que la grâce baptismale puisse se déployer,
l’aide des parents est importante. C’est là aussi le rôle du parrain
ou de la marraine, qui doivent être des croyants solides,
capables et prêts à aider le nouveau baptisé, enfant ou adulte, sur
son chemin dans la vie chrétienne (cf. CIC, can. 872-874). Leur tâche
est une véritable fonction ecclésiale (" officium " ;
cf. SC 67) Toute la communauté ecclésiale porte une part de
responsabilité dans le déploiement et la garde de la grâce reçue au
Baptême.
V. Qui peut baptiser ?
1256 Sont ministres ordinaires du Baptême l’évêque
et le prêtre, et, dans l’Église latine, aussi le diacre (cf. CIC,
can. 861, § 1 ; CCEO, can. 677, § 1). En cas de nécessité,
toute personne, même non baptisée, ayant l’intention requise, peut
baptiser, en appliquant la formule baptismale trinitaire (cf. CIC 861,
§ 2). L’intention requise, c’est de vouloir faire ce que fait l’Église
en baptisant. L’Église voit la raison de cette possibilité dans la
volonté salvifique universelle de Dieu (cf. 1 Tm 2, 4) et dans la nécessité
du Baptême pour le salut (cf. Mc 16, 16) (cf. DS 1315 ; 646 ;
CIC, can. 861, § 2).
VI. La nécessité du baptême
1257 Le Seigneur lui-même affirme que le Baptême
est nécessaire pour le salut (cf. Jn 3, 5). Aussi a-t-il commandé à
ses disciples d’annoncer l’Évangile et de baptiser toutes les
nations (cf. Mt 28, 20) (cf. DS 1618 ; LG 14 ; AG 5). Le Baptême
est nécessaire au salut pour ceux auxquels l’Évangile a été annoncé
et qui ont eu la possibilité de demander ce sacrement (cf. Mc 16, 16).
L’Église ne connaît pas d’autre moyen que le baptême pour assurer
l’entrée dans la béatitude éternelle ; c’est pourquoi elle
se garde de négliger la mission qu’elle a reçu du Seigneur de faire
" renaître de l’eau et de l’Esprit " tous ceux
qui peuvent être baptisés. Dieu a lié le salut au sacrement du
Baptême, mais il n’est pas lui-même lié à ses sacrements.
1258 Depuis toujours, l’Église garde la ferme
conviction que ceux qui subissent la mort en raison de la foi, sans
avoir reçu le Baptême, sont baptisés par leur mort pour et avec le
Christ. Ce Baptême du sang, comme le désir du Baptême,
porte les fruits du Baptême, sans être sacrement.
1259 Pour les catéchumènes qui meurent
avant leur Baptême, leur désir explicite de le recevoir uni à la
repentance de leurs péchés et à la charité, leur assure le salut
qu’ils n’ont pas pu recevoir par le sacrement.
1260 " Puisque le Christ est mort pour
tous, et que la vocation dernière de l’homme est réellement unique,
à savoir divine, nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous,
d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associé(s)
au mystère pascal " (GS 22 ; cf. LG 16 ; AG 7).
Tout homme qui, ignorant l’Évangile du Christ et son Église, cherche
la vérité et fait la volonté de Dieu selon qu’il la connaît, peut
être sauvé. On peut supposer que de telles personnes auraient désiré
explicitement le Baptême si elles en avaient connu la nécessité.
1261 Quant aux enfants morts sans Baptême,
l’Église ne peut que les confier à la miséricorde de Dieu, comme
elle le fait dans le rite des funérailles pour eux. En effet, la grande
miséricorde de Dieu qui veut que tous les hommes soient sauvés (cf. 1
Tm 2, 4), et la tendresse de Jésus envers les enfants, qui lui a fait
dire : " Laissez les enfants venir à moi, ne les empêchez
pas " (Mc 10, 14), nous permettent d’espérer qu’il y ait
un chemin de salut pour les enfants morts sans baptême. D’autant plus
pressant est aussi l’appel de l’Église à ne pas empêcher les
petits enfants de venir au Christ par le don du saint Baptême.
VII. La grâce du baptême
1262 Les différents effets du Baptême sont
signifiés par les éléments sensibles du rite sacramentel. La plongée
dans l’eau fait appel aux symbolismes de la mort et de la
purification, mais aussi de la régénération et du renouvellement. Les
deux effets principaux sont donc la purification des péchés et la
nouvelle naissance dans l’Esprit Saint (cf. Ac 2, 38 ; Jn 3, 5).
Pour la rémission des péchés ...
1263 Par le Baptême, tous les péchés
sont remis, le péché originel et tous les péchés personnels ainsi
que toutes les peines du péché (cf. DS 1316). En effet, en ceux qui
ont été régénérés il ne demeure rien qui les empêcherait
d’entrer dans le Royaume de Dieu, ni le péché d’Adam, ni le péché
personnel, ni les suites du péché, dont la plus grave est la séparation
de Dieu.
1264 Dans le baptisé, certaines conséquences
temporelles du péché demeurent cependant, tels les souffrances, la
maladie, la mort, ou les fragilités inhérentes à la vie comme les
faiblesses de caractère, etc., ainsi qu’une inclination au péché
que la Tradition appelle la concupiscence, ou, métaphoriquement,
" le foyer du péché " (fomes peccati) :
" Laissée pour nos combats, la concupiscence n’est pas
capable de nuire à ceux qui, n’y consentant pas, résistent avec
courage par la grâce du Christ. Bien plus, ‘celui qui aura combattu
selon les règles sera couronné’ (2 Tm 2, 5) " (Cc. Trente :
DS 1515).
" Une créature nouvelle "
1265 Le Baptême ne purifie pas seulement de tous
les péchés, il fait aussi du néophyte " une création
nouvelle " (2 Co 5, 17), un fils adoptif de Dieu (cf. Ga 4,
5-7) qui est devenu " participant de la nature divine "
(2 P 1, 4), membre du Christ (cf. 1 Co 6, 15 ; 12, 27) et cohéritier
avec Lui (Rm 8, 17), temple de l’Esprit Saint (cf. 1 Co 6, 19).
1266 La Très Sainte Trinité donne au baptisé
la grâce sanctifiante, la grâce de la justification qui
– le rend capable de croire en Dieu, d’espérer
en Lui et de L’aimer par les vertus théologales ;
– lui donne de pouvoir vivre et agir sous la motion
de l’Esprit Saint par les dons du Saint-Esprit ;
– lui permet de croître dans le bien par les vertus
morales.
Ainsi, tout l’organisme de la vie surnaturelle du
chrétien a sa racine dans le saint Baptême.
Incorporés à l’Église, Corps du Christ
1267 Le Baptême fait de nous des membres du
Corps du Christ. " Dès lors, ... ne sommes-nous pas membres
les uns des autres ? " (Ep 4, 25). Le Baptême incorpore
à l’Église. Des fonts baptismaux naît l’unique peuple de Dieu
de la Nouvelle Alliance qui dépasse toutes les limites naturelles ou
humaines des nations, des cultures, des races et des sexes : " Aussi
bien est-ce en un seul Esprit que nous tous avons été baptisés pour
ne former qu’un seul corps " (1 Co 12, 13).
1268 Les baptisés sont devenus des " pierres
vivantes " pour " l’édification d’un édifice
spirituel, pour un sacerdoce saint " (1 P 2, 5). Par le Baptême
ils participent au sacerdoce du Christ, à sa mission prophétique et
royale, ils sont " une race élue, un sacerdoce royal, une
nation sainte, un peuple acquis pour annoncer les louanges de Celui qui
(les) a appelés des ténèbres à son admirable lumière " (1
P 2, 9). Le Baptême donne part au sacerdoce commun des fidèles.
1269 Devenu membre de l’Église, le baptisé
n’appartient plus à lui-même (1 Co 6, 19), mais à Celui qui est
mort et ressuscité pour nous (cf. 2 Co 5, 15). Dès lors il est appelé
à se soumettre aux autres (cf. Ep 5, 21 ; 1 Co 16, 15-16), à les
servir (cf. Jn 13, 12-15) dans la communion de l’Église, et à être
" obéissant et docile " aux chefs de l’Église
(He 13, 17) et à les considérer avec respect et affection (cf. 1 Th 5,
12-13). De même que le Baptême est la source de responsabilités et de
devoirs, le baptisé jouit aussi de droits au sein de l’Église :
à recevoir les sacrements, à être nourri avec la parole de Dieu et à
être soutenu par les autres aides spirituelles de l’Église. (cf. LG
37 ; CIC, can. 208-223 ; CCEO, can. 675, 2).
1270 " Devenus fils de Dieu par la régénération
[baptismale], (les baptisés) sont tenus de professer devant les hommes
la foi que par l’Église ils ont reçue de Dieu " (LG 11) et
de participer à l’activité apostolique et missionnaire du Peuple de
Dieu (cf. LG 17 ; AG 7, 23).
Le lien sacramentel de l’unité des chrétiens
1271 Le Baptême constitue le fondement de la
communion entre tous les chrétiens, aussi avec ceux qui ne sont pas
encore en pleine communion avec l’Église catholique : " En
effet, ceux qui croient au Christ et qui ont reçu validement le Baptême,
se trouvent dans une certaine communion, bien qu’imparfaite, avec l’Église
catholique ... Justifiés par la foi reçue au Baptême, incorporés au
Christ, ils portent à juste titre le nom de chrétiens, et les fils de
l’Église catholique les reconnaissent à bon droit comme des frères
dans le Seigneur " (UR 3). " Le Baptême est donc le
lien sacramentel d’unité existant entre ceux qui ont été régénérés
par lui " (UR 22).
Une marque spirituelle indélébile...
1272 Incorporé au Christ par le Baptême, le
baptisé est configuré au Christ (cf. Rm 8, 29). Le Baptême scelle le
chrétien d’une marque spirituelle indélébile (" character ")
de son appartenance au Christ. Cette marque n’est effacée par aucun péché,
même si le péché empêche le Baptême de porter des fruits de salut
(cf. DS 1609-1619). Donné une fois pour toutes, le Baptême ne peut pas
être réitéré.
1273 Incorporés à l’Église par le Baptême,
les fidèles ont reçu le caractère sacramentel qui les consacre pour
le culte religieux chrétien (cf. LG 11). Le sceau baptismal rend
capable et engage les chrétiens à servir Dieu dans une participation
vivante à la sainte Liturgie de l’Église et à exercer leur
sacerdoce baptismal par le témoignage d’une vie sainte et d’une
charité efficace (cf. LG 10).
1274 Le " sceau du Seigneur "
(" Dominicus character " : S.
Augustin, ep. 98, 5: PL 33, 362) est le sceau dont l’Esprit Saint nous
a marqués " pour le jour de la rédemption " (Ep 4,
30 ; cf. Ep 1, 13-14 ; 2 Co 1, 21-22). " Le Baptême,
en effet, est le sceau de la vie éternelle " (S. Irénée,
dem. 3). Le fidèle qui aura " gardé le sceau "
jusqu’au bout, c’est-à-dire qui sera resté fidèle aux exigences
de son Baptême, pourra s’en aller " marqué du signe de la
foi " (MR, Canon Romain 97), avec la foi de son Baptême, dans
l’attente de la vision bienheureuse de Dieu – consommation de la foi
– et dans l’espérance de la résurrection.
En bref
1275 L’initiation chrétienne s’accomplit par
l’ensemble de trois sacrements : le Baptême qui est le début
de la vie nouvelle ; la Confirmation qui en est
l’affermissement ; et l’Eucharistie qui nourrit le disciple
avec le Corps et le Sang du Christ en vue de sa transformation en Lui.
1276 " Allez donc, de toutes les nations
faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du
Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai
prescrit " (Mt 28, 19-20).
1277 Le Baptême constitue la naissance à la vie
nouvelle dans le Christ. Selon la volonté du Seigneur il est nécessaire
pour le salut, comme l’Église elle-même, à laquelle introduit le
Baptême.
1278 Le rite essentiel du Baptême consiste à
plonger dans l’eau le candidat ou à verser de l’eau sur sa tête,
en prononçant l’invocation de la Très Sainte Trinité, c’est à
dire du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
1279 Le fruit du Baptême ou grâce baptismale est
une réalité riche qui comporte : la rémission du péché
originel et de tous les péchés personnels ; la naissance à la
vie nouvelle par laquelle l’homme devient fils adoptif du Père,
membre du Christ, temple du Saint-Esprit Par le fait même, le baptisé
est incorporé à l’Église, Corps du Christ, et rendu participant
du sacerdoce du Christ.
1280 Le Baptême imprime dans l’âme un signe
spirituel indélébile, le caractère, qui consacre le baptisé au
culte de la religion chrétienne. En raison du caractère le Baptême
ne peut pas être réitéré (cf. DS 1609 et 1624).
1281 Ceux qui subissent la mort à cause de la foi,
les catéchumènes et tous les hommes qui, sous l’impulsion de la grâce,
sans connaître l’Église, cherchent sincèrement Dieu et
s’efforcent d’accomplir sa volonté, peuvent être sauvés même
s’ils n’ont pas reçu le Baptême (cf. LG 16).
1282 Depuis les temps les plus anciens, le Baptême
est administré aux enfants, car il est une grâce et un don de Dieu
qui ne supposent pas des mérites humains ; les enfants sont
baptisés dans la foi de l’Église. L’entrée dans la vie chrétienne
donne accès à la vraie liberté.
1283 Quant aux enfants morts sans Baptême, la
liturgie de l’Église nous invite à avoir confiance en la miséricorde
divine, et à prier pour leur salut.
1284 En cas de nécessité, toute personne peut
baptiser, pourvu qu’elle ait l’intention de faire ce que fait l’Église,
et qu’elle verse de l’eau sur la tête du candidat en disant :
" Je te baptise au nom du Père et du Fils et du
Saint-Esprit ".
ARTICLE 2
LE SACREMENT DE LA CONFIRMATION
1285 Avec le Baptême et l’Eucharistie, le
sacrement de la Confirmation constitue l’ensemble des " sacrements
de l’initiation chrétienne ", dont l’unité doit être
sauvegardée. Il faut donc expliquer aux fidèles que la réception de
ce sacrement est nécessaire à l’accomplissement de la grâce
baptismale (cf. OCf prænotanda 1). En effet, " par le
sacrement de Confirmation, le lien des baptisés avec l’Église est
rendu plus parfait, ils sont enrichis d’une force spéciale de
l’Esprit Saint et obligés ainsi plus strictement à répandre et à défendre
la foi par la parole et par l’action en vrais témoins du Christ "
(LG 11 ; cf. OCf prænotanda 2).
I. La confirmation dans l’économie du salut
1286 Dans l’Ancien Testament, les prophètes
ont annoncé que l’Esprit du Seigneur reposerait sur le Messie espéré
(cf. Is 11, 2) en vue de sa mission salvifique (cf. Lc 4, 16-22 ;
Is 61, 1). La descente de l’Esprit Saint sur Jésus lors de son baptême
par Jean fut le signe que c’était Lui qui devait venir, qu’il était
le Messie, le Fils de Dieu (cf. Mt 3, 13-17 ; Jn 1, 33-34). Conçu
de l’Esprit Saint, toute sa vie et toute sa mission se réalisent en
une communion totale avec l’Esprit Saint que le Père lui donne " sans
mesure " (Jn 3, 34).
1287 Or, cette plénitude de l’Esprit ne devait
pas rester uniquement celle du Messie, elle devait être communiquée à
tout le peuple messianique (cf. Ez 36, 25-27 ; Jl 3,
1-2). A plusieurs reprises le Christ a promis cette effusion de
l’Esprit (cf. Lc 12, 12 ; Jn 3, 5-8 ; 7, 37-39 ; 16,
7-15 ; Ac 1, 8), promesse qu’il a réalisée d’abord le jour de
Pâques (Jn 20, 22) et ensuite, de manière plus éclatante le jour de
la Pentecôte (cf. Ac 2, 1-4). Remplis de l’Esprit Saint, les apôtres
commencent à proclamer " les merveilles de Dieu "
(Ac 2, 11) et Pierre de déclarer que cette effusion de l’Esprit est
le signe des temps messianiques (cf. Ac 2, 17-18). Ceux qui ont alors
cru à la prédication apostolique et qui se sont fait baptiser, ont à
leur tour reçu le don du Saint-Esprit (cf. Ac 2, 38).
1288 " Depuis ce temps, les apôtres,
pour accomplir la volonté du Christ, communiquèrent aux néophytes,
par l’imposition des mains, le don de l’Esprit qui porte à son achèvement
la grâce du Baptême (cf. Ac 8, 15-17 ; 19, 5-6). C’est pourquoi
dans l’Épître aux Hébreux, prend place, parmi les éléments de la
première instruction chrétienne, la doctrine sur les Baptêmes et
aussi sur l’imposition des mains (cf. He 6, 2). L’imposition des
mains est à bon droit reconnue par la tradition catholique comme
l’origine du sacrement de la Confirmation qui perpétue, en quelque
sorte, dans l’Église, la grâce de la Pentecôte " (Paul
VI, const. ap. " Divinæ consortium naturæ ").
1289 Très tôt, pour mieux signifier le don du
Saint-Esprit, s’est ajoutée à l’imposition des mains une onction
d’huile parfumée (chrême). Cette onction illustre le nom de " chrétien "
qui signifie " oint " et qui tire son origine de
celui du Christ lui même, lui que " Dieu a oint de l’Esprit
Saint " (Ac 10, 38). Et ce rite d’onction existe jusqu’à
nos jours, tant en Orient qu’en Occident. C’est pourquoi, en Orient,
on appelle ce sacrement chrismation, onction de chrême, ou myron,
ce qui signifie " chrême ". En Occident le nom de Confirmation
suggère que ce sacrement à la fois confirme le baptême et affermit la
grâce baptismale.
Deux traditions : l’Orient et l’Occident
1290 Aux premiers siècles, la Confirmation
constitue généralement une unique célébration avec le Baptême,
formant avec celui-ci, selon l’expression de S. Cyprien, un " sacrement
double ". Parmi d’autres raisons, la multiplication des Baptêmes
d’enfants, et ce en tout temps de l’année, et la multiplication des
paroisses (rurales), agrandissant les diocèses, ne permettent plus la
présence de l’évêque à toutes les célébrations baptismales. En
Occident, parce que l’on désire réserver à l’évêque l’achèvement
du Baptême s’instaure la séparation temporelle des deux sacrements.
L’Orient a gardé unis les deux sacrements, si bien que la
confirmation est donnée par le prêtre qui baptise. Celui-ci cependant
ne peut le faire qu’avec le " myron " consacré
par un évêque (cf. CCEO, can. 695, 1 ; 696, 1).
1291 Une coutume de l’Église de Rome a facilité
le développement de la pratique occidentale : grâce à une double
onction au saint chrême après le Baptême : accomplie déjà par
le prêtre sur le néophyte, au sortir du bain baptismal, elle est achevée
par une deuxième onction faite par l’évêque sur le front de chacun
des nouveaux baptisés (cf. S. Hippolyte, trad. ap. 21). La première
onction au saint chrême, celle que donne le prêtre, est restée
rattachée au rite baptismal ; elle signifie la participation du
baptisé aux fonctions prophétique, sacerdotale et royale du Christ. Si
le Baptême est conféré à un adulte, il n’y a qu’une onction
postbaptismale : celle de la Confirmation.
1292 La pratique des Églises d’Orient souligne
davantage l’unité de l’initiation chrétienne. Celle de l’Église
latine exprime plus nettement la communion du nouveau chrétien avec son
évêque, garant et serviteur de l’unité de son Église, de sa
catholicité et de son apostolicité, et par là, le lien avec les
origines apostoliques de l’Église du Christ.
II. Les signes et le rite de la Confirmation
1293 Dans le rite de ce sacrement, il convient de
considérer le signe de l’onction et ce que l’onction désigne
et imprime : le sceau spirituel.
L’onction, dans la symbolique biblique et
antique, est riche de nombreuses significations : l’huile est
signe d’abondance (cf. Dt 11, 14 etc.) et de joie (cf. Ps 23, 5 ;
104, 15), elle purifie (onction avant et après le bain) et elle rend
souple (l’onction des athlètes et des lutteurs) ; elle est signe
de guérison, puisqu’elle adoucit les contusions et les plaies (cf. Is
1, 6 ; Lc 10, 34) et elle rend rayonnant de beauté, de santé et
de force.
1294 Toutes ces significations de l’onction
d’huile se retrouvent dans la vie sacramentelle. L’onction avant le
Baptême avec l’huile des catéchumènes signifie purification et
fortification ; l’onction des malades exprime la guérison et le
réconfort. L’onction du saint chrême après le Baptême, dans la
Confirmation et dans l’Ordination, est le signe d’une consécration.
Par la Confirmation, les chrétiens, c’est-à-dire ceux qui sont
oints, participent davantage à la mission de Jésus-Christ et à la plénitude
de l’Esprit Saint dont Il est comblé, afin que toute leur vie dégage
" la bonne odeur du Christ " (cf. 2 Co 2, 15).
1295 Par cette onction, le confirmand reçoit
" la marque ", le sceau de l’Esprit Saint.
Le sceau est le symbole de la personne (cf. Gn 38, 18 ; Ct 8, 6),
signe de son autorité (cf. Gn 41, 42), de sa propriété sur un objet
(cf. Dt 32, 34) – c’est ainsi que l’on marquait les soldats du
sceau de leur chef et aussi les esclaves de celui de leur maître – ;
il authentifie un acte juridique (cf. 1 R 21, 8) ou un document (cf. Jr
32, 10) et le rend éventuellement secret (cf. Is 29, 11).
1296 Le Christ lui-même se déclare marqué du
sceau de son Père (cf. Jn 6, 27). Le chrétien, lui aussi, est marqué
d’un sceau : " Celui qui nous affermit avec vous dans
le Christ et qui nous a donné l’onction, c’est Dieu, Lui qui nous a
marqués de son sceau et a mis dans nos cœurs les arrhes de l’Esprit "
(2 Co 1, 22 ; cf. Ep 1, 13 ; 4,30). Ce sceau de l’Esprit
Saint, marque l’appartenance totale au Christ, la mise à son service
pour toujours, mais aussi la promesse de la protection divine dans la
grande épreuve eschatologique (cf. Ap 7, 2-3 ; 9, 4 ; Ez 9,
4-6).
La célébration de la Confirmation
1297 Un moment important qui précède la célébration
de la Confirmation, mais qui, d’une certaine façon, en fait partie,
est la consécration du saint chrême. C’est l’évêque
qui, le Jeudi Saint, au cours de la Messe chrismale, consacre le saint
chrême pour tout son diocèse. Dans les Églises d’Orient, cette consécration
est même réservée au Patriarche :
La liturgie d’Antioche exprime ainsi l’épiclèse
de la consécration du saint chrême (myron) : " [Père
.... envoie ton Esprit Saint] sur nous et sur cette huile qui est
devant nous et consacre-la, afin qu’elle soit pour tous ceux qui
en seront oints et marqués : myron saint, myron sacerdotal,
myron royal, onction d’allégresse, le vêtement de la lumière,
le manteau du salut, le don spirituel, la sanctification des âmes
et des corps, le bonheur impérissable, le sceau indélébile, le
bouclier de la foi et le casque terrible contre toutes les œuvres
de l’Adversaire " (Pontificale iuxta ritum Ecclesiae
Syrorum Occidentalium id est Antiochiae, Pars I, Versio latina,
polyglotte Vaticane 1941 p. 36-37).
1298 Lorsque la Confirmation est célébrée séparément
du Baptême, comme c’est le cas dans le rite romain, la liturgie du
sacrement commence par le renouvellement des promesses du Baptême et
par la profession de foi des confirmands. Ainsi il apparaît
clairement que la Confirmation se situe dans la suite du Baptême (cf.
SC 71). Lorsqu’un adulte est baptisé, il reçoit immédiatement la
Confirmation et participe à l’Eucharistie (cf. CIC, can. 866).
1299 Dans le rite romain, l’évêque étend les
mains sur l’ensemble des confirmands, geste qui, depuis le temps des
apôtres, est le signe du don de l’Esprit. Et l’évêque
d’invoquer l’effusion de l’Esprit :
" Dieu très bon, Père de Jésus, le
Christ, notre Seigneur, regarde ces baptisés sur qui nous imposons
les mains : par le Baptême, tu les as libérés du péché, tu
les as fait renaître de l’eau et de l’Esprit. Comme tu l’as
promis, répands maintenant sur eux ton Esprit Saint ;
donne-leur en plénitude l’Esprit qui reposait sur ton Fils Jésus :
esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de
force, esprit de connaissance et d’affection filiale ;
remplis-les de l’esprit de la crainte de Dieu. Par le Christ,
notre Seigneur " (Ordo confirmationis, 25,
polyglotte Vaticane 1973, p. 26).
1300 Suit le rite essentiel du sacrement.
Dans le rite latin, " le sacrement de Confirmation est conféré
par l’onction du saint chrême sur le front, faite en imposant la
main, et par ces paroles : ‘Accipe signaculum doni Spiritus
Sancti’ (‘Sois marqué de l’Esprit Saint, le don de Dieu’) "
(Paul VI, const. ap. Divinæ consortium naturæ). Dans les Églises
orientales de rite byzantin, l’onction du myron se fait, après une
prière d’Epiclèse, sur les parties les plus significatives du corps :
le front, les yeux, les narines, les oreilles, les lèvres, la poitrine,
le dos, les mains et les pieds ; chaque onction étant accompagnée
de la formule : " Sfragiz dwreaz
Pneumatoz Agiou " (" Signaculum doni Spiritus
Sancti ", " Sceau du don de l’Esprit-Saint "
[Rituale per le Chiese orientali di rito bizantino in lingua greca,
Pars 1, Vatican 1954 p. 36]).
1301 Le baiser de paix qui achève le rite du
sacrement signifie et manifeste la communion ecclésiale avec l’évêque
et avec tous les fidèles (cf. S. Hippolyte, trad. ap. 21).
III. Les effets de la Confirmation
1302 Il ressort de la célébration que l’effet
du sacrement de Confirmation est l’effusion spéciale de l’Esprit
Saint, comme elle fut accordée jadis aux Apôtres au jour de la Pentecôte.
1303 De ce fait, la Confirmation apporte
croissance et approfondissement de la grâce baptismale :
– elle nous enracine plus profondément dans la
filiation divine qui nous fait dire " Abba, Père "
(Rm 8, 15) ;
– elle nous unit plus fermement au Christ ;
– elle augmente en nous les dons de l’Esprit
Saint ;
– elle rend notre lien avec l’Église plus
parfait (cf. LG 11) ;
– elle nous accorde une force spéciale de
l’Esprit Saint pour répandre et défendre la foi par la parole et par
l’action en vrais témoins du Christ, pour confesser vaillamment le
nom du Christ et pour ne jamais éprouver de la honte à l’égard de
la croix (cf. DS 1319 ; LG 11 ; 12) :
Rappelle donc que tu as reçu le signe spirituel,
l’Esprit de sagesse et d’intelligence, l’Esprit de conseil et
de force, l’Esprit de connaissance et de piété, l’Esprit de la
sainte crainte, et garde ce que tu as reçu. Dieu le Père t’a
marqué de son signe, le Christ Seigneur t’a confirmé et il a mis
en ton cœur le gage de l’Esprit (S. Ambroise, myst. 7, 42 :
PL 16, 402-403).
1304 Comme le Baptême dont elle est l’achèvement,
la Confirmation est donnée une seule fois. La Confirmation imprime en
effet dans l’âme une marque spirituelle indélébile, le
" caractère " (cf. DS 1609), qui est le signe de ce
que Jésus-Christ a marqué un chrétien du sceau de son Esprit en le
revêtant de la force d’en haut pour qu’il soit son témoin (cf. Lc
24, 48-49).
1305 Le " caractère "
perfectionne le sacerdoce commun des fidèles, reçu dans le Baptême,
et " le confirmé reçoit la puissance de confesser la foi du
Christ publiquement, et comme en vertu d’une charge (quasi ex
officio) " (S. Thomas d’A., s. th. 3, 72, 5, ad 2).
IV. Qui peut recevoir ce sacrement ?
1306 Tout baptisé non encore confirmé peut et
doit recevoir le sacrement de la Confirmation (cf. CIC, can. 889, § 1).
Puisque Baptême, Confirmation et Eucharistie forment une unité, il
s’en suit que " les fidèles sont tenus par l’obligation
de recevoir ce sacrement en temps opportun " (CIC, can. 890),
car sans la Confirmation et l’Eucharistie, le sacrement du Baptême
est, certes, valide et efficace, mais l’initiation chrétienne reste
inachevée.
1307 La coutume latine, depuis des siècles,
indique " l’âge de la discrétion " comme point
de référence pour recevoir la Confirmation. En danger de mort, on doit
cependant confirmer les enfants même s’ils n’ont pas encore atteint
l’âge de la discrétion (cf. CIC, can. 891 ; 883, 3).
1308 Si l’on parle parfois de la Confirmation
comme du " sacrement de la maturité chrétienne ",
il ne faudrait pas pour autant confondre l’âge adulte de la foi avec
l’âge adulte de la croissance naturelle, ni oublier que la grâce
baptismale est une grâce d’élection gratuite et imméritée qui
n’a pas besoin d’une " ratification " pour
devenir effective. S. Thomas le rappelle :
L’âge du corps ne constitue pas un préjudice
pour l’âme. Ainsi, même dans l’enfance, l’homme peut
recevoir la perfection de l’âge spirituel dont parle la Sagesse
(4, 8) : ‘La vieillesse honorable n’est pas celle que
donnent de longs jours, elle ne se mesure pas au nombre des années’.
C’est ainsi que de nombreux enfants, grâce à la force du
Saint-Esprit qu’ils avaient reçue, ont lutté courageusement et
jusqu’au sang pour le Christ (Thomas d’A., s. th. 3, 72, 8, ad
2).
1309 La préparation à la Confirmation
doit viser à conduire le chrétien vers une union plus intime au
Christ, vers une familiarité plus vive avec l’Esprit Saint, son
action, ses dons et ses appels, afin de pouvoir mieux assumer les
responsabilités apostoliques de la vie chrétienne. Par là, la catéchèse
de la confirmation s’efforcera d’éveiller le sens de
l’appartenance à l’Église de Jésus-Christ, tant à l’Église
universelle qu’à la communauté paroissiale. Cette dernière porte
une responsabilité particulière dans la préparation des confirmands
(cf. OCf prænotanda 3).
1310 Pour recevoir la Confirmation il faut être
en état de grâce. Il convient de recourir au sacrement de Pénitence
pour être purifié en vue du don du Saint-Esprit. Une prière plus
intense doit préparer à recevoir avec docilité et disponibilité la
force et les grâces du Saint-Esprit (cf. Ac 1, 14).
1311 Pour la Confirmation, comme pour le Baptême,
il convient que les candidats cherchent l’aide spirituelle d’un parrain
ou d’une marraine. Il convient qu’il soit le même que pour
le Baptême pour bien marquer l’unité des deux sacrements (cf. OCf prænotanda
5 ; 6 ; CIC, can. 893, § 1. 2).
V. Le ministre de la Confirmation
1312 Le ministre originaire de la
Confirmation est l’évêque (LG 26).
En Orient, c’est ordinairement le prêtre
qui baptise qui donne aussi immédiatement la Confirmation dans une
seule et même célébration. Il le fait cependant avec le saint chrême
consacré par le patriarche ou l’évêque, ce qui exprime l’unité
apostolique de l’Église dont les liens sont renforcés par le
sacrement de Confirmation. Dans l’Église latine on applique la même
discipline dans les baptêmes d’adultes ou lorsqu’est admis à la
pleine communion avec l’Église un baptisé d’une autre communauté
chrétienne qui n’a pas validement le sacrement de confirmation (cf.
CIC, can. 883, § 2).
1313 Dans le rite latin, le ministre ordinaire de
la Confirmation est l’évêque (cf. CIC, can. 882). Même si l’évêque
peut, en cas de nécessité, concéder la faculté à des prêtres
d’administrer la Confirmation (CIC, can. 884, § 2), il convient
qu’il la confère lui-même, n’oubliant pas que c’est pour cette
raison que la célébration de la Confirmation a été temporellement séparée
du Baptême. Les évêques sont les successeurs des apôtres, ils ont reçu
la plénitude du sacrement de l’ordre. L’administration de ce
sacrement par eux marque bien qu’il a pour effet d’unir ceux qui le
reçoivent plus étroitement à l’Église, à ses origines
apostoliques et à sa mission de témoigner du Christ.
1314 Si un chrétien est en danger de mort, tout
prêtre peut lui donner la Confirmation (cf. CIC, can. 883, § 3). En
effet, l’Église veut qu’aucun de ses enfants, même tout petit, ne
sorte de ce monde sans avoir été parfait par l’Esprit Saint avec le
don de la plénitude du Christ.
En bref
1315 " Apprenant que la Samarie avait
accueilli la parole de Dieu, les Apôtres qui étaient à Jérusalem y
envoyèrent Pierre et Jean. Ceux-ci descendirent donc chez les
Samaritains et prièrent pour eux, afin que l’Esprit Saint leur fût
donné. Car il n’était encore tombé sur aucun d’eux ; ils
avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus. Alors
Pierre et Jean se mirent à leur imposer les mains et ils recevaient
l’Esprit Saint " (Ac 8, 14-17).
1316 La Confirmation parfait la grâce baptismale ;
elle est le sacrement qui donne l’Esprit Saint pour nous enraciner
plus profondément dans la filiation divine, nous incorporer plus
fermement au Christ, rendre plus solide notre lien avec l’Église,
nous associer davantage à sa mission et nous aider à rendre témoignage
de la foi chrétienne par la parole accompagnée des œuvres.
1317 La Confirmation, comme le Baptême, imprime
dans l’âme du chrétien un signe spirituel ou caractère indélébile ;
c’est pourquoi on ne peut recevoir ce sacrement qu’une seule fois
dans la vie .
1318 En Orient, ce sacrement est administré immédiatement
après le Baptême ; il est suivi de la participation à
l’Eucharistie, tradition qui met en relief l’unité des trois
sacrements de l’initiation chrétienne. Dans l’Église latine on
administre ce sacrement lorsque l’âge de raison est atteint, et on
en réserve ordinairement la célébration à l’évêque, signifiant
ainsi que ce sacrement affermit le lien ecclésial.
1319 Un candidat pour la Confirmation qui a atteint
l’âge de raison doit professer la foi, être en état de grâce,
avoir l’intention de recevoir le sacrement et être préparé à
assumer son rôle de disciple et de témoin du Christ, dans la
communauté ecclésiale et dans les affaires temporelles.
1320 Le rite essentiel de la Confirmation est
l’onction avec le saint chrême sur le front du baptisé (en Orient
également sur d’autres organes des sens), avec l’imposition de la
main du ministre et les paroles : " Accipe signaculum
doni Spiritus Sancti " (" Reçois la marque du don
de l’Esprit Saint "), dans le rite romain, " Signaculum
doni Spiritus Sancti " (" Sceau du don de
l’Esprit Saint "), dans le rite byzantin.
1321 Lorsque la Confirmation est célébrée séparément
du Baptême, son lien avec le Baptême est exprimé entre autres par
le renouvellement des engagements baptismaux. La célébration de la
Confirmation au cours de l’Eucharistie contribue à souligner
l’unité des sacrements de l’initiation chrétienne.
ARTICLE 3
LE SACREMENT DE L’EUCHARISTIE
1322 La Sainte Eucharistie achève l’initiation
chrétienne. Ceux qui ont été élevés à la dignité du sacerdoce
royal par le baptême et configurés plus profondément au Christ par la
confirmation, ceux-là, par le moyen de l’Eucharistie, participent
avec toute la communauté au sacrifice même du Seigneur.
1323 " Notre Sauveur, à la dernière Cène,
la nuit où il était livré, institua le sacrifice eucharistique de son
Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long
des siècles, jusqu’à ce qu’il vienne, et pour confier à l’Église,
son Épouse bien-aimée, le mémorial de sa mort et de sa résurrection :
sacrement de l’amour, signe de l’unité, lien de la charité,
banquet pascal dans lequel le Christ est reçu en nourriture, l’âme
est comblée de grâce et le gage de la gloire future nous est donné "
(SC 47).
I. L’Eucharistie – source et sommet de la vie
ecclésiale
1324 L’Eucharistie est " source et
sommet de toute la vie chrétienne " (LG 11). " Les
autres sacrements ainsi que tous les ministères ecclésiaux et les tâches
apostoliques sont tous liés à l’Eucharistie et ordonnés à elle.
Car la sainte Eucharistie contient tout le trésor spirituel de l’Église,
c’est-à-dire le Christ lui-même, notre Pâque " (PO 5).
1325 " La communion de vie avec Dieu et
l’unité du peuple de Dieu, par lesquelles l’Église est elle-même,
l’Eucharistie les signifie et les réalise. En elle se trouve le
sommet à la fois de l’action par laquelle, dans le Christ, Dieu
sanctifie le monde, et du culte qu’en l’Esprit Saint les hommes
rendent au Christ et, par lui, au Père " (CdR, instr. " Eucharisticum
mysterium " 6).
1326 Enfin, par la célébration eucharistique
nous nous unissons déjà à la liturgie du ciel et nous anticipons la
vie éternelle quand Dieu sera tout en tous (cf. 1 Co 15, 28).
1327 Bref, l’Eucharistie est le résumé et la
somme de notre foi : " Notre manière de penser
s’accorde avec l’Eucharistie, et l’Eucharistie en retour confirme
notre manière de penser " (S. Irénée, hær. 4, 18, 5).
II. Comment est appelé ce sacrement ?
1328 La richesse inépuisable de ce sacrement
s’exprime dans les différents noms qu’on lui donne. Chacun de ces
noms en évoque certains aspects. On l’appelle :
Eucharistie parce qu’il est action de grâces
à Dieu. Les mots eucharistein (Lc 22, 19 ; 1 Co 11, 24) et eulogein
(Mt 26, 26 ; Mc 14, 22) rappellent les bénédictions juives qui
proclament – surtout pendant le repas – les œuvres de Dieu :
la création, la rédemption et la sanctification.
1329 Repas du Seigneur (cf. 1 Co 11, 20) parce
qu’il s’agit de la Cène que le Seigneur a pris avec ses
disciples la veille de sa passion et de l’anticipation du repas des
noces de l’Agneau (cf. Ap 19, 9) dans la Jérusalem céleste.
Fraction du Pain parce que ce rite, propre au
repas juif, a été utilisé par Jésus lorsqu’il bénissait et
distribuait le pain en maître de table (cf. Mt 14, 19 ; 15, 36 ;
Mc 8, 6. 19), surtout lors de la dernière Cène (cf. Mt 26, 26 ; 1
Co 11, 24). C’est à ce geste que les disciples le reconnaîtront après
sa résurrection (cf. Lc 24, 13-35), et c’est de cette expression que
les premiers chrétiens désigneront leurs assemblées eucharistiques
(cf. Ac 2, 42. 46 ; 20, 7. 11). Ils signifient par là que tous
ceux qui mangent à l’unique pain rompu, le Christ, entrent en
communion avec Lui et ne forment plus qu’un seul corps en Lui (cf. 1
Co 10, 16-17).
Assemblée eucharistique (synaxis) parce
que l’Eucharistie est célébrée en l’assemblée des fidèles,
expression visible de l’Église (cf. 1 Co 11, 17-34).
1330 Mémorial de la passion et de la résurrection
du Seigneur.
Saint Sacrifice, parce qu’il actualise
l’unique sacrifice du Christ Sauveur et qu’il inclut l’offrande de
l’Église ; ou encore saint sacrifice de la messe, " sacrifice
de louange " (He 13, 15 ; cf. Ps 116, 13. 17),
sacrifice spirituel (cf. 1 P 2, 5), sacrifice pur (cf. Ml 1,
11) et saint, puisqu’il achève et dépasse tous les sacrifices
de l’Ancienne Alliance.
Sainte et divine Liturgie, parce que toute la
liturgie de l’Église trouve son centre et son expression la plus
dense dans la célébration de ce sacrement ; c’est dans le même
sens qu’on l’appelle aussi célébration des Saints Mystères. On
parle aussi du Très Saint Sacrement parce qu’il est le
sacrement des sacrements. On désigne de ce nom les espèces
eucharistiques gardées dans le tabernacle.
1331 Communion, parce que c’est par ce
sacrement que nous nous unissons au Christ qui nous rend participants de
son Corps et de son Sang pour former un seul corps (cf. 1 Co 10, 16-17) ;
on l’appelle encore les choses saintes : ta hagia ;
sancta (Const. Ap. 8, 13, 12 ; Didaché 9, 5 ; 10, 6) –
c’est le sens premier de la " communion des saints "
dont parle le Symbole des Apôtres -, pain des anges, pain du ciel, médicament
d’immortalité (S. Ignace d’Antioche, Eph. 20, 2), viatique...
1332 Sainte Messe parce que la liturgie dans
laquelle s’est accompli le mystère du salut, se termine par l’envoi
des fidèles (" missio ") afin qu’ils
accomplissent la volonté de Dieu dans leur vie quotidienne.
III. L’eucharistie dans l’économie du salut
Les signes du pain et du vin
1333 Au cœur de la célébration de
l’Eucharistie il y a le pain et le vin qui, par les paroles du Christ
et par l’invocation de l’Esprit Saint, deviennent le Corps et le
Sang du Christ. Fidèle à l’ordre du Seigneur l’Église continue de
faire, en mémoire de Lui, jusqu’à son retour glorieux, ce qu’il a
fait la veille de sa passion : " Il prit du pain... ",
" Il prit la coupe remplie de vin... ". En devenant
mystérieusement le Corps et le Sang du Christ, les signes du pain et du
vin continuent à signifier aussi la bonté de la création. Ainsi, dans
l’Offertoire, nous rendons grâce au Créateur pour le pain et le vin
(cf. Ps 104, 13-15), fruit " du travail de l’homme ",
mais d’abord " fruit de la terre " et " de
la vigne ", dons du Créateur. L’Église voit dans le geste
de Melchisédech, roi et prêtre, qui " apporta du pain et du
vin " (Gn 14, 18) une préfiguration de sa propre offrande
(cf. MR, Canon Romain 95 : " Supra quæ ").
1334 Dans l’Ancienne Alliance, le pain et le
vin sont offerts en sacrifice parmi les prémices de la terre, en signe
de reconnaissance au Créateur. Mais ils reçoivent aussi une nouvelle
signification dans le contexte de l’Exode : Les pains azymes
qu’Israël mange chaque année à la Pâque, commémorent la hâte du
départ libérateur d’Égypte ; le souvenir de la manne du désert
rappellera toujours à Israël qu’il vit du pain de la Parole de Dieu
(cf. Dt 8, 3). Enfin, le pain de tous les jours est le fruit de la Terre
promise, gage de la fidélité de Dieu à ses promesses. La " coupe
de bénédiction " (1 Co 10, 16), à la fin du repas pascal
des juifs, ajoute à la joie festive du vin une dimension
eschatologique, celle de l’attente messianique du rétablissement de Jérusalem.
Jésus a institué son Eucharistie en donnant un sens nouveau et définitif
à la bénédiction du pain et de la coupe.
1335 Les miracles de la multiplication des pains,
lorsque le Seigneur dit la bénédiction, rompit et distribua les pains
par ses disciples pour nourrir la multitude, préfigurent la
surabondance de cet unique pain de son Eucharistie (cf. Mt 14, 13-21 ;
15, 32-39). Le signe de l’eau changé en vin à Cana (cf. Jn 2, 11)
annonce déjà l’Heure de la glorification de Jésus. Il manifeste
l’accomplissement du repas des noces dans le Royaume du Père, où les
fidèles boiront le vin nouveau (cf. Mc 14, 25) devenu le Sang du
Christ.
1336 La première annonce de l’Eucharistie a
divisé les disciples, tout comme l’annonce de la Passion les a
scandalisés : " Ce langage-là est trop fort ! Qui
peut l’écouter ? " (Jn 6, 60). L’Eucharistie et la
croix sont des pierres d’achoppement. C’est le même mystère, et il
ne cesse d’être occasion de division. " Voulez-vous partir,
vous aussi ? " (Jn 6, 67) : Cette question du
Seigneur retentit à travers les âges, invitation de son amour à découvrir
que c’est Lui seul qui a " les paroles de la vie éternelle "
(Jn 6, 68) et qu’accueillir dans la foi le don de son Eucharistie,
c’est l’accueillir Lui-même.
L’institution de l’Eucharistie
1337 Le Seigneur, ayant aimé les siens, les aima
jusqu’à la fin. Sachant que l’heure était venue de partir de ce
monde pour retourner à son Père, au cours d’un repas, il leur lava
les pieds et leur donna le commandement de l’amour (cf. Jn 13, 1-17).
Pour leur laisser un gage de cet amour, pour ne jamais s’éloigner des
siens et pour les rendre participants de sa Pâque, il institua
l’Eucharistie comme mémorial de sa mort et de sa résurrection, et il
ordonna à ses apôtres de le célébrer jusqu’à son retour, " les
établissant alors prêtres du Nouveau Testament " (Cc. Trente :
DS 1740).
1338 Les trois évangiles synoptiques et S. Paul
nous ont transmis le récit de l’institution de l’Eucharistie ;
de son côté, S. Jean rapporte les paroles de Jésus dans la synagogue
de Capharnaüm, paroles qui préparent l’institution de
l’Eucharistie : Le Christ se désigne comme le pain de vie,
descendu du ciel (cf. Jn 6).
1339 Jésus a choisi le temps de la Pâque pour
accomplir ce qu’il avait annoncé à Capharnaüm : donner à ses
disciples son Corps et son Sang :
Vint le jour des Azymes, où l’on devait immoler la
pâque. [Jésus] envoya alors Pierre et Jean : ‘Allez dit-il,
nous préparer la Pâque, que nous la mangions’... Ils s’en allèrent
donc ... et préparèrent la Pâque. L’heure venue, il se mit à table
avec ses apôtres et leur dit : ‘J’ai désiré avec ardeur
manger cette pâque avec vous avant de souffrir ; car je vous le
dis, je ne la mangerai jamais plus jusqu’à ce qu’elle
s’accomplisse dans le Royaume de Dieu’ ... Puis, prenant du pain et
rendant grâces, il le rompit et le leur donna, en disant : ‘Ceci
est mon Corps, qui va être donné pour vous ; faites ceci en mémoire
de moi’. Il fit de même pour la coupe après le repas, disant :
‘’Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être
versé pour vous’ (Lc 22, 7-20 ; cf. Mt 26, 17-29 ; Mc 14,
12-25 ; 1 Co 11, 23-26).
1340 En célébrant la dernière Cène avec ses
apôtres au cours du repas pascal, Jésus a donné son sens définitif
à la pâque juive. En effet, le passage de Jésus à son Père par sa
mort et sa résurrection, la Pâque nouvelle, est anticipée dans la Cène
et célébrée dans l’Eucharistie qui accomplit la pâque juive et
anticipe la pâque finale de l’Église dans la gloire du Royaume.
" Faites ceci en mémoire de moi "
1341 Le commandement de Jésus de répéter ses
gestes et ses paroles " jusqu’à ce qu’il vienne ",
ne demande pas seulement de se souvenir de Jésus et de ce qu’il a
fait. Il vise la célébration liturgique, par les apôtres et leurs
successeurs, du mémorial du Christ, de sa vie, de sa
mort, de sa résurrection et de son intercession auprès du Père.
1342 Dès le commencement l’Église a été fidèle
à l’ordre du Seigneur. De l’Église de Jérusalem il est dit :
Ils se montraient assidus à l’enseignement des
apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du
pain et aux prières... Jour après jour, d’un seul cœur, ils fréquentaient
assidûment le Temple et rompaient le pain dans leurs maisons,
prenant leur nourriture avec joie et simplicité de cœur (Ac 2, 42.
46).
1343 C’était surtout
" le premier jour de la semaine ", c’est-à-dire
le jour du dimanche, le jour de la résurrection de Jésus, que les chrétiens
se réunissaient " pour rompre le pain " (Ac 20, 7).
Depuis ces temps-là jusqu’à nos jours la célébration de
l’Eucharistie s’est perpétuée, de sorte qu’aujourd’hui nous la
rencontrons partout dans l’Église, avec la même structure
fondamentale. Elle demeure le centre de la vie de l’Église.
1344 Ainsi, de célébration en célébration,
annonçant le mystère pascal de Jésus " jusqu’à ce
qu’Il vienne " (1 Co 11, 26), le peuple de Dieu en pèlerinage
" s’avance par la porte étroite de la Croix " (AG
1) vers le banquet céleste, quand tous les élus s’assiéront à la
table du Royaume.
IV. La célébration liturgique de l’eucharistie
La messe de tous les siècles
1345 Dès le deuxième siècle, nous avons le témoignage
de S. Justin le Martyr sur les grandes lignes du déroulement de la célébration
eucharistique. Elles sont restées les mêmes jusqu’à nos jours pour
toutes les grandes familles liturgiques. Voici ce qu’il écrit, vers
155, pour expliquer à l’empereur païen Antonin le Pieux (138-161) ce
que font les chrétiens :
[Le jour qu’on appelle jour du soleil, a lieu
le rassemblement en un même endroit de tous ceux qui habitent la
ville ou la campagne.
On lit les mémoires des Apôtres et les écrits
des Prophètes, autant que le temps le permet.
Quand le lecteur a fini, celui qui préside prend
la parole pour inciter et exhorter à l’imitation de ces belles
choses.
Ensuite, nous nous levons tous ensemble et nous
faisons des prières] pour nous-mêmes ... et pour tous les autres,
où qu’ils soient, afin que nous soyons trouvés justes par notre
vie et nos actions et fidèles aux commandements, pour obtenir ainsi
le salut éternel.
Quand les prières sont terminées, nous nous
donnons un baiser les uns aux autres.
Ensuite, on apporte à celui qui préside les frères
du pain et une coupe d’eau et de vin mélangés.
Il les prend et fait monter louange et gloire
vers le Père de l’univers, par le nom du Fils et du Saint-Esprit
et il rend grâce (en grec : eucharistian) longuement de
ce que nous avons été jugés dignes de ces dons.
Quand il a terminé les prières et les actions
de grâce, tout le peuple présent pousse une acclamation en disant :
Amen.
Lorsque celui qui préside a fait l’action de
grâce et que le peuple a répondu, ceux que chez nous on appelle
diacres distribuent à tous ceux qui sont présents du pain, du vin
et de l’eau " eucharistiés " et ils en
apportent aux absents (S. Justin, apol. 1, 65 [le texte entre
crochets est du chapitre 67]).
1346 La liturgie de l’Eucharistie se déroule
selon une structure fondamentale qui s’est conservée à travers les
siècles jusqu’à nous. Elle se déploie en deux grands moments qui
forment une unité foncière :
– le rassemblement, la liturgie de la Parole,
avec les lectures, l’homélie et la prière universelle ;
– la liturgie eucharistique, avec la présentation
du pain et du vin, l’action de grâce consécratoire et la communion.
Liturgie de la Parole et liturgie eucharistique
constituent ensemble " un seul et même acte du culte "
(SC 56) ; en effet, la table dressée pour nous dans
l’Eucharistie est à la fois celle de la Parole de Dieu et celle du
Corps du Seigneur (cf. DV 21).
1347 N’est-ce pas là le mouvement même du
repas pascal de Jésus ressuscité avec ses disciples : chemin
faisant, il leur expliquait les Écritures, puis, se mettant à table
avec eux, " il prit le pain, dit la bénédiction, le rompit
et le leur donna " (cf. Lc 24, 13-35) ?
Le mouvement de la célébration
1348 Tous se rassemblent. Les chrétiens
accourent dans un même lieu pour l’assemblée eucharistique. A sa tête
le Christ lui-même qui est l’acteur principal de l’Eucharistie. Il
est le grand prêtre de la Nouvelle Alliance. C’est Lui-même qui préside
invisiblement toute célébration eucharistique. C’est en Le représentant
que l’évêque ou le prêtre (agissant " in persona Christi
capitis ") préside l’assemblée, prend la parole après les
lectures, reçoit les offrandes et dit la prière eucharistique. Tous
ont leur part active dans la célébration, chacun à sa manière :
les lecteurs, ceux qui apportent les offrandes, ceux qui donnent la
communion, et le peuple tout entier dont l’Amen manifeste la
participation.
1349 La liturgie de la Parole comporte
" les écrits des prophètes ", c’est-à-dire
l’Ancien Testament, et " les mémoires des apôtres ",
c’est-à-dire leurs épîtres et les Évangiles ; après l’homélie
qui exhorte à accueillir cette Parole comme ce qu’elle est vraiment,
Parole de Dieu (cf. 1 Th 2, 13), et à la mettre en pratique, viennent
les intercessions pour tous les hommes, selon la parole de l’Apôtre :
" Je recommande donc, avant tout, qu’on fasse des demandes,
des prières, des supplications, des actions de grâces pour tous les
hommes, pour les rois et tous les dépositaires de l’autorité "
(1 Tm 2, 1-2).
1350 La présentation des oblats
(l’offertoire) : on apporte alors, parfois en procession,
le pain et le vin à l’autel qui seront offerts par le prêtre au nom
du Christ dans le sacrifice eucharistique où ils deviendront le corps
et le sang de Celui-ci. C’est le geste même du Christ à la Dernière
Cène, " prenant du pain et une coupe ". " Cette
oblation, l’Église seule l’offre, pure, au Créateur, en lui
offrant avec action de grâce ce qui provient de sa création "
(S. Irénée, hær. 4, 18, 4 ; cf. Ml 1, 11). La présentation des
oblats à l’autel assume le geste de Melchisédech et confie les dons
du créateur entre les mains du Christ. C’est Lui qui, dans Son
sacrifice, mène à la perfection toutes les tentatives humaines
d’offrir des sacrifices.
1351 Dès le début, les chrétiens apportent,
avec le pain et le vin pour l’Eucharistie, leurs dons pour le partage
avec ceux qui sont dans le besoin. Cette coutume de la collecte
(cf. 1 Co 16, 1), toujours actuelle, s’inspire de l’exemple du
Christ qui s’est fait pauvre pour nous enrichir (cf. 2 Co 8, 9) :
Ceux qui sont riches et qui veulent, donnent,
chacun selon ce qu’il s’est lui-même imposé ; ce qui est
recueilli est remis à celui qui préside et lui, il assiste les
orphelins et les veuves, ceux que la maladie ou toute autre cause
prive de ressources, les prisonniers, les immigrés et, en un mot,
il secourt tous ceux qui sont dans le besoin (S. Justin, apol. 1,
67, 6).
1352 L’anaphore : Avec la prière
eucharistique, prière d’action de grâce et de consécration, nous
arrivons au cœur et au sommet de la célébration :
Dans la préface l’Église rend grâce au Père,
par le Christ, dans l’Esprit Saint, pour toutes ses œuvres, pour la
création, la rédemption et la sanctification. Toute la communauté
rejoint alors cette louange incessante que l’Église céleste, les
anges et tous les saints, chantent au Dieu trois fois Saint.
1353 Dans l’épiclèse elle demande au Père
d’envoyer son Esprit Saint (ou la puissance de sa bénédiction :
cf. MR, Canon Romain 90) sur le pain et le vin, afin qu’ils
deviennent, par sa puissance, le Corps et le Sang de Jésus-Christ, et
que ceux qui prennent part à l’Eucharistie soient un seul corps et un
seul esprit (certaines traditions liturgiques placent l’épiclèse après
l’anamnèse).
Dans le récit de l’institution la force des
paroles et de l’action du Christ, et la puissance de l’Esprit Saint,
rendent sacramentellement présents sous les espèces du pain et du vin
son Corps et son Sang, son sacrifice offert sur la croix une fois pour
toutes.
1354 Dans l’anamnèse qui suit, l’Église
fait mémoire de la passion, de la résurrection et du retour glorieux
du Christ Jésus ; elle présente au Père l’offrande de son Fils
qui nous réconcilie avec Lui.
Dans les intercessions, l’Église exprime
que l’Eucharistie est célébrée en communion avec toute l’Église
du ciel et de la terre, des vivants et des défunts, et dans la
communion avec les pasteurs de l’Église, le Pape, l’évêque du
diocèse, son presbyterium et ses diacres, et tous les évêques du
monde entier avec leurs églises.
1355 Dans la communion, précédée de la
prière du Seigneur et de la fraction du pain, les fidèles reçoivent
" le pain du ciel " et " la coupe du salut ",
le Corps et le Sang du Christ qui s’est livré " pour la vie
du monde " (Jn 6, 51) :
Parce que ce pain et ce vin ont été, selon
l’expression ancienne, " eucharistiés ",
" nous appelons cette nourriture Eucharistie et
personne ne peut y prendre part s’il ne croit pas à la vérité
de ce qu’on enseigne chez nous, s’il n’a reçu le bain pour la
rémission des péchés et la nouvelle naissance et s’il ne vit
selon les préceptes du Christ " (S. Justin, apol. 1, 66,
1-2).
V. Le sacrifice sacramentel : action de grâce,
mémorial, présence
1356 Si les chrétiens célèbrent
l’Eucharistie depuis les origines, et sous une forme qui, dans sa
substance, n’a pas changé à travers la grande diversité des âges
et des liturgies, c’est parce que nous nous savons liés par l’ordre
du Seigneur, donné la veille de sa passion : " faites
ceci en mémoire de moi " (1 Co 11, 24-25).
1357 Cet ordre du Seigneur, nous
l’accomplissons en célébrant le mémorial de son sacrifice.
Ce faisant, nous offrons au Père ce qu’il nous a Lui-même
donné : les dons de sa création, le pain et le vin, devenus, par
la puissance de l’Esprit Saint et par les paroles du Christ, le Corps
et le Sang du Christ : le Christ est ainsi rendu réellement et
mystérieusement présent.
1358 Il nous faut donc considérer
l’Eucharistie
– comme action de grâce et louange au Père,
– comme mémorial sacrificiel du Christ et
de son Corps,
– comme présence du Christ par la puissance de sa
Parole et de son Esprit.
L’action de grâce et la louange au Père
1359 L’Eucharistie, sacrement de notre salut
accompli par le Christ sur la croix, est aussi un sacrifice de louange
en action de grâce pour l’œuvre de la création. Dans le sacrifice
eucharistique, toute la création aimée par Dieu est présentée au Père
à travers la mort et la résurrection du Christ. Par le Christ, l’Église
peut offrir le sacrifice de louange en action de grâce pour tout ce que
Dieu a fait de bon, de beau et de juste dans la création et dans
l’humanité.
1360 L’Eucharistie est un sacrifice d’action
de grâce au Père, une bénédiction par laquelle l’Église exprime
sa reconnaissance à Dieu pour tous ses bienfaits, pour tout ce qu’il
a accompli par la création, la rédemption et la sanctification.
Eucharistie signifie d’abord : action de grâce.
1361 L’Eucharistie est aussi le sacrifice de
louange, par lequel l’Église chante la gloire de Dieu au nom de toute
la création. Ce sacrifice de louange n’est possible qu’à travers
le Christ : Il unit les fidèles à sa personne, à sa louange et
à son intercession, en sorte que le sacrifice de louange au Père est
offert par le Christ et avec lui pour être accepté en
lui.
Le mémorial sacrificiel du Christ et de son Corps,
l’Église
1362 L’Eucharistie est le mémorial de la Pâque
du Christ, l’actualisation et l’offrande sacramentelle de son unique
sacrifice, dans la liturgie de l’Église qui est son Corps. Dans
toutes les prières eucharistiques nous trouvons, après les paroles de
l’institution, une prière appelée anamnèse ou mémorial.
1363 Dans le sens de l’Écriture Sainte le mémorial
n’est pas seulement le souvenir des événements du passé, mais la
proclamation des merveilles que Dieu a accomplies pour les hommes (cf.
Ex 13, 3). Dans la célébration liturgique de ces événements, ils
deviennent d’une certaine façon présents et actuels. C’est de
cette manière qu’Israël comprend sa libération d’Égypte :
chaque fois qu’est célébrée la pâque, les événements de
l’Exode sont rendus présents à la mémoire des croyants afin
qu’ils y conforment leur vie.
1364 Le mémorial reçoit un sens nouveau dans le
Nouveau Testament. Quand l’Église célèbre l’Eucharistie, elle
fait mémoire de la Pâque du Christ, et celle-ci devient présente :
le sacrifice que le Christ a offert une fois pour toutes sur la Croix
demeure toujours actuel (cf. He 7, 25-27) : " Toutes les
fois que le sacrifice de la croix par lequel le Christ notre pâque a été
immolé se célèbre sur l’autel, l’œuvre de notre rédemption
s’opère " (LG 3).
1365 Parce qu’elle est mémorial de la Pâque
du Christ, l’Eucharistie est aussi un sacrifice. Le caractère
sacrificiel de l’Eucharistie est manifesté dans les paroles mêmes de
l’institution : " Ceci est mon Corps qui va être donné
pour vous " et " Cette coupe est la nouvelle
Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous " (Lc 22,
19-20). Dans l’Eucharistie le Christ donne ce corps même qu’il a
livré pour nous sur la croix, le sang même qu’il a " répandu
pour une multitude en rémission des péchés " (Mt 26, 28).
1366 L’Eucharistie est
donc un sacrifice parce qu’elle représente (rend présent) le
sacrifice de la croix, parce qu’elle en est le mémorial et
parce qu’elle en applique le fruit :
[Le Christ] notre Dieu et Seigneur, s’offrit
lui-même à Dieu le Père une fois pour toutes, mourant en
intercesseur sur l’autel de la Croix, afin de réaliser pour eux
(les hommes) une rédemption éternelle. Cependant, comme sa mort ne
devait pas mettre fin à son sacerdoce (He 7, 24. 27), à la dernière
Cène, " la nuit où il fut livré " (1 Co 11,
13), il voulait laisser à l’Église, son épouse bien-aimée, un
sacrifice visible (comme le réclame la nature humaine), où serait
représenté le sacrifice sanglant qui allait s’accomplir une
unique fois sur la croix, dont la mémoire se perpétuerait jusqu’à
la fin des siècles (1 Co 11, 23) et dont la vertu salutaire
s’appliquerait à la rédemption des péchés que nous commettons
chaque jour (Cc. Trente : DS 1740).
1367 Le sacrifice du Christ et le sacrifice de
l’Eucharistie sont un unique sacrifice : " C’est
une seule et même victime, c’est le même qui offre maintenant par le
ministère des prêtres, qui s’est offert lui-même alors sur la
Croix. Seule la manière d’offrir diffère " (Cc. Trente,
sess. 22a, Doctrina de ss. Missae sacrificio, c. 2 : DS
1743). " Et puisque dans ce divin sacrifice qui s’accomplit
à la messe, ce même Christ, qui s’est offert lui-même une fois de
manière sanglante sur l’autel de la Croix, est contenu et immolé de
manière non sanglante, ce sacrifice est vraiment propitiatoire "
(ibid.).
1368 L’Eucharistie est également le sacrifice
de l’Église. L’Église, qui est le Corps du Christ, participe
à l’offrande de son Chef. Avec Lui, elle est offerte elle-même tout
entière. Elle s’unit à son intercession auprès du Père pour tous
les hommes. Dans l’Eucharistie, le sacrifice du Christ devient aussi
le sacrifice des membres de son Corps. La vie des fidèles, leur
louange, leur souffrance, leur prière, leur travail, sont unis à ceux
du Christ et à sa totale offrande, et acquièrent ainsi une valeur
nouvelle. Le sacrifice du Christ présent sur l’autel donne à toutes
les générations de chrétiens la possibilité d’être unis à son
offrande.
Dans les catacombes, l’Église est
souvent représentée comme une femme en prière, les bras largement
ouverts en attitude d’orante. Comme le Christ qui a étendu les bras
sur la croix, par lui, avec lui et en lui, elle s’offre et intercède
pour tous les hommes.
1369 Toute l’Église est unie à l’offrande et à
l’intercession du Christ. Chargé du ministère de Pierre dans
l’Église, le Pape est associé à toute célébration de
l’Eucharistie où il est nommé comme signe et serviteur de l’unité
de l’Église Universelle. L’évêque du lieu est toujours
responsable de l’eucharistie, même lorsqu’elle est présidée par
un prêtre ; son nom y est prononcé pour signifier sa présidence
de l’Église particulière, au milieu du presbyterium et avec
l’assistance des diacres. La communauté intercède aussi pour
tous les ministres qui, pour elle et avec elle, offrent le sacrifice
eucharistique :
Que cette eucharistie seule soit regardée comme
légitime, qui se fait sous la présidence de l’évêque ou de
celui qu’il en a chargé (S. Ignace d’Antioche, Smyrn. 8, 1).
C’est par le ministère des prêtres que se
consomme le sacrifice spirituel des chrétiens, en union avec le
sacrifice du Christ, unique Médiateur, offert au nom de toute l’Église
dans l’Eucharistie par les mains des prêtres, de manière non
sanglante et sacramentelle, jusqu’à ce que vienne le Seigneur
lui-même (PO 2).
1370 A l’offrande du Christ s’unissent non
seulement les membres qui sont encore ici-bas, mais aussi ceux qui sont
déjà dans la gloire du ciel : C’est en communion avec la
très Sainte Vierge Marie et en faisant mémoire d’elle, ainsi que de
tous les saints et toutes les saintes, que l’Église offre le
sacrifice eucharistique. Dans l’Eucharistie l’Église, avec Marie,
est comme au pied de la Croix, unie à l’offrande et à
l’intercession du Christ.
1371 Le sacrifice eucharistique est aussi offert pour
les fidèles défunts " qui sont morts dans le Christ et
ne sont pas encore pleinement purifiés " (Cc. Trente :
DS 1743), pour qu’ils puissent entrer dans la lumière et la paix du
Christ :
Enterrez ce corps n’importe où ! Ne vous
troublez pas pour lui d’aucun souci ! Tout ce que je vous
demande, c’est de vous souvenir de moi à l’autel du Seigneur où
que vous soyez " (S. Monique, avant sa mort, à S.
Augustin et son frère ; conf. 9, 11, 27).
Ensuite, nous prions [dans l’anaphore] pour les
saints pères et évêques endormis, et en général pour tous ceux
qui se sont endormis avant nous, en croyant qu’il y aura très
grand profit pour les âmes, en faveur desquelles la supplication
est offerte, tandis que se trouve présente la sainte et si
redoutable victime... En présentant à Dieu nos supplications pour
ceux qui se sont endormis, fussent-ils pécheurs, nous ... présentons
le Christ immolé pour nos péchés, rendant propice, pour eux et
pour nous, le Dieu ami des hommes (S. Cyrille de Jérusalem, catech.
myst. 5, 9. 10 : PG 33, 1116B-1117A).
1372 S. Augustin a admirablement résumé cette
doctrine qui nous incite à une participation de plus en plus complète
au sacrifice de notre Rédempteur que nous célébrons dans
l’Eucharistie :
Cette cité rachetée tout entière, c’est-à-dire
l’assemblée et la société des saints, est offerte à Dieu comme
un sacrifice universel par le Grand Prêtre qui, sous la forme
d’esclave, est allé jusqu’à s’offrir pour nous dans sa
passion, pour faire de nous le corps d’un si grand Chef ... Tel
est le sacrifice des chrétiens : " à plusieurs,
n’être qu’un seul corps dans le Christ " (Rm 12, 5).
Et ce sacrifice, l’Église ne cesse de le reproduire dans le
Sacrement de l’autel bien connu des fidèles, où il lui est montré
que dans ce qu’elle offre, elle est elle-même offerte (S.
Augustin, civ. 10, 6).
La présence du Christ par la puissance de sa Parole
et de l’Esprit Saint
1373 " Le Christ Jésus qui est mort,
qui est ressuscité, qui est à la droite de Dieu, qui intercède pour
nous " (Rm 8, 34), est présent de multiples manières à son
Église (cf. LG 48) : dans sa Parole, dans la prière de son Église,
" là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom "
(Mt 18, 20), dans les pauvres, les malades, les prisonniers (Mt 25,
31-46), dans ses sacrements dont il est l’auteur, dans le sacrifice de
la messe et en la personne du ministre. Mais " au plus haut
point (il est présent) sous les espèces eucharistiques "
(SC 7).
1374 Le mode de présence du Christ sous les espèces
eucharistiques est unique. Il élève l’Eucharistie au-dessus de tous
les sacrements et en fait " comme la perfection de la vie
spirituelle et la fin à laquelle tendent tous les sacrements "
(S. Thomas d’A., s. th. 3, 73, 3). Dans le très saint sacrement de
l’Eucharistie sont " contenus vraiment, réellement
et substantiellement le Corps et le Sang conjointement avec l’âme
et la divinité de notre Seigneur Jésus-Christ, et, par conséquent, le
Christ tout entier " (Cc Trente : DS 1651). " Cette
présence, on la nomme ‘réelle’, non à titre exclusif, comme si
les autres présences n’étaient pas ‘réelles’, mais par
excellence parce qu’elle est substantielle, et que par elle le
Christ, Dieu et homme, se rend présent tout entier " (MF 39).
1375 C’est par la conversion du pain et
du vin au le Corps et au Sang du Christ que le Christ devient présent
en ce sacrement. Les Pères de l’Église ont fermement affirmé la foi
de l’Église en l’efficacité de la Parole du Christ et de
l’action de l’Esprit Saint pour opérer cette conversion. Ainsi, S.
Jean Chrysostome déclare :
Ce n’est pas l’homme qui fait que les choses
offertes deviennent Corps et Sang du Christ, mais le Christ lui-même
qui a été crucifié pour nous. Le prêtre, figure du Christ,
prononce ces paroles, mais leur efficacité et la grâce sont de
Dieu. Ceci est mon Corps, dit-il. Cette parole transforme les
choses offertes (prod. Jud. 1, 6 : PG 49, 380C).
Et saint Ambroise dit au sujet de cette conversion :
Soyons bien persuadés que ceci n’est pas ce
que la nature a formé, mais ce que la bénédiction a consacré, et
que la force de la bénédiction l’emporte sur celle de la nature,
parce que par la bénédiction la nature elle-même se trouve changée
... La parole du Christ, qui a pu faire de rien ce qui n’existait
pas, ne pourrait donc changer les choses existantes en ce qu’elles
n’étaient pas encore ? Car ce n’est pas moins de donner
aux choses leur nature première que de la leur changer (myst. 9,
50. 52 : PL 16, 405-406).
1376 Le Concile de Trente résume la foi
catholique en déclarant : " Parce que le Christ, notre Rédempteur,
a dit que ce qu’il offrait sous l’espèce du pain était vraiment
son Corps, on a toujours eu dans l’Église cette conviction, que déclare
le saint Concile de nouveau : par la consécration du pain et du
vin s’opère le changement de toute la substance du pain en la
substance du Corps du Christ notre Seigneur et de toute la substance du
vin en la substance de son Sang ; ce changement, l’Église
catholique l’a justement et exactement appelé transsubstantiation "
(DS 1642).
1377 La présence eucharistique du Christ
commence au moment de la consécration et dure aussi longtemps que les
espèces eucharistiques subsistent. Le Christ est tout entier présent
dans chacune des espèces et tout entier dans chacune de leurs parties,
de sorte que la fraction du pain ne divise pas le Christ (cf. Cc. Trente :
DS 1641).
1378 Le culte de l’Eucharistie. Dans la
liturgie de la messe, nous exprimons notre foi en la présence réelle
du Christ sous les espèces du pain et du vin, entre autres, en fléchissant
les genoux, ou en nous inclinant profondément en signe d’adoration du
Seigneur. " L’Église catholique a rendu et continue de
rendre ce culte d’adoration qui est dû au sacrement de
l’Eucharistie non seulement durant la messe, mais aussi en dehors de
sa célébration : en conservant avec le plus grand soin les
hosties consacrées, en les présentant aux fidèles pour qu’ils les vénèrent
avec solennité, en les portant en procession " (MF 56).
1379 La sainte réserve (tabernacle) était
d’abord destinée à garder dignement l’Eucharistie pour qu’elle
puisse être portée aux malades et aux absents en dehors de la messe.
Par l’approfondissement de la foi en la présence réelle du Christ
dans son Eucharistie, l’Église a pris conscience du sens de
l’adoration silencieuse du Seigneur présent sous les espèces
eucharistiques. C’est pour cela que le tabernacle doit être placé à
un endroit particulièrement digne de l’église ; il doit être
construit de telle façon qu’il souligne et manifeste la vérité de
la présence réelle du Christ dans le saint sacrement.
1380 Il est hautement convenable que le Christ
ait voulu rester présent à son Église de cette façon unique. Puisque
le Christ allait quitter les siens sous sa forme visible, il voulait
nous donner sa présence sacramentelle ; puisqu’il allait
s’offrir sur la Croix pour nous sauver, il voulait que nous ayons le mémorial
de l’amour dont il nous a aimés " jusqu’à la fin "
(Jn 13, 1), jusqu’au don de sa vie. En effet, dans sa présence
eucharistique il reste mystérieusement au milieu de nous comme celui
qui nous a aimés et qui s’est livré pour nous (cf. Ga 2, 20), et il
le reste sous les signes qui expriment et communiquent cet amour :
L’Église et le monde ont un grand besoin du
culte eucharistique. Jésus nous attend dans ce sacrement de
l’amour. Ne refusons pas le temps pour aller Le rencontrer dans
l’adoration, dans la contemplation pleine de foi et ouverte à réparer
les fautes graves et les délits du monde. Que ne cesse jamais notre
adoration (Jean Paul II, l. " Dominicæ cenæ "
3).
1381 " La présence du véritable Corps
du Christ et du véritable Sang du Christ dans ce sacrement, ‘on ne
l’apprend point par les sens, dit S. Thomas, mais par la foi seule,
laquelle s’appuie sur l’autorité de Dieu’. C’est pourquoi,
commentant le texte de S. Luc, 22, 19 : ‘Ceci est mon Corps qui
sera livré pour vous’, saint Cyrille d’Alexandrie (Lc. 22, 19 :
PG 72, 921B) déclare : ‘Ne va pas te demander si c’est vrai,
mais accueille plutôt avec foi les paroles du Seigneur, parce que lui,
qui est la Vérité, ne ment pas’ " (Thomas d’A., s. th.
3, 75, 1 cité par Paul VI, MF 18) :
Adoro te devote, latens Deitas,
Quæ sub his figuris vere latitas :
Tibi se cor meum totum subjicit,
Quia te contemplans totum deficit.
|
|
Je T’adore profondément, divinité cachée,
vraiment présente sous ces apparences ;
à Toi mon cœur se soumet tout entier
parce qu’à Te contempler, tout entier il défaille
|
Visus, gustus, tactus in te fallitur,
Sed auditu solo tuto creditur :
Credo quidquid dixit Dei Filius :
Nil hoc Veritatis verbo verius.
|
|
La vue, le goût, le toucher ne
T’atteignent pas :
à ce qu’on entend dire seulement il faut
se fier ;
je crois tout ce qu’a dit le Fils de Dieu ;
rien de plus vrai que cette parole de la Vérité.
|
VI. Le banquet pascal
1382 La messe est à la fois et inséparablement
le mémorial sacrificiel dans lequel se perpétue le sacrifice de la
croix, et le banquet sacré de la communion au Corps et au Sang du
Seigneur. Mais la célébration du sacrifice eucharistique est toute
orientée vers l’union intime des fidèles au Christ par la communion.
Communier, c’est recevoir le Christ lui-même qui s’est offert pour
nous.
1383 L’autel, autour duquel l’Église
est rassemblée dans la célébration de l’Eucharistie, représente
les deux aspects d’un même mystère : l’autel du sacrifice et
la table du Seigneur, et ceci d’autant plus que l’autel chrétien
est le symbole du Christ lui-même, présent au milieu de l’assemblée
de ses fidèles, à la fois comme la victime offerte pour notre réconciliation
et comme aliment céleste qui se donne à nous. " Qu’est-ce
en effet l’autel du Christ sinon l’image du Corps du Christ ? "
– dit S. Ambroise (sacr. 5, 7 : PL 16, 447C), et ailleurs :
" L’autel représente le Corps [du Christ], et le Corps du
Christ est sur l’autel " (sacr. 4, 7 : PL 16, 437D). La
liturgie exprime cette unité du sacrifice et de la communion dans de
nombreuses prières. Ainsi, l’Église de Rome prie dans son anaphore :
|
Supplices te rogamus, omnipotens Deus,
jube hæc perferri per manus sancti Angeli tui in sublime
altare tuum, in conspectu divinæ majestatis : ut
quotquot ex hac altaris participatione sacrosanctum Filii
tui Corpus et Sanguinem sumpserimus, omni benedictione cælesti
et gratia repleamur.
|
|
Nous T’en supplions, Dieu Tout-Puissant :
que [cette offrande] soit portée par ton ange en présence de
ta gloire, sur ton autel céleste, afin qu’en recevant ici,
par notre communion à cet autel, le corps et le sang de ton
Fils, nous soyons comblés de ta grâce et de tes bénédictions.
|
" Prenez et mangez en tous " :
la communion
1384 Le Seigneur nous adresse une invitation
pressante à le recevoir dans le sacrement de l’Eucharistie :
" En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez
la Chair du Fils de l’homme et ne buvez son Sang, vous n’aurez pas
la vie en vous " (Jn 6, 53).
1385 Pour répondre à cette invitation, nous
devons nous préparer à ce moment si grand et si saint. S. Paul
exhorte à un examen de conscience : " Quiconque mange ce
pain ou boit cette coupe du Seigneur indignement aura à répondre du
Corps et du Sang du Seigneur. Que chacun donc s’éprouve soi-même et
qu’il mange alors de ce pain et boive de cette coupe ; car celui
qui mange et boit, mange et boit sa propre condamnation, s’il n’y
discerne le Corps " (1 Co 11, 27-29). Celui qui est conscient
d’un péché grave doit recevoir le sacrement de la Réconciliation
avant d’accéder à la communion.
1386 Devant la grandeur de ce sacrement, le fidèle
ne peut que reprendre humblement et avec une foi ardente la parole du
Centurion (cf. Mt 8, 8) : " Domine, non sum dignus, ut
intres sub tectum meum, sed tantum dic verbum, et sanabitur anima mea "
(" Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis
seulement une parole et je serai guéri "). Et dans la Divine
Liturgie de S. Jean Chrysostome, les fidèles prient dans le même
esprit :
A ta cène mystique fais-moi communier
aujourd’hui, ô Fils de Dieu. Car je ne dirai pas le Secret à tes
ennemis, ni ne te donnerai le baiser de Judas. Mais, comme le
larron, je te crie : Souviens-toi de moi, Seigneur, dans ton
royaume.
1387 Pour se préparer convenablement à
recevoir ce sacrement, les fidèles observeront le jeûne prescrit
dans leur Église (cf. CIC, can. 919). L’attitude corporelle
(gestes, vêtement) traduira le respect, la solennité, la joie de ce
moment où le Christ devient notre hôte.
1388 Il est conforme au sens même de
l’Eucharistie que les fidèles, s’ils ont les dispositions requises
(cf. CIC 916), communient quand ils participent à la messe (Dans
la même journée, les fidèles peuvent recevoir la très Sainte
Communion deux fois, et seulement deux fois [cf. Pontificia Commissio
Codicis Iuris Canonici authentice interpretando, Responsa ad proposita
dubia, 1 : AAS 76 (1984), p. 746]) : " Il est
vivement recommandé aux fidèles de participer à la Messe de façon
plus parfaite en recevant aussi, après la communion du prêtre, le
corps du Seigneur du même sacrifice " (SC 55).
1389 L’Église fait obligation aux fidèles de
participer les dimanches et les jours de fête à la divine liturgie
(cf. OE 15) et de recevoir au moins une fois par an l’Eucharistie, si
possible au temps pascal (cf. CIC, can. 920), préparés par le
sacrement de la Réconciliation. Mais l’Église recommande vivement
aux fidèles de recevoir la sainte Eucharistie les dimanches et les
jours de fête, ou plus souvent encore, même tous les jours.
1390 Grâce à la présence sacramentelle du
Christ sous chacune des espèces, la communion à la seule espèce du
pain permet de recevoir tout le fruit de grâce de l’Eucharistie. Pour
des raisons pastorales, cette manière de communier s’est légitimement
établie comme la plus habituelle dans le rite latin. " La
sainte communion réalise plus pleinement sa forme de signe
lorsqu’elle se fait sous les deux espèces. Car, sous cette forme, le
signe du banquet eucharistique est mis plus pleinement en lumière "
(IGMR 240). C’est la forme habituelle de communier dans les rites
orientaux.
Les fruits de la communion
1391 La communion accroît notre union au Christ.
Recevoir l’Eucharistie dans la communion porte comme fruit principal
l’union intime au Christ Jésus. Le Seigneur dit en effet :
" Qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en
lui " (Jn 6, 56). La vie en Christ trouve son fondement dans
le banquet eucharistique : " De même qu’envoyé par le
Père, qui est vivant, moi, je vis par le Père, de même, celui qui me
mange, vivra, lui aussi, par moi " (Jn 6, 57) :
Lorsque dans les fêtes du Seigneur les fidèles
reçoivent le Corps du Fils, ils proclament les uns aux autres la
Bonne Nouvelle que les arrhes de la vie sont donnés, comme lorsque
l’ange dit à Marie de Magdala : " Le Christ est
ressuscité ! " Voici que maintenant aussi la vie et
la résurrection sont conférées à celui qui reçoit le Christ
(Fanqîth, Office syriaque d’Antioche, volume 1, Commun, 237a-b).
1392 Ce que l’aliment matériel produit dans
notre vie corporelle, la communion le réalise de façon admirable dans
notre vie spirituelle. La communion à la Chair du Christ ressuscité,
" vivifiée par l’Esprit Saint et vivifiante " (PO
5), conserve, accroît et renouvelle la vie de grâce reçue au Baptême.
Cette croissance de la vie chrétienne a besoin d’être nourrie par la
communion eucharistique, pain de notre pèlerinage, jusqu’au moment de
la mort, où il nous sera donné comme viatique.
1393 La communion nous sépare du péché. Le
Corps du Christ que nous recevons dans la communion est " livré
pour nous ", et le Sang que nous buvons, est " versé
pour la multitude en rémission des péchés ". C’est
pourquoi l’Eucharistie ne peut pas nous unir au Christ sans nous
purifier en même temps des péchés commis et nous préserver des péchés
futurs :
" Chaque fois que nous le recevons,
nous annonçons la mort du Seigneur " (1 Co 11, 26). Si
nous annonçons la mort du Seigneur, nous annonçons la rémission
des péchés. Si, chaque fois que son Sang est répandu, il est répandu
pour la rémission des péchés, je dois toujours le recevoir, pour
que toujours il remette mes péchés. Moi qui pèche toujours, je
dois avoir toujours un remède (S. Ambroise, sacr. 4, 28 : PL
16, 446A).
1394 Comme la nourriture corporelle sert à
restaurer la perte des forces, l’Eucharistie fortifie la charité qui,
dans la vie quotidienne, tend à s’affaiblir ; et cette charité
vivifiée efface les péchés véniels (cf. Cc. Trente : DS
1638). En se donnant à nous, le Christ ravive notre amour et nous rend
capables de rompre les attachements désordonnés aux créatures et de
nous enraciner en Lui :
Puisque le Christ est mort pour nous par amour,
lorsque nous faisons mémoire de sa mort au moment du sacrifice,
nous demandons que l’amour nous soit accordé par la venue du
Saint-Esprit ; nous prions humblement qu’en vertu de cet
amour, par lequel le Christ a voulu mourir pour nous, nous aussi, en
recevant la grâce du Saint-Esprit, nous puissions considérer le
monde comme crucifié pour nous, et être nous-mêmes crucifiés
pour le monde... Ayant reçu le don de l’amour, mourons au péché
et vivons pour Dieu (S. Fulgence de Ruspe, Fab. 28, 16-19 : CCL
19A, 813-814 : LH, sem. 28, lundi, off. lect.).
1395 Par la même charité qu’elle allume en
nous, l’Eucharistie nous préserve des péchés mortels futurs.
Plus nous participons à la vie du Christ et plus nous progressons dans
son amitié, plus il nous est difficile de rompre avec Lui par le péché
mortel. L’Eucharistie n’est pas ordonnée au pardon des péchés
mortels. Ceci est propre au sacrement de la Réconciliation. Le propre
de l’Eucharistie est d’être le sacrement de ceux qui sont dans la
pleine communion de l’Église.
1396 L’unité du Corps mystique :
l’Eucharistie fait l’Église. Ceux qui reçoivent
l’Eucharistie sont unis plus étroitement au Christ. Par là même, le
Christ les unit à tous les fidèles en un seul corps : l’Église.
La communion renouvelle, fortifie, approfondit cette incorporation à
l’Église déjà réalisée par le Baptême. Dans le Baptême nous
avons été appelés à ne faire qu’un seul corps (cf. 1 Co 12, 13).
L’Eucharistie réalise cet appel : " La coupe de bénédiction
que nous bénissons n’est-elle pas communion au Sang du Christ ?
Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au Corps du Christ ?
Puisqu’il n’y a qu’un pain, à nous tous nous ne formons qu’un
corps, car tous nous avons part à ce pain unique " (1 Co 10,
16-17) :
Si vous êtes le corps du Christ et ses membres,
c’est votre sacrement qui est placé sur la table du Seigneur,
vous recevez votre sacrement. Vous répondez " Amen "
(" oui, c’est vrai ! ") à ce que vous
recevez, et vous y souscrivez en répondant. Tu entends ce mot :
" le Corps du Christ " et tu réponds :
" Amen ". Sois donc un membre du Christ pour que
soit vrai ton Amen (S. Augustin, serm. 272 : PL 38, 1247).
1397 L’Eucharistie engage envers les pauvres :
Pour recevoir dans la vérité le Corps et le Sang du Christ livrés
pour nous, nous devons reconnaître le Christ dans les plus pauvres, Ses
frères (cf. Mt 25, 40) :
Tu as goûté au sang du Seigneur et tu ne
reconnais pas même ton frère. Tu déshonores cette table même, en
ne jugeant pas digne de partager ta nourriture celui qui a été jugé
digne de prendre part à cette table. Dieu t’a libéré de tous
tes péchés et t’y a invité. Et toi, pas même alors, tu n’es
devenu plus miséricordieux (S. Jean Chrysostome, hom. in 1 Cor. 27,
4 : PG 61, 229-230).
1398 L’Eucharistie et l’unité des chrétiens.
Devant la grandeur de ce mystère, S. Augustin s’écrie : " O
sacrement de la piété ! O signe de l’unité ! O lien de la
charité ! " (ev. Jo. 26, 6, 13 ; cf. SC 47).
D’autant plus douloureuses se font ressentir les divisions de l’Église
qui rompent la commune participation à la table du Seigneur, d’autant
plus pressantes sont les prières au Seigneur pour que reviennent les
jours de l’unité complète de tous ceux qui croient en Lui.
1399 Les Églises orientales qui ne sont pas en
pleine communion avec l’Église catholique célèbrent l’Eucharistie
avec un grand amour. " Ces Églises, bien que séparées, ont
de vrais sacrements, – principalement, en vertu de la succession
apostolique : le Sacerdoce et l’Eucharistie, – qui les unissent
intimement à nous " (UR 15). Une certaine communion in
sacris, donc dans l’Eucharistie, est " non seulement
possible, mais même recommandée, lors de circonstances favorables et
avec l’approbation de l’autorité ecclésiastique " (UR 15 ;
cf. CIC, can. 844, § 3).
1400 Les communautés ecclésiales issues de la Réforme,
séparées de l’Église catholique, " en raison surtout de
l’absence du sacrement de l’Ordre, n’ont pas conservé la
substance propre et intégrale du mystère eucharistique " (UR
22). C’est pour cette raison que, pour l’Église catholique,
l’intercommunion eucharistique avec ces communautés n’est pas
possible. Cependant, ces communautés ecclésiales, " lorsqu’elles
font mémoire dans la sainte Cène de la mort et de la résurrection du
Seigneur, professent que la vie consiste dans la communion au Christ et
attendent son retour glorieux " (UR 22).
1401 Lorsqu’une nécessité grave se fait
pressente, selon le jugement de l’ordinaire, les ministres catholiques
peuvent donner les sacrements (Eucharistie, pénitence, onction des
malades) aux autres chrétiens qui ne sont pas en pleine communion avec
l’Église catholique, mais qui les demandent de leur plein gré :
il faut alors qu’ils manifestent la foi catholique concernant ces
sacrements et qu’ils se trouvent dans les dispositions requises (cf.
CIC, can. 844, § 4).
VII. L’eucharistie – " pignus
futurae gloriae "
1402 Dans une antique prière, l’Église
acclame le mystère de l’Eucharistie : " O sacrum
convivium in quo Christus sumitur. Recolitur memoria passionis eius ;
mens impletur gratia et futuræ gloriæ nobis pignus datur "
(O banquet sacré où le Christ est notre aliment, où est ravivé le
souvenir de sa passion, où la grâce emplit notre âme, où nous est
donné le gage de la vie à venir). Si l’Eucharistie est le mémorial
de la Pâque du Seigneur, si par notre communion à l’autel, nous
sommes comblés " de toute bénédiction céleste et grâce "
(MR, Canon Romain 96 : " Supplices te rogamus "),
l’Eucharistie est aussi l’anticipation de la gloire céleste.
1403 Lors de la dernière cène, le Seigneur a
lui-même tourné le regard de ses disciples vers l’accomplissement de
la Pâque dans le royaume de Dieu : " Je vous le dis, je
ne boirai plus désormais de ce produit de la vigne jusqu’au jour où
je boirai avec vous le vin nouveau dans le Royaume de mon Père "
(Mt 26, 29 ; cf. Lc 22, 18 ; Mc 14, 25). Chaque fois que l’Église
célèbre l’Eucharistie, elle se souvient de cette promesse et son
regard se tourne vers " Celui qui vient " (Ap 1, 4).
Dans sa prière, elle appelle sa venue : " Marana tha "
(1 Co 16, 22), " Viens, Seigneur Jésus " (Ap 22,
20), " Que ta grâce vienne et que ce monde passe ! "
(Didaché 10, 6).
1404 L’Église sait que, dès maintenant, le
Seigneur vient dans son Eucharistie, et qu’il est là, au milieu de
nous. Cependant, cette présence est voilée. C’est pour cela que nous
célébrons l’Eucharistie " expectantes beatam spem et
adventum Salvatoris nostri Jesu Christi " (en attendant la
bienheureuse espérance et l’avénement de notre Sauveur Jésus-Christ
– Embolisme après le Notre Père ; cf. Tt 2, 13), en demandant
" d’être comblés de ta gloire, dans ton Royaume, tous
ensemble et pour l’éternité, quand Tu essuieras toute larme de nos
yeux ; en Te voyant, Toi notre Dieu, tel que Tu es, nous Te serons
semblables éternellement, et sans fin nous chanterons ta louange, par
le Christ, notre Seigneur " (MR, prière eucharistique III,
116 : prière pour les défunts).
1405 De cette grande espérance, celle des cieux
nouveaux et de la terre nouvelle en lesquels habitera la justice (cf. 2
P 3, 13), nous n’avons pas de gage plus sûr, de signe plus manifeste
que l’Eucharistie. En effet, chaque fois qu’est célébré ce mystère,
" l’œuvre de notre rédemption s’opère " (LG
3) et nous " rompons un même pain qui est remède
d’immortalité, antidote pour ne pas mourir, mais pour vivre en Jésus-Christ
pour toujours " (S. Ignace d’Antioche, Eph. 20, 2).
En bref
1406 Jésus dit : " Je suis le pain
vivant, descendu du ciel. Qui mangera ce pain vivra à jamais... Qui
mange ma Chair et boit mon Sang a la vie éternelle ... il demeure en
moi et moi en lui " (Jn 6, 51. 54. 56).
1407 L’eucharistie est le cœur et le sommet de
la vie de l’Église car en elle le Christ associe son Église et
tous ses membres à son sacrifice de louange et d’action de grâces
offert une fois pour toutes sur la Croix à son Père ; par ce
sacrifice il répand les grâces du salut sur son Corps, qui est l’Église.
1408 La célébration eucharistique comporte
toujours : la proclamation de la Parole de Dieu, l’action de grâce
à Dieu le Père pour tous ses bienfaits, surtout pour le don de son
Fils, la consécration du pain et du vin et la participation au
banquet liturgique par la réception du Corps et du Sang du Seigneur.
Ces éléments constituent un seul et même acte de culte.
1409 L’Eucharistie est le mémorial de la Pâque
du Christ : c’est-à-dire de l’œuvre du salut accomplie par
la vie, la mort et la résurrection du Christ, œuvre rendue présente
par l’action liturgique.
1410 C’est le Christ lui-même, grand prêtre éternel
de la nouvelle Alliance, qui, agissant par le ministère des prêtres,
offre le sacrifice eucharistique. Et c’est encore le même Christ, réellement
présent sous les espèces du pain et du vin, qui est l’offrande du
sacrifice eucharistique.
1411 Seuls les prêtres validement ordonnés
peuvent présider l’Eucharistie et consacrer le pain et le vin pour
qu’ils deviennent le Corps et le Sang du Seigneur.
1412 Les signes essentiels du sacrement
eucharistique sont le pain de blé et le vin du vignoble, sur lesquels
est invoquée la bénédiction de l’Esprit Saint et le prêtre
prononce les paroles de la consécration dites par Jésus pendant la
dernière cène : " Ceci est mon corps livré pour vous
... Ceci est la coupe de mon sang ... "
1413 Par la consécration s’opère la
transsubstantiation du pain et du vin dans le Corps et le Sang du
Christ. Sous les espèces consacrées du pain et du vin, le Christ
lui-même, vivant et glorieux, est présent de manière vraie, réelle
et substantielle, son Corps et son Sang, avec son âme et sa divinité
(cf. Cc. Trente : DS 1640 ; 1651).
1414 En tant que sacrifice, l’Eucharistie est
aussi offerte en réparation des péchés des vivants et des défunts,
et pour obtenir de Dieu des bienfaits spirituels ou temporels.
1415 Celui qui veut recevoir le Christ dans la
Communion eucharistique doit se trouver en état de grâce. Si
quelqu’un a conscience d’avoir péché mortellement, il ne doit
pas accéder à l’Eucharistie sans avoir reçu préalablement
l’absolution dans le sacrement de Pénitence.
1416 La sainte Communion au Corps et au Sang du
Christ accroît l’union du communiant avec le Seigneur, lui remet
les péchés véniels et le préserve des péchés graves. Puisque les
liens de charité entre le communiant et le Christ sont renforcés, la
réception de ce sacrement renforce l’unité de l’Église, Corps
mystique du Christ.
1417 L’Église recommande vivement aux fidèles
de recevoir la sainte communion quand ils participent à la célébration
de l’Eucharistie ; elle leur en fait obligation au moins une
fois par an.
1418 Puisque le Christ lui-même est présent dans
le Sacrement de l’Autel, il faut l’honorer d’un culte
d’adoration. " La visite au Très Saint Sacrement est une
preuve de gratitude, un signe d’amour et un devoir d’adoration
envers le Christ, notre Seigneur " (MF).
1419 Le Christ ayant passé de ce monde au Père,
nous donne dans l’Eucharistie le gage de la gloire auprès de Lui :
la participation au Saint Sacrifice nous identifie avec son Cœur,
soutient nos forces au long du pèlerinage de cette vie, nous fait
souhaiter la Vie éternelle et nous unit déjà à l’Église du
Ciel, à la Sainte Vierge Marie et à tous les Saints.
CHAPITRE DEUXIÈME
LES SACREMENTS DE GUÉRISON
1420 Par les sacrements de l’initiation chrétienne,
l’homme reçoit la vie nouvelle du Christ. Or, cette vie, nous la
portons " en des vases d’argile " (2 Co 4, 7).
Maintenant, elle est encore " cachée avec le Christ en Dieu "
(Col 3, 3). Nous sommes encore dans " notre demeure terrestre "
(2 Co 5, 1) soumise à la souffrance, à la maladie et à la mort. Cette
vie nouvelle d’enfant de Dieu peut être affaiblie et même perdue par
le péché.
1421 Le Seigneur Jésus-Christ, médecin de nos
âmes et de nos corps, Lui qui a remis les péchés au paralytique et
lui a rendu la santé du corps (cf. Mc 2, 1-12), a voulu que son Église
continue, dans la force de l’Esprit Saint, son œuvre de guérison et
de salut, même auprès de ses propres membres. C’est le but des deux
sacrements de guérison : du sacrement de Pénitence et de
l’Onction des malades.
ARTICLE 4
LE SACREMENT DE PÉNITENCE ET DE RÉCONCILIATION
1422 " Ceux qui s’approchent du
sacrement de Pénitence y reçoivent de la miséricorde de Dieu le
pardon de l’offense qu’ils lui ont faite et du même coup sont réconciliés
avec l’Église que leur péché a blessée et qui, par la charité,
l’exemple, les prières, travaille à leur conversion " (LG
11).
I. Comment est appelé ce sacrement ?
1423 Il est appelé sacrement de conversion
puisqu’il réalise sacramentellement l’appel de Jésus à la
conversion (cf. Mc 1, 15), la démarche de revenir au Père (cf. Lc 15,
18) dont on s’est éloigné par le péché.
Il est appelé sacrement de Pénitence
puisqu’il consacre une démarche personnelle et ecclésiale de
conversion, de repentir et de satisfaction du chrétien pécheur.
1424 Il est appelé sacrement de la confession
puisque l’aveu, la confession des péchés devant le prêtre est un élément
essentiel de ce sacrement. Dans un sens profond ce sacrement est aussi
une " confession ", reconnaissance et louange de la
sainteté de Dieu et de sa miséricorde envers l’homme pécheur.
Il est appelé sacrement du pardon puisque par
l’absolution sacramentelle du prêtre, Dieu accorde au pénitent
" le pardon et la paix " (OP formule de
l’absolution).
Il est appelé sacrement de Réconciliation car
il donne au pécheur l’amour de Dieu qui réconcilie : " Laissez-vous
réconcilier avec Dieu " (2 Co 5, 20). Celui qui vit de
l’amour miséricordieux de Dieu est prêt à répondre à l’appel du
Seigneur : " Va d’abord te réconcilier avec ton frère "
(Mt 5, 24).
II. Pourquoi un sacrement de la réconciliation
après le Baptême ?
1425 " Vous avez été lavés, vous
avez été sanctifiés, vous avez été justifiés au nom du Seigneur Jésus
Christ et par l’Esprit de notre Dieu " (1 Co 6,11). Il faut
se rendre compte de la grandeur du don de Dieu qui nous est fait dans
les sacrements de l’initiation chrétienne pour saisir à quel point
le péché est une chose exclue pour celui qui a " revêtu le
Christ " (Ga 3, 27). Mais l’apôtre saint Jean dit aussi :
" Si nous disons que nous sommes sans péché, nous nous
abusons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous " (1
Jn 1,8). Et le Seigneur lui-même nous a enseigné de prier :
" Pardonne-nous nos offenses " (Lc 11,4) en liant le
pardon mutuel de nos offenses au pardon que Dieu accordera à nos péchés.
1426 La conversion au Christ, la nouvelle
naissance du Baptême, le don de l’Esprit Saint, le Corps et le Sang
du Christ reçus en nourriture, nous ont rendu " saints et
immaculés devant lui " (Ep 1, 4), comme l’Église elle-même,
épouse du Christ, est " sainte et immaculée devant lui "
(Ep 5, 27). Cependant, la vie nouvelle reçue dans l’initiation chrétienne
n’a pas supprimé la fragilité et la faiblesse de la nature humaine,
ni l’inclination au péché que la tradition appelle la concupiscence,
qui demeure dans les baptisés pour qu’ils fassent leurs preuves dans
le combat de la vie chrétienne aidés par la grâce du Christ (cf. DS
1515). Ce combat est celui de la conversion en vue de la sainteté
et de la vie éternelle à laquelle le Seigneur ne cesse de nous appeler
(cf. DS 1545 ; LG 40).
III. La conversion des baptisés
1427 Jésus appelle à la conversion. Cet appel
est une partie essentielle de l’annonce du Royaume : " Les
temps sont accomplis et le Royaume de Dieu est tout proche ;
repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle " (Mc 1,15). Dans
la prédication de l’Église cet appel s’adresse d’abord à ceux
qui ne connaissent pas encore le Christ et son Évangile. Aussi, le Baptême
est-il le lieu principal de la conversion première et fondamentale.
C’est par la foi en la Bonne Nouvelle et par le Baptême (cf. Ac 2,
38) que l’on renonce au mal et qu’on acquiert le salut, c’est-à-dire
la rémission de tous les péchés et le don de la vie nouvelle.
1428 Or, l’appel du Christ à la conversion
continue à retentir dans la vie des chrétiens. Cette seconde
conversion est une tâche ininterrompue pour toute l’Église qui
" enferme des pécheurs dans son propre sein " et
qui " est donc à la fois sainte et appelée à se purifier,
et qui poursuit constamment son effort de pénitence et de
renouvellement " (LG 8). Cet effort de conversion n’est pas
seulement une œuvre humaine. Elle est le mouvement du " cœur
contrit " (Ps 51, 19) attiré et mû par la grâce (cf. Jn 6,
44 ; 12, 32) à répondre à l’amour miséricordieux de Dieu qui
nous a aimés le premier (cf. 1 Jn 4, 10).
1429 En témoigne la conversion de S. Pierre après
le triple reniement de son Maître. Le regard d’infinie miséricorde
de Jésus provoque les larmes du repentir (Lc 22, 61) et, après la résurrection
du Seigneur, la triple affirmation de son amour envers lui (cf. Jn 21,
15-17). La seconde conversion a aussi une dimension communautaire.
Cela apparaît dans l’appel du Seigneur à toute une Église :
" Repends-toi ! " (Ap 2, 5. 16).
S. Ambroise dit des deux conversions que, dans
l’Église, " il y a l’eau et les larmes : l’eau
du Baptême et les larmes de la Pénitence " (ep. 41, 12 :
PL 16, 1116B).
IV. La pénitence intérieure
1430 Comme déjà chez les prophètes, l’appel
de Jésus à la conversion et à la pénitence ne vise pas d’abord des
œuvres extérieures, " le sac et la cendre ", les
jeûnes et les mortifications, mais la conversion du cœur, la pénitence
intérieure. Sans elle, les œuvres de pénitence restent stériles
et mensongères ; par contre, la conversion intérieure pousse à
l’expression de cette attitude en des signes visibles, des gestes et
des œuvres de pénitence (cf. Jl 2, 12-13 ; Is 1, 16-17 ; Mt
6, 1-6. 16-18).
1431 La pénitence intérieure est une réorientation
radicale de toute la vie, un retour, une conversion vers Dieu de tout
notre cœur, une cessation du péché, une aversion du mal, avec une répugnance
envers les mauvaises actions que nous avons commises. En même temps,
elle comporte le désir et la résolution de changer de vie avec l’espérance
de la miséricorde divine et la confiance en l’aide de sa grâce.
Cette conversion du cœur est accompagnée d’une douleur et d’une
tristesse salutaires que les Pères ont appelées animi cruciatus
(affliction de l’esprit), compunctio cordis (repentir du cœur)
(cf. Cc. Trente : DS 1677-1678 ; 1705 ; Catech. R. 2, 5,
4).
1432 Le cœur de l’homme est lourd et endurci.
Il faut que Dieu donne à l’homme un cœur nouveau (cf. Ez 36, 26-27).
La conversion est d’abord une œuvre de la grâce de Dieu qui fait
revenir nos cœurs à lui : " Convertis-nous, Seigneur,
et nous serons convertis " (Lm 5, 21). Dieu nous donne la
force de commencer à nouveau. C’est en découvrant la grandeur de
l’amour de Dieu que notre cœur est ébranlé par l’horreur et le
poids du péché et qu’il commence à craindre d’offenser Dieu par
le péché et d’être séparé de lui. Le cœur humain se convertit en
regardant vers Celui que nos péchés ont transpercé (cf. Jn 19, 37 ;
Za 12, 10) :
Ayons les yeux fixés sur le sang du Christ et
comprenons combien il est précieux à son Père car, répandu pour
notre salut, il a ménagé au monde entier la grâce du repentir (S.
Clément de Rome, Cor. 7,4).
1433 Depuis Pâques, c’est l’Esprit Saint qui
" confond " le monde en matière de péché "
(Jn 16, 8-9), à savoir que le monde n’a pas cru en Celui que le Père
a envoyé. Mais ce même Esprit, qui dévoile le péché, est le
Consolateur (cf. Jn 15, 26) qui donne au cœur de l’homme la grâce du
repentir et de la conversion (cf. Ac 2, 36-38 ; cf. Jean-Paul II,
DeV 27-48).
V. Les multiples formes de la pénitence dans la vie
chrétienne
1434 La pénitence intérieure du chrétien peut
avoir des expressions très variées. L’Écriture et les Pères
insistent surtout sur trois formes : le jeûne, la prière,
l’aumône (cf. Tb 12, 8 ; Mt 6, 1-18), qui expriment la
conversion par rapport à soi-même, par rapport à Dieu et par rapport
aux autres. A côté de la purification radicale opérée par le Baptême
ou par le martyre, ils citent, comme moyen d’obtenir le pardon des péchés,
les efforts accomplis pour se réconcilier avec son prochain, les larmes
de pénitence, le souci du salut du prochain (cf. Jc 5, 20)
l’intercession des saints et la pratique de la charité " qui
couvre une multitude de péchés " (1 P 4, 8).
1435 La conversion se réalise dans la vie
quotidienne par des gestes de réconciliation, par le souci des pauvres,
l’exercice et la défense de la justice et du droit (cf. Am 5, 24 ;
Is 1, 17), par l’aveu des fautes aux frères, la correction
fraternelle, la révision de vie, l’examen de conscience, la direction
spirituelle, l’acceptation des souffrances, l’endurance de la persécution
à cause de la justice. Prendre sa croix, chaque jour, et suivre Jésus
est le chemin le plus sûr de la pénitence (cf. Lc 9, 23).
1436 Eucharistie et Pénitence. La conversion et
la pénitence quotidiennes trouvent leur source et leur nourriture dans
l’Eucharistie, car en elle est rendu présent le sacrifice du Christ
qui nous a réconciliés avec Dieu ; par elle sont nourris et
fortifiés ceux qui vivent de la vie du Christ ; " elle
est l’antidote qui nous libère de nos fautes quotidiennes et nous préserve
des péchés mortels " (Cc. Trente : DS 1638).
1437 La lecture de l’Écriture Sainte, la prière
de la Liturgie des Heures et du Notre Père, tout acte sincère de culte
ou de piété ravive en nous l’esprit de conversion et de pénitence
et contribue au pardon de nos péchés.
1438 Les temps et les jours de pénitence au
cours de l’année liturgique (le temps du carême, chaque vendredi en
mémoire de la mort du Seigneur) sont des moments forts de la pratique pénitentielle
de l’Église (cf. SC 109-110 ; CIC, can. 1249-1253 ; CCEO,
can. 880-883). Ces temps sont particulièrement appropriés pour les
exercices spirituels, les liturgies pénitentielles, les pèlerinages en
signe de pénitence, les privations volontaires comme le jeûne et
l’aumône, le partage fraternel (œuvres caritatives et
missionnaires).
1439 Le mouvement de la conversion et
de la pénitence a été merveilleusement décrit par Jésus dans la
parabole dite " du fils prodigue " dont le centre
est " le père miséricordieux " (Lc 15, 11-24) :
la fascination d’une liberté illusoire, l’abandon de la maison
paternelle ; la misère extrême dans laquelle le fils se trouve
après avoir dilapidé sa fortune ; l’humiliation profonde de se
voir obligé de paître des porcs, et pire encore, celle de désirer se
nourrir des caroubes que mangeaient les cochons ; la réflexion sur
les biens perdus ; le repentir et la décision de se déclarer
coupable devant son père ; le chemin du retour ; l’accueil
généreux par le père ; la joie du père : ce sont là des
traits propres au processus de conversion. La belle robe, l’anneau et
le banquet de fête sont des symboles de cette vie nouvelle, pure,
digne, pleine de joie qu’est la vie de l’homme qui revient à Dieu
et au sein de sa famille, qui est l’Église. Seul le cœur du Christ
qui connaît les profondeurs de l’amour de son Père, a pu nous révéler
l’abîme de sa miséricorde d’une manière si pleine de simplicité
et de beauté.
VI. Le sacrement de la pénitence et de la réconciliation
1440 Le péché est avant tout offense à Dieu,
rupture de la communion avec Lui. Il porte en même temps atteinte à la
communion avec l’Église. C’est pourquoi la conversion apporte à la
fois le pardon de Dieu et la réconciliation avec l’Église, ce
qu’exprime et réalise liturgiquement le sacrement de la Pénitence et
de la Réconciliation (cf. LG 11).
Dieu seul pardonne le péché
1441 Dieu seul pardonne les péchés (cf. Mc 2,
7). Parce que Jésus est le Fils de Dieu, il dit de lui-même :
" Le Fils de l’homme a le pouvoir de remettre les péchés
sur la terre " (Mc 2, 10) et il exerce ce pouvoir divin :
" Tes péchés sont pardonnés ! " (Mc 2, 5 ;
Lc 7, 48). Plus encore : en vertu de sa divine autorité, il donne
ce pouvoir aux hommes (cf. Jn 20, 21-23) pour qu’ils l’exercent en
son nom.
1442 Le Christ a voulu que son Église soit tout
entière, dans sa prière, sa vie et son agir, le signe et
l’instrument du pardon et de la réconciliation qu’Il nous a acquis
au prix de son sang. Il a cependant confié l’exercice du pouvoir
d’absolution au ministère apostolique. Celui-ci est chargé du " ministère
de la réconciliation " (2 Co 5, 18). L’apôtre est envoyé
" au nom du Christ ", et " c’est Dieu
lui-même " qui, à travers lui, exhorte et supplie :
" Laissez vous réconcilier avec Dieu " (2 Co 5,
20).
Réconciliation avec l’Église
1443 Durant sa vie publique, Jésus n’a pas
seulement pardonné les péchés, il a aussi manifesté l’effet de ce
pardon : il a réintégré les pécheurs pardonnés dans la
communauté du peuple de Dieu d’où le péché les avait éloignés
ou même exclus. Un signe éclatant en est le fait que Jésus admet les
pécheurs à sa table, plus encore, qu’il se met lui-même à leur
table, geste qui exprime de façon bouleversante à la fois le pardon de
Dieu (cf. Lc 15) et le retour au sein du peuple de Dieu (cf. Lc 19, 9).
1444 En donnant part aux apôtres de son propre
pouvoir de pardonner les péchés, le Seigneur leur donne aussi
l’autorité de réconcilier les pécheurs avec l’Église. Cette
dimension ecclésiale de leur tâche s’exprime notamment dans la
parole solennelle du Christ à Simon Pierre : " Je te
donnerai les clefs du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur
la terre sera lié aux cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre
sera délié aux cieux " (Mt 16, 19). " Cette même
charge de lier et de délier qui a été donnée à Pierre a été aussi
donnée au collège des apôtres unis à leur chef (Mt 18, 18 ; 28,
16-20) " (LG 22).
1445 Les mots lier et délier signifient :
celui que vous exclurez de votre communion, celui-là sera exclu de la
communion avec Dieu ; celui que vous recevez de nouveau dans votre
communion, Dieu l’accueillera aussi dans la sienne. La réconciliation
avec l’Église est inséparable de la réconciliation avec Dieu.
Le sacrement du pardon
1446 Le Christ a institué le sacrement de Pénitence
pour tous les membres pécheurs de son Église, avant tout pour ceux
qui, après le baptême, sont tombés dans le péché grave et qui ont
ainsi perdu la grâce baptismale et blessé la communion ecclésiale.
C’est à eux que le sacrement de Pénitence offre une nouvelle
possibilité de se convertir et de retrouver la grâce de la
justification. Les Pères de l’Église présentent ce sacrement comme
" la seconde planche [de salut] après le naufrage qu’est la
perte de la grâce " (Tertullien, pæn. 4, 2 ; cf. Cc.
Trente : DS 1542).
1447 Au cours des siècles la
forme concrète, selon laquelle l’Église a exercé ce pouvoir reçu
du Seigneur, a beaucoup varié. Durant les premiers siècles, la réconciliation
des chrétiens qui avaient commis des péchés particulièrement graves
après leur Baptême (par exemple l’idolâtrie, l’homicide ou
l’adultère), était liée à une discipline très rigoureuse, selon
laquelle les pénitents devaient faire pénitence publique pour leurs péchés,
souvent durant de longues années, avant de recevoir la réconciliation.
A cet " ordre des pénitents " (qui ne concernait
que certains péchés graves) on n’était admis que rarement et, dans
certaines régions, une seule fois dans sa vie. Pendant le septième siècle,
inspirés par la tradition monastique d’Orient, les missionnaires
irlandais apportèrent en Europe continentale la pratique " privée "
de la pénitence qui n’exige pas la réalisation publique et prolongée
d’œuvres de pénitence avant de recevoir la réconciliation avec l’Église.
Le sacrement se réalise désormais d’une manière plus secrète entre
le pénitent et le prêtre. Cette nouvelle pratique prévoyait la
possibilité de la réitération et ouvrait ainsi le chemin à une fréquentation
régulière de ce sacrement. Elle permettait d’intégrer dans une
seule célébration sacramentelle le pardon des péchés graves et des péchés
véniels. C’est, dans les grandes lignes, cette forme de la pénitence
que l’Église pratique jusqu’à nos jours.
1448 A travers les changements que la discipline
et la célébration de ce sacrement ont connu au cours des siècles, on
discerne la même structure fondamentale. Elle comporte deux éléments
également essentiels ; d’une part, les actes de l’homme qui se
convertit sous l’action de l’Esprit Saint : à savoir la
contrition, l’aveu et la satisfaction ; d’autre part,
l’action de Dieu par l’intervention de l’Église. L’Église qui,
par l’évêque et ses prêtres, donne au nom de Jésus-Christ le
pardon des péchés et fixe la modalité de la satisfaction, prie aussi
pour le pécheur et fait pénitence avec lui. Ainsi le pécheur est guéri
et rétabli dans la communion ecclésiale.
1449 La formule d’absolution en usage dans l’Église
latine exprime les éléments essentielles de ce sacrement : le Père
des miséricordes est la source de tout pardon. Il réalise la réconciliation
des pécheurs par la Pâque de son Fils et le don de son Esprit, à
travers la prière et le ministère de l’Église :
" Que Dieu notre Père vous montre sa
miséricorde ; par la mort et la résurrection de son Fils, il
a réconcilié le monde avec lui et il a envoyé l’Esprit Saint
pour la rémission des péchés : par le ministère de l’Église,
qu’il vous donne le pardon et la paix. Et moi, au nom du Père et
du Fils et du Saint-Esprit, je vous pardonne tous vos péchés ".
(Ordo Paenitentiae 46. 55 [Polyglotte Vaticane 1974, p. 27.
37])
VII. Les actes du pénitent
1450 " La Pénitence oblige le pécheur
à accepter volontiers tous ses éléments : dans son cœur, la
contrition ; dans sa bouche, la confession ; dans son
comportement, une totale humilité ou une fructueuse satisfaction "
(Catech. R. 2, 5, 21 ; cf. Cc. Trente : DS 1673).
La contrition
1451 Parmi les actes du pénitent, la contrition
vient en premier lieu. Elle est " une douleur de l’âme
et une détestation du péché commis avec la résolution de ne plus pécher
à l’avenir " (Cc. Trente : DS 1676).
1452 Quand elle provient de l’amour de Dieu aimé
plus que tout, la contrition est appelée " parfaite "
(contrition de charité). Une telle contrition remet les fautes vénielles ;
elle obtient aussi le pardon des péchés mortels, si elle comporte la
ferme résolution de recourir dès que possible à la confession
sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1677)
1453 La contrition dite " imparfaite "
(ou " attrition ") est, elle aussi, un don de Dieu,
une impulsion de l’Esprit Saint. Elle naît de la considération de la
laideur du péché ou de la crainte de la damnation éternelle et des
autres peines dont est menacé le pécheur (contrition par crainte). Un
tel ébranlement de la conscience peut amorcer une évolution intérieure
qui sera parachevée sous l’action de la grâce, par l’absolution
sacramentelle. Par elle-même, cependant, la contrition imparfaite
n’obtient pas le pardon des péchés graves, mais elle dispose à
l’obtenir dans le sacrement de la Pénitence (cf. Cc. Trente : DS
1678 ; 1705).
1454 Il convient de préparer la réception de ce
sacrement par un examen de conscience fait à la lumière de la
Parole de Dieu. Les textes les plus adaptés à cet effet sont à
chercher dans le Décalogue et dans la catéchèse morale des Évangiles
et des lettres apostoliques : Sermon sur la montagne, les
enseignements apostoliques (cf. Rm 12-15 ; 1 Co 12-13 ; Ga 5 ;
Ep 4-6).
La confession des péchés
1455 La confession des péchés (l’aveu), même
d’un point de vue simplement humain, nous libère et facilite notre réconciliation
avec les autres. Par l’aveu, l’homme regarde en face les péchés
dont il s’est rendu coupable ; il en assume la responsabilité et
par là, il s’ouvre de nouveau à Dieu et à la communion de l’Église
afin de rendre possible un nouvel avenir.
1456 L’aveu au prêtre constitue une partie
essentielle du sacrement de Pénitence : " Les pénitents
doivent, dans la confession, énumérer tous les péchés mortels dont
ils ont conscience après s’être examinés sérieusement, même si
ces péchés sont très secrets et s’ils ont été commis seulement
contre les deux derniers préceptes du Décalogue (cf. Ex 20, 17 ;
Mt 5, 28), car parfois ces péchés blessent plus grièvement l’âme
et sont plus dangereux que ceux qui ont été commis au su de tous "
(Cc. Trente : DS 1680) :
Lorsque les fidèles du Christ s’efforcent de
confesser tous les péchés qui leur viennent à la mémoire, on ne
peut pas douter qu’ils les présentent tous au pardon de la miséricorde
divine. Ceux qui agissent autrement et qui en cachent sciemment
quelques-uns ne proposent à la bonté divine rien qu’elle puisse
remettre par l’intermédiaire du prêtre. Car " si le
malade rougit de découvrir sa plaie au médecin, la médecine ne
soigne pas ce qu’elle ignore " (S. Jérôme, Eccl. 10,
11 : PL 23, 1096) (Cc. Trente : DS 1680).
1457 D’après le commandement de l’Église,
" tout fidèle parvenu à l’âge de la discrétion doit
confesser au moins une fois par an, les péchés graves dont il a
conscience " (DS 1683 ; cf. DS 1708 ; CIC, can.
989). Celui qui a conscience d’avoir commis un péché mortel ne
doit pas recevoir la Sainte Communion, même s’il éprouve une
grande contrition, sans avoir préalablement reçu l’absolution
sacramentelle (cf. Cc. Trente : DS 1647 ;
1661), à moins qu’il n’ait un motif grave pour communier et
qu’il ne lui soit possible d’accéder à un confesseur (cf. CIC,
can. 916 ; CCEO, can. 711). Les enfants doivent accéder au
sacrement de la Pénitence avant de recevoir pour la première fois la
Sainte. Communion (cf. CIC, can. 914).
1458 Sans être strictement nécessaire, la
confession des fautes quotidiennes (péchés véniels) est néanmoins
vivement recommandée par l’Église (cf. Cc. Trente : DS 1680 ;
CIC, can. 988, § 2 ). En effet, la confession régulière de nos péchés
véniels nous aide à former notre conscience, à lutter contre nos
penchants mauvais, à nous laisser guérir par le Christ, à progresser
dans la vie de l’Esprit. En recevant plus fréquemment par ce
sacrement, le don de la miséricorde du Père, nous sommes poussés à
être miséricordieux comme lui (cf. Lc 6, 36) :
Celui qui confesse ses péchés agit déjà avec
Dieu. Dieu accuse tes péchés ; si tu les accuses toi aussi,
tu te joins à Dieu. L’homme et le pécheur sont pour ainsi dire
deux réalités : quand tu entends parler de l’homme, c’est
Dieu qui l’a fait ; quand tu entends parler du pécheur,
c’est l’homme lui-même qui l’a fait. Détruis ce que tu as
fais pour que Dieu sauve ce qu’il a fait... Quand tu commences à
détester ce que tu as fait, c’est alors que tes œuvres bonnes
commencent parce que tu accuses tes œuvres mauvaises. Le
commencement des œuvres bonnes, c’est la confession des œuvres
mauvaises. Tu fais la vérité et tu viens à la Lumière (S.
Augustin, ev. Jo. 12, 13).
La satisfaction
1459 Beaucoup de péchés causent du tort au
prochain. Il faut faire le possible pour le réparer (par exemple
restituer des choses volées, rétablir la réputation de celui qui a été
calomnié, compenser des blessures). La simple justice exige cela. Mais
en plus, le péché blesse et affaiblit le pécheur lui-même, ainsi que
ses relations avec Dieu et avec le prochain. L’absolution enlève le péché,
mais elle ne remédie pas à tous les désordres que le péché a causés
(cf. Cc. Trente : DS 1712). Relevé du péché, le pécheur doit
encore recouvrer la pleine santé spirituelle. Il doit donc faire
quelque chose de plus pour réparer ses péchés : il doit " satisfaire "
de manière appropriée ou " expier " ses péchés.
Cette satisfaction s’appelle aussi " pénitence ".
1460 La pénitence que le confesseur
impose, doit tenir compte de la situation personnelle du pénitent et
doit chercher son bien spirituel. Elle doit correspondre autant que
possible à la gravité et à la nature des péchés commis. Elle peut
consister dans la prière, une offrande, dans les œuvres de miséricorde,
le service du prochain, dans des privations volontaires, des sacrifices,
et surtout dans l’acceptation patiente de la croix que nous devons
porter. De telles pénitences aident à nous configurer au Christ qui,
seul, a expié pour nos péchés (cf. Rm 3, 25 ; 1 Jn 2, 1-2) une
fois pour toutes. Elles nous permettent de devenir les cohéritiers du
Christ ressuscité, " puisque nous souffrons avec lui "
(Rm 8, 17 ; cf. Cc. Trente : DS 1690) :
Mais notre satisfaction, celle que nous
acquittons pour nos péchés, n’est que par Jésus-Christ :
nous qui, de nous mêmes comme tels, ne pouvons rien nous-mêmes,
avec l’aide " de celui qui nous fortifie, nous pouvons
tout " (Ph 4, 13). Ainsi l’homme n’a rien dont il
puisse se glorifier, mais toute notre " gloire "
est dans le Christ... en qui nous satisfaisons, " en
faisant de dignes fruits de pénitence " (Lc 3, 8), qui en
Lui puisent leur force, par Lui sont offerts au Père et grâce à
Lui sont acceptés par le Père (Cc. Trente : DS 1691).
VIII. Le ministre de ce sacrement
1461 Puisque le Christ a confié à ses apôtres
le ministère de la réconciliation (cf. Jn 20, 23 ; 2 Co 5, 18),
les évêques, leurs successeurs, et les presbytres, collaborateurs des
évêques, continuent à exercer ce ministère. En effet, ce sont les évêques
et les presbytres, qui ont, en vertu du sacrement de l’Ordre, le
pouvoir de pardonner tous les péchés " au nom du Père et du
Fils et du Saint-Esprit ".
1462 Le pardon des péchés réconcilie avec Dieu
mais aussi avec l’Église. L’évêque, chef visible de l’Église
particulière, est donc considéré à juste titre, depuis les temps
anciens, comme celui qui a principalement le pouvoir et le ministère de
la réconciliation : il est le modérateur de la discipline pénitentielle
(LG 26). Les presbytres, ses collaborateurs, l’exercent dans la mesure
où ils en ont reçu la charge soit de leur évêque (ou d’un supérieur
religieux) soit du Pape, à travers le droit de l’Église (cf. CIC,
can. 844 ; 967-969 ; 972 ; CCEO, can. 722, §§ 3-4).
1463 Certains péchés particulièrement graves
sont frappés de l’excommunication, la peine ecclésiastique la plus sévère,
qui empêche le réception des sacrements et l’exercice de certains
actes ecclésiastiques (cf. CIC, can. 1331 ; CCEO, can. 1431 ;
1434), et dont l’absolution, par conséquent, ne peut être accordée,
selon le droit de l’Église, que par le Pape, l’évêque du lieu ou
des prêtres autorisés par eux (cf. CIC, can. 1354-1357 ; CCEO,
can. 1420). En cas de danger de mort tout prêtre, même dépourvu de la
faculté d’entendre les confessions, peut absoudre de tout péché
(cf. CIC, can. 976 ; CCEO, can. 725) et de toute excommunication.
1464 Les prêtres doivent encourager les fidèles
à accéder au sacrement de la Pénitence et doivent se montrer
disponibles à célébrer ce sacrement chaque fois que les chrétiens le
demandent de manière raisonnable (cf. CIC, can. 986 ; CCEO, can.
735 ; PO 13).
1465 En célébrant le sacrement de la Pénitence,
le prêtre accomplit le ministère du Bon Pasteur qui cherche la brebis
perdue, celui du Bon Samaritain qui panse les blessures, du Père qui
attend le Fils prodigue et l’accueille à son retour, du juste Juge
qui ne fait pas acception de personne et dont le jugement est à la fois
juste et miséricordieux. Bref, le prêtre est le signe et
l’instrument de l’amour miséricordieux de Dieu envers le pécheur.
1466 Le confesseur n’est pas le maître, mais
le serviteur du pardon de Dieu. Le ministre de ce sacrement doit
s’unir à l’intention et à la charité du Christ (cf. PO 13). Il
doit avoir une connaissance éprouvée du comportement chrétien,
l’expérience des choses humaines, le respect et la délicatesse
envers celui qui est tombé ; il doit aimer la vérité, être fidèle
au magistère de l’Église et conduire le pénitent avec patience vers
la guérison et la pleine maturité. Il doit prier et faire pénitence
pour lui en le confiant à la miséricorde du Seigneur.
1467 Étant donnée la délicatesse et la
grandeur de ce ministère et le respect dû aux personnes, l’Église déclare
que tout prêtre qui entend des confessions est obligé de garder un
secret absolu au sujet des péchés que ses pénitents lui ont confessés,
sous des peines très sévères (CIC, can. 1388, §1 ; CCEO, can.
1456). Il ne peut pas non plus faire état des connaissances que la
confession lui donne sur la vie des pénitents. Ce secret, qui n’admet
pas d’exceptions, s’appelle le " sceau sacramentel ",
car ce que le pénitent a manifesté au prêtre reste " scellé "
par le sacrement.
IX. Les effets de ce sacrement
1468 " Toute l’efficacité de la Pénitence
consiste à nous rétablir dans la grâce de Dieu et à nous unir à Lui
dans une souveraine amitié " (Catech. R. 2, 5, 18). Le but et
l’effet de ce sacrement sont donc la réconciliation avec Dieu.
Chez ceux qui reçoivent le sacrement de Pénitence avec un cœur
contrit et dans une disposition religieuse, " il est suivi de
la paix et de la tranquillité de la conscience, qu’accompagne une
forte consolation spirituelle " (Cc. Trente : DS 1674).
En effet, le sacrement de la réconciliation avec Dieu apporte une véritable
" résurrection spirituelle ", une restitution de la
dignité et des biens de la vie des enfants de Dieu dont le plus précieux
est l’amitié de Dieu (Lc 15, 32).
1469 Ce sacrement nous réconcilie avec l’Église.
Le péché ébrèche ou brise la communion fraternelle. Le sacrement de
Pénitence la répare ou la restaure. En ce sens, il ne guérit pas
seulement celui qui est rétabli dans la communion ecclésiale, il a
aussi un effet vivifiant sur la vie de l’Église qui a souffert du péché
d’un de ses membres (cf. 1 Co 12, 26). Rétabli ou affermi dans la
communion des saints, le pécheur est fortifié par l’échange des
biens spirituels entre tous les membres vivants du Corps du Christ,
qu’ils soient encore dans l’état de pèlerinage ou qu’ils soient
déjà dans la patrie céleste (cf. LG 48-50) :
Il faut rappeler que la réconciliation avec Dieu
a comme conséquence, pour ainsi dire, d’autres réconciliations
qui porteront remède à d’autres ruptures produites par le péché :
le pénitent pardonné se réconcilie avec lui-même dans la
profondeur de son être, où il récupère la propre vérité intérieure ;
il se réconcilie avec les frères que de quelque manière il a
offensé et blessé ; il se réconcilie avec l’Église ;
il se réconcilie avec la création toute entière (RP 31).
1470 Dans ce sacrement, le pécheur, en se
remettant au jugement miséricordieux de Dieu, anticipe d’une
certaine façon le jugement auquel il sera soumis à la fin de
cette vie terrestre. Car c’est maintenant, dans cette vie-ci,
que nous est offert le choix entre la vie et la mort, et ce n’est que
par le chemin de la conversion que nous pouvons entrer dans le Royaume
d’où exclut le péché grave (cf. 1 Co 5, 11 ; Ga 5, 19-21 ;
Ap 22, 15). En se convertissant au Christ par la pénitence et la foi,
le pécheur passe de la mort à la vie " et il n’est pas
soumis au jugement " (Jn 5, 24).
X. Les indulgences
1471 La doctrine et la pratique des indulgences
dans l’Église sont étroitement liées aux effets du sacrement de Pénitence.
Qu’est-ce que l’indulgence ?
" L’indulgence est la rémission devant
Dieu de la peine temporelle due pour les péchés dont la faute est déjà
effacée, rémission que le fidèle bien disposé obtient à certaines
conditions déterminées, par l’action de l’Église, laquelle, en
tant que dispensatrice de la rédemption, distribue et applique par son
autorité le trésor des satisfactions du Christ et des saints "
(Paul VI, const. ap. " Indulgentiarum doctrina ",
Norme 1).
" L’indulgence est partielle ou plénière,
selon qu’elle libère partiellement ou totalement de la peine
temporelle due pour le péché " (ibid, Norme 2).
" Tout fidèle peut gagner des indulgences pour soi-même ou
les appliquer aux défunts " (CIC, can. 994).
Les peines du péché
1472 Pour comprendre cette doctrine et cette
pratique de l’Église il faut voir que le péché a une double conséquence.
Le péché grave nous prive de la communion avec Dieu, et par là il
nous rend incapables de la vie éternelle, dont la privation s’appelle
la " peine éternelle " du péché. D’autre part,
tout péché, même véniel, entraîne un attachement malsain aux créatures,
qui a besoin de purification, soit ici-bas, soit après la mort, dans
l’état qu’on appelle Purgatoire. Cette purification libère de ce
qu’on appelle la " peine temporelle " du péché.
Ces deux peines ne doivent pas être conçues comme une espèce de
vengeance, infligée par Dieu de l’extérieur, mais bien comme découlant
de la nature même du péché. Une conversion qui procède d’une
fervente charité, peut arriver à la totale purification du pécheur,
de sorte qu’aucune peine ne subsisterait (cf. Cc. Trente : DS
1712-1713 ; 1820).
1473 Le pardon du péché et la restauration de
la communion avec Dieu entraînent la remise des peines éternelles du péché.
Mais des peines temporelles du péché demeurent. Le chrétien doit
s’efforcer, en supportant patiemment les souffrances et les épreuves
de toutes sortes et, le jour venu, en faisant sereinement face à la
mort, d’accepter comme une grâce ces peines temporelles du péché ;
il doit s’appliquer, par les œuvres de miséricorde et de charité,
ainsi que par la prière et les différentes pratiques de la pénitence,
à se dépouiller complètement du " vieil homme "
et à revêtir " l’homme nouveau " (cf. Ep 4, 24).
Dans la communion des saints
1474 Le chrétien qui cherche à se purifier de
son péché et à se sanctifier avec l’aide de la grâce de Dieu ne se
trouve pas seul. " La vie de chacun des enfants de Dieu se
trouve liée d’une façon admirable, dans le Christ et par le Christ,
avec la vie de tous les autres frères chrétiens, dans l’unité
surnaturelle du Corps mystique du Christ, comme dans une personne
mystique " (Paul VI, const. ap. " Indulgentiarum
doctrina " 5).
1475 Dans la communion des saints " il
existe donc entre les fidèles – ceux qui sont en possession de la
patrie céleste, ceux qui ont été admis à expier au purgatoire ou
ceux qui sont encore en pèlerinage sur la terre – un constant lien
d’amour et un abondant échange de tous biens " (ibid.).
Dans cet échange admirable, la sainteté de l’un profite aux autres,
bien au-delà du dommage que le péché de l’un a pu causer aux
autres. Ainsi, le recours à la communion des saints permet au pécheur
contrit d’être plus tôt et plus efficacement purifié des peines du
péché.
1476 Ces biens spirituels de la communion des
saints, nous les appelons aussi le trésor de l’Église, " qui
n’est pas une somme de biens, ainsi qu’il en est des richesses matérielles
accumulées au cours des siècles, mais qui est le prix infini et inépuisable
qu’ont auprès de Dieu les expiations et les mérites du Christ Notre
Seigneur, offerts pour que l’humanité soit libérée du péché et
parvienne à la communion avec le Père. C’est dans le Christ, notre Rédempteur,
que se trouvent en abondance les satisfactions et les mérites de sa rédemption
(cf. He 7, 23-25 ; 9, 11-28) ".
1477 " Appartiennent également à ce
trésor le prix vraiment immense, incommensurable et toujours nouveau
qu’ont auprès de Dieu les prières et les bonnes œuvres de la
bienheureuse Vierge Marie et de tous les saints qui se sont sanctifiés
par la grâce du Christ, en marchant sur ses traces, et ont accompli une
œuvre agréable au Père, de sorte qu’en travaillant à leur propre
salut, ils ont coopéré également au salut de leurs frères dans
l’unité du Corps mystique " (Paul VI, const. ap. " Indulgentiarum
doctrina " 5).
Obtenir l’indulgence de Dieu par l’Église
1478 L’indulgence s’obtient par l’Église
qui, en vertu du pouvoir de lier et de délier qui lui a été accordé
par le Christ Jésus, intervient en faveur d’un chrétien et lui ouvre
le trésor des mérites du Christ et des saints pour obtenir du Père
des miséricordes la remise des peines temporelles dues pour ses péchés.
C’est ainsi que l’Église ne veut pas seulement venir en aide à ce
chrétien, mais aussi l’inciter à des œuvres de piété, de pénitence
et de charité (cf. Paul VI, loc. cit. 8 ; Cc. Trente : DS
1835).
1479 Puisque les fidèles défunts en voie de
purification sont aussi membres de la même communion des saints, nous
pouvons les aider entre autres en obtenant pour eux des indulgences, de
sorte qu’ils soient acquittés des peines temporelles dues pour leurs
péchés.
XI. La célébration du sacrement de pénitence
1480 Comme tous les sacrements, la pénitence est
une action liturgique. Tels sont ordinairement les éléments de la célébration :
salutation et bénédiction du prêtre, lecture de la Parole de Dieu
pour éclairer la conscience et susciter la contrition, et exhortation
à la repentance ; la confession qui reconnaît les péchés et les
manifeste au prêtre ; l’imposition et acceptation de la pénitence ;
l’absolution du prêtre ; louange d’action de grâces et envoi
avec la bénédiction du prêtre.
1481 La liturgie byzantine connaît plusieurs
formules d’absolution, de forme déprécative, qui expriment
admirablement le mystère du pardon : " Que le Dieu, qui
par le prophète Nathan, a pardonné à David lorsqu’il eut confessé
ses propres péchés, et à Pierre lorsqu’il eut pleuré amèrement,
et à la courtisane lorsqu’elle eut répandu ses larmes sur ses pieds,
et au pharisien, et au prodigue, que ce même Dieu vous pardonne, par
moi, pécheur, en cette vie et dans l’autre et qu’Il vous fasse
comparaître sans vous condamner à son redoutable tribunal, Lui qui est
béni dans les siècles des siècles. Amen. " (Euxologia to mèga
[Athens 1992] p. 222)
1482 Le sacrement de la Pénitence peut aussi
avoir lieu dans le cadre d’une célébration communautaire,
dans laquelle on se prépare ensemble à la confession et on rend grâce
ensemble pour le pardon reçu. Ici, la confession personnelle des péchés
et l’absolution individuelle sont insérées dans une liturgie de la
Parole de Dieu, avec lectures et homélie, examen de conscience mené en
commun, demande communautaire du pardon, prière du " Notre Père "
et action de grâce en commun. Cette célébration communautaire exprime
plus clairement le caractère ecclésial de la pénitence. Quelle que
soit cependant la manière de sa célébration, le sacrement de Pénitence
est toujours, d’après sa nature même, une action liturgique, donc
ecclésiale et publique (cf. SC 26-27).
1483 En des cas de nécessité grave on peut
recourir à la célébration communautaire de la réconciliation avec
confession générale et absolution générale. Une telle nécessité
grave peut se présenter lorsqu’il y a un danger imminent de mort sans
que le ou les prêtres aient le temps suffisant pour entendre la
confession de chaque pénitent. La nécessité grave peut exister aussi
lorsque, compte tenu du nombre des pénitents, il n’y a pas assez de
confesseurs pour entendre dûment les confessions individuelles dans un
temps raisonnable, de sorte que les pénitents, sans faute de leur part,
se verraient privés pendant longtemps de la grâce sacramentelle ou de
la sainte communion. Dans ce cas les fidèles doivent avoir, pour la
validité de l’absolution, le propos de confesser individuellement
leurs péchés graves en temps voulu (cf. CIC, can. 962, § 1). C’est
à l’Evêque diocésain de juger si les conditions requises pour
l’absolution générale existent (cf. CIC, can. 961, § 2). Un grand
concours de fidèles à l’occasion de grandes fêtes ou de pèlerinages
ne constitue pas un cas d’une telle grave nécessité (cf. CIC, can.
961, § 1)
1484 " La confession individuelle et
intégrale suivie de l’absolution demeure le seul mode ordinaire par
lequel les fidèles se réconcilient avec Dieu et l’Église, sauf si
une impossibilité physique ou morale dispense d’une telle confession "
(OP 31). Ceci n’est pas sans raisons profondes. Le Christ agit en
chacun des sacrements. Il s’adresse personnellement à chacun des pécheurs :
" Mon enfant, tes péchés sont remis " (Mc 2, 5) ;
il est le médecin qui se penche sur chacun des malades qui ont besoin
de lui (cf. Mc 2, 17) pour les guérir ; il les relève et les réintègre
dans la communion fraternelle. La confession personnelle est donc la
forme la plus significative de la réconciliation avec Dieu et avec l’Église.
En bref
1485 " Le soir de Pâques, le Seigneur Jésus
se montra à ses Apôtres et leur dit : ‘Recevez l’Esprit
Saint. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis.
Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus’ "
(Jn 20, 22-23).
1486 Le pardon des péchés commis après le Baptême
est accordé par un sacrement propre appelé sacrement de la
conversion, de la confession, de la pénitence ou de la réconciliation.
1487 Qui pèche blesse l’honneur de Dieu et son
amour, sa propre dignité d’homme appelé à être fils de Dieu et
le bien-être spirituel de l’Église dont chaque chrétien doit être
une pierre vivante.
1488 Aux yeux de la foi, aucun mal n’est plus
grave que le péché et rien n’a de pires conséquences pour les pécheurs
eux-mêmes, pour l’Église et pour le monde entier.
1489 Revenir à la communion avec Dieu après
l’avoir perdue par le péché, est un mouvement né de la grâce du
Dieu plein de miséricorde et soucieux du salut des hommes. Il faut
demander ce don précieux pour soi-même comme pour autrui.
1490 Le mouvement de retour à Dieu, appelé
conversion et repentir, implique une douleur et une aversion vis-à-vis
des péchés commis, et le propos ferme de ne plus pécher à
l’avenir. La conversion touche donc le passé et l’avenir ;
elle se nourrit de l’espérance en la miséricorde divine.
1491 Le sacrement de la Pénitence est constitué
par l’ensemble des trois actes posés par le pénitent, et par
l’absolution du prêtre. Les actes du pénitent sont : le
repentir, la confession ou manifestation des péchés au prêtre et le
propos d’accomplir la réparation et les œuvres de réparation.
1492 Le repentir (appelé aussi contrition) doit être
inspiré par des motifs qui relèvent de la foi. Si le repentir est
conçu par amour de charité envers Dieu, on le dit " parfait " ;
s’il est fondé sur d’autres motifs, on l’appelle " imparfait ".
1493 Celui qui veut obtenir la réconciliation avec
Dieu et avec l’Église, doit confesser au prêtre tous les péchés
graves qu’il n’a pas encore confessé et dont il se souvient après
avoir examiné soigneusement sa conscience. Sans être en soi nécessaire,
la confession des fautes vénielles est néanmoins vivement recommandée
par l’Église.
1494 Le confesseur propose au pénitent
l’accomplissement de certains actes de " satisfaction "
ou de " pénitence ", en vue de réparer le
dommage causé par le péché et de rétablir les habitudes propres au
disciple du Christ.
1495 Seuls les prêtres qui ont reçu de
l’autorité de l’Église la faculté d’absoudre peuvent
pardonner les péchés au nom du Christ.
1496 Les effets spirituels du sacrement de Pénitence
sont :
– la réconciliation avec Dieu par laquelle le pénitent
recouvre la grâce,
– la réconciliation avec l’Église ;
– la remise de la peine éternelle encourue par
les péchés mortels ;
– la remise, au moins en partie, des peines
temporelles, suites du péché ;
– la paix et la sérénité de la conscience, et
la consolation spirituelle ;
– l’accroissement des forces spirituelles pour
le combat chrétien.
1497 La confession individuelle et intégrale des péchés
graves suivie de l’absolution demeure le seul moyen ordinaire pour
la réconciliation avec Dieu et avec l’Église.
1498 Par les indulgences les fidèles peuvent
obtenir pour eux-mêmes et aussi pour les âmes du Purgatoire, la rémission
des peines temporelles, suites des péchés.
ARTICLE 5
L’ONCTION DES MALADES
1499 " Par l’Onction sacrée des
malades et la prière des prêtres, c’est l’Église toute entière
qui recommande les malades au Seigneur souffrant et glorifié, pour
qu’il les soulage et les sauve ; bien mieux, elle les exhorte, en
s’associant librement à la passion et à la mort du Christ à
apporter leur part pour le bien du peuple de Dieu " (LG 11).
I. Ses fondements dans l’Economie du Salut
La maladie dans la vie humaine
1500 La maladie et la souffrance ont
toujours été parmi les problèmes les plus graves qui éprouvent la
vie humaine. Dans la maladie, l’homme fait l’expérience de son
impuissance, de ses limites et de sa finitude. Toute maladie peut nous
faire entrevoir la mort.
1501 La maladie peut conduire à l’angoisse, au
repliement sur soi, parfois même au désespoir et à la révolte contre
Dieu. Elle peut aussi rendre la personne plus mûre, l’aider à
discerner dans sa vie ce qui n’est pas essentiel pour se tourner vers
ce qui l’est. Très souvent, la maladie provoque une recherche de
Dieu, un retour à Lui.
Le malade devant Dieu
1502 L’homme de l’Ancien Testament vit la
maladie en face de Dieu. C’est devant Dieu qu’il déverse sa plainte
sur sa maladie (cf. Ps 38) et c’est de Lui, le Maître de la vie et de
la mort, qu’il implore la guérison (cf. Ps 6, 3 ; Is 38). La
maladie devient chemin de conversion (cf. Ps 38, 5 ; 39, 9. 12) et
le pardon de Dieu inaugure la guérison (cf. Ps 32, 5 ; 107, 20 ;
Mc 2, 5-12). Israël fait l’expérience que la maladie est, d’une façon
mystérieuse, liée au péché et au mal, et que la fidélité à Dieu,
selon sa Loi, rend la vie : " car c’est moi, le
Seigneur, qui suis ton médecin " (Ex 15, 26). Le prophète
entrevoit que la souffrance peut aussi avoir un sens rédempteur pour
les péchés des autres (cf. Is 53, 11). Enfin, Isaïe annonce que Dieu
amènera un temps pour Sion où il pardonnera toute faute et guérira
toute maladie (cf. Is 33, 24).
Le Christ – médecin
1503 La compassion du Christ envers les malades
et ses nombreuses guérisons d’infirmes de toute sorte (cf. Mt 4, 24)
sont un signe éclatant de ce " que Dieu a visité son peuple "
(Lc 7, 16) et que le Royaume de Dieu est tout proche. Jésus n’a pas
seulement pouvoir de guérir, mais aussi de pardonner les péchés (cf.
Mc 2, 5-12) : il est venu guérir l’homme tout entier, âme et
corps ; il est le médecin dont les malades ont besoin (cf. Mc 2,
17). Sa compassion envers tous ceux qui souffrent va si loin qu’il
s’identifie avec eux : " J’ai été malade et vous
m’avez visité " (Mt 25, 36). Son amour de prédilection
pour les infirmes n’a cessé, tout au long des siècles, d’éveiller
l’attention toute particulière des chrétiens envers tous ceux qui
souffrent dans leur corps et dans leur âme. Elle est à l’origine des
efforts inlassables pour les soulager.
1504 Souvent Jésus demande aux malades de croire
(cf. Mc 5, 34. 36 ; 9, 23). Il se sert de signes pour guérir :
salive et imposition des mains (cf. Mc 7, 32-36 ; 8, 22-25), boue
et ablution (cf. Jn 9, 6 s). Les malades cherchent à le toucher (cf. Mc
1, 41 ; 3, 10 ; 6, 56) " car une force sortait de
lui qui les guérissait tous " (Lc 6, 19). Ainsi, dans les
sacrements, le Christ continue à nous " toucher "
pour nous guérir.
1505 Emu par tant de souffrances, le Christ non
seulement se laisse toucher par les malades, mais il fait siennes leurs
misères : " Il a pris nos infirmités et s’est chargé
de nos maladies " (Mt 8, 17 ; cf. Is 53, 4). Il n’a pas
guéri tous les malades. Ses guérisons étaient des signes de la venue
du Royaume de Dieu. Ils annonçaient une guérison plus radicale :
la victoire sur le péché et la mort par sa Pâque. Sur la Croix, le
Christ a pris sur lui tout le poids du mal (cf. Is 53, 4-6) et a enlevé
le " péché du monde " (Jn 1, 29), dont la maladie
n’est qu’une conséquence. Par sa passion et sa mort sur la Croix,
le Christ a donné un sens nouveau à la souffrance : elle peut désormais
nous configurer à lui et nous unir à sa passion rédemptrice.
" Guérissez les malades... "
1506 Le Christ invite ses disciples à le suivre
en prenant à leur tour leur croix (cf. Mt 10, 38). En le suivant, ils
acquièrent un nouveau regard sur la maladie et sur les malades. Jésus
les associe à sa vie pauvre et servante. Il les fait participer à son
ministère de compassion et de guérison : " Ils s’en
allèrent prêcher qu’on se repentît ; et ils chassaient
beaucoup de démons et faisaient des onctions d’huile à de nombreux
malades et les guérissaient " (Mc 6, 12-13).
1507 Le Seigneur ressuscité renouvelle cet envoi
(" Par mon nom ... ils imposeront les mains aux malades et
ceux-ci seront guéris " : Mc 16, 17-18) et le confirme
par les signes que l’Église accomplit en invoquant son nom (cf. Ac 9,
34 ; 14, 3). Ces signes manifestent d’une manière spéciale que
Jésus est vraiment " Dieu qui sauve " (cf. Mt 1, 21 ;
Ac 4, 12).
1508 L’Esprit Saint donne à certains un
charisme spécial de guérison (cf. 1 Co 12, 9. 28. 30) pour manifester
la force de la grâce du Ressuscité. Même les prières les plus
intenses n’obtiennent toutefois pas la guérison de toutes les
maladies. Ainsi S. Paul doit apprendre du Seigneur que " ma grâce
te suffit : car ma puissance se déploie dans la faiblesse "
(2 Co 12, 9), et que les souffrances à endurer peuvent avoir comme sens
que " je complète dans ma chair ce qui manque aux épreuves
du Christ pour son Corps qui est l’Église " (Col 1, 24).
1509 " Guérissez les malades ! "
(Mt 10, 8). Cette charge, l’Église l’a reçue du Seigneur et tâche
de la réaliser autant par les soins qu’elle apporte aux malades que
par la prière d’intercession avec laquelle elle les accompagne. Elle
croit en la présence vivifiante du Christ, médecin des âmes et des
corps. Cette présence est particulièrement agissante à travers les
sacrements, et de manière toute spéciale par l’Eucharistie, pain qui
donne la vie éternelle (cf. Jn 6, 54. 58) et dont S. Paul insinue le
lien avec la santé corporelle (cf. 1 Co 11, 30).
1510 L’Église apostolique connaît cependant
un rite propre en faveur des malades, attesté par S. Jacques :
" Quelqu’un parmi vous est malade ? Qu’il appelle les
presbytres de l’Église et qu’ils prient sur lui, après l’avoir
oint d’huile au nom du Seigneur. La prière de la foi sauvera le
patient, et le Seigneur le relèvera. S’il a commis des péchés, ils
lui seront remis " (Jc 5, 14-15). La Tradition a reconnu dans
ce rite un des sept sacrements de l’Église (cf. DS 216 ;
1324-1325 ; 1695-1696 ; 1716-1717).
Un sacrement des malades
1511 L’Église croit et confesse
qu’il existe, parmi les sept sacrements, un sacrement spécialement
destiné à réconforter ceux qui sont éprouvés par la maladie :
l’Onction des malades :
Cette onction sainte des malades a été instituée
par le Christ notre Seigneur comme un sacrement du Nouveau
Testament, véritablement et proprement dit, insinué par Marc [cf.
Mc 6, 13], mais recommandé aux fidèles et promulgué par Jacques,
apôtre et frère du Seigneur [cf. Jc 5, 14-15] (Cc. Trente :
DS 1695).
1512 Dans la tradition liturgique, tant en
Orient qu’en Occident, on possède dès l’antiquité, des témoignages
d’onctions de malades pratiquées avec de l’huile bénite. Au
cours des siècles, l’Onction des malades a été conférée de plus
en plus exclusivement à ceux qui étaient sur le point de mourir. A
cause de cela elle avait reçu le nom d’ " Extrême-Onction ".
Malgré cette évolution la liturgie n’a jamais omis de prier le
Seigneur afin que le malade recouvre sa santé si cela est convenable
à son salut (cf. DS 1696).
1513 La Constitution apostolique " Sacram
unctionem infirmorum " du 30 novembre 1972, à la suite du
deuxième Concile du Vatican (cf. SC 73) a établi que désormais, dans
le rite romain, on observe ce qui suit :
Le sacrement de l’Onction des malades est conféré
aux personnes dangereusement malades, en les oignant sur le front et
sur les mains avec de l’huile dûment bénite – huile d’olive
ou autre huile extraite de plantes – en disant une seule fois :
" Per istam sanctam unctionem et suam piissimam
misericordiam adiuvet te Dominus gratia Spiritus Sancti, ut a
peccatis liberatum te salvet atque propitius allevet "
(Par cette onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bonté vous
réconforte par la grâce de l’Esprit Saint. Ainsi, vous ayant libéré
de tous péchés, qu’Il vous sauve et vous relève – cf. CIC,
can. 847, § 1).
II. Qui reçoit et qui administre ce sacrement ?
En cas de maladie grave ...
1514 L’Onction des malades " n’est
pas seulement le sacrement de ceux qui se trouvent à toute extrémité.
Aussi, le temps opportun pour la recevoir est-il certainement déjà
arrivé lorsque le fidèle commence à être en danger de mort à cause
de la maladie par suite d’affaiblissement physique ou de vieillesse "
(SC 73 ; cf. CIC, can. 1004, § 1 ; 1005 ; 1007 ;
CCEO, can. 738).
1515 Si un malade qui a reçu l’Onction
recouvre la santé, il peut, en cas de nouvelle maladie grave, recevoir
de nouveau ce sacrement. Au cours de la même maladie, ce sacrement peut
être réitéré si la maladie s’aggrave. Il est approprié de
recevoir l’Onction des malades au seuil d’une opération importante.
Il en va de même pour les personnes âgées dont la fragilité
s’accentue.
" ...qu’il appelle les presbytres de l’Église "
1516 Seuls les prêtres (évêques et presbytres)
sont les ministres de l’Onction des malades (cf. Cc. Trente : DS
1697 ; 1719 ; CIC, can. 1003 ; CCEO, can. 739, § 1).
C’est le devoir des pasteurs d’instruire les fidèles des bienfaits
de ce sacrement. Que les fidèles encouragent les malades à faire appel
au prêtre pour recevoir ce sacrement. Que les malades se préparent
pour le recevoir dans les bonnes dispositions, avec l’aide de leur
pasteur et de toute la communauté ecclésiale qui est invitée à
entourer tout spécialement les malades de ses prières et de ses
attentions fraternelles.
III. Comment est célébré ce sacrement ?
1517 Comme tous les sacrements, l’Onction des
malades est une célébration liturgique et communautaire (cf. SC
27), qu’elle ait lieu en famille, à l’hôpital ou à l’Église,
pour un seul malade ou pour tout un groupe d’infirmes. Il est très
convenable qu’elle soit célébrée au sein de l’Eucharistie, mémorial
de la Pâque du Seigneur. Si les circonstances y invitent, la célébration
du sacrement peut être précédée du sacrement de Pénitence et suivie
du sacrement de l’Eucharistie. En tant que sacrement de la Pâque du
Christ, l’Eucharistie devrait toujours être le dernier sacrement de
la pérégrination terrestre, le " viatique " pour
le " passage " vers la vie éternelle.
1518 Parole et sacrement forment un tout inséparable.
La Liturgie de la Parole, précédée d’un acte de pénitence, ouvre
la célébration. Les paroles du Christ, le témoignage des Apôtres éveillent
la foi du malade et de la communauté pour demander au Seigneur la force
de son Esprit.
1519 La célébration du sacrement comprend
principalement les éléments suivants : " les prêtres
de l’Église " (Jc 5, 14) imposent – en silence – les
mains aux malades ; ils prient sur les malades dans la foi de l’Église
(cf. Jc 5, 15) ; c’est l’épiclèse propre de ce sacrement ;
ils donnent alors l’onction avec l’huile bénite, si possible, par
l’évêque.
Ces actions liturgiques indiquent quelle grâce ce
sacrement confère aux malades.
IV. Les effets de la célébration de ce sacrement
1520 Un don particulier de l’Esprit Saint.
La grâce première de ce sacrement est une grâce de réconfort, de
paix et de courage pour vaincre les difficultés propres à l’état de
maladie grave ou à la fragilité de la vieillesse. Cette grâce est un
don du Saint-Esprit qui renouvelle la confiance et la foi en Dieu et
fortifie contre les tentations du malin, tentation de découragement et
d’angoisse de la mort (cf. He 2, 15). Cette assistance du Seigneur par
la force de son Esprit veut conduire le malade à la guérison de l’âme,
mais aussi à celle du corps, si telle est la volonté de Dieu (cf. Cc.
Florence : DS 1325). En outre, " s’il a commis des péchés,
ils lui seront remis " (Jc 5, 15 ; cf. Cc. Trente :
DS 1717).
1521 L’union à la Passion du Christ.
Par la grâce de ce sacrement, le malade reçoit la force et le don de
s’unir plus intimement à la Passion du Christ : il est d’une
certaine façon consacré pour porter du fruit par la
configuration à la Passion rédemptrice du Sauveur. La souffrance, séquelle
du péché originel, reçoit un sens nouveau : elle devient
participation à l’œuvre salvifique de Jésus.
1522 Une grâce ecclésiale. Les malades
qui reçoivent ce sacrement, " en s’associant librement à
la Passion et à la mort du Christ ", apportent " leur
part pour le bien du peuple de Dieu " (LG 11). En célébrant
ce sacrement, l’Église, dans la communion des saints, intercède pour
le bien du malade. Et le malade, à son tour, par la grâce de ce
sacrement, contribue à la sanctification de l’Église et au bien de
tous les hommes pour lesquels l’Église souffre et s’offre, par le
Christ, à Dieu le Père.
1523 Une préparation au dernier passage.
Si le sacrement de l’Onction des malades est accordé à tous ceux qui
souffrent de maladies et d’infirmités graves, il l’est à plus
forte raison à ceux qui sont sur le point de sortir de cette vie (In
exitu vitæ constituti : Cc. Trente : DS 1698), de sorte
qu’on l’a aussi appelé sacramentum exeuntium (ibid.).
L’Onction des malades achève de nous conformer à la mort et à la résurrection
du Christ, comme le Baptême avait commencé de le faire. Elle parachève
les onctions saintes qui jalonnent toute la vie chrétienne ; celle
du Baptême avait scellé en nous la vie nouvelle ; celle de la
Confirmation nous avait fortifiés pour le combat de cette vie. Cette
dernière onction munit la fin de notre vie terrestre comme d’un
solide rempart en vue des dernières luttes avant l’entrée dans la
Maison du Père (ibid. : DS 1694).
V. Le Viatique, dernier sacrement du chrétien
1524 A ceux qui vont quitter cette vie, l’Église
offre, en plus de l’Onction des malades, l’Eucharistie comme
viatique. Reçue à ce moment de passage vers le Père, la Communion au
Corps et au Sang du Christ a une signification et une importance
particulières. Elle est semence de vie éternelle et puissance de résurrection,
selon les paroles du Seigneur : " Celui qui mange ma
chair et boit mon sang a la vie éternelle et moi, je le ressusciterai
au dernier jour " (Jn 6, 54). Sacrement du Christ mort et
ressuscité, l’Eucharistie est ici sacrement du passage de la mort à
la vie, de ce monde vers le Père (cf. Jn 13, 1).
1525 Ainsi, comme les sacrements du Baptême, de
la Confirmation et de l’Eucharistie constituent une unité appelée
" les sacrements de l’initiation chrétienne ", on
peut dire que la Pénitence, la Sainte Onction et l’Eucharistie, en
tant que viatique, constituent, quand la vie chrétienne touche à son
terme, " les sacrements qui préparent à la Patrie "
ou les sacrements qui achèvent la pérégrination.
En bref
1526 " Quelqu’un parmi vous est-il
malade ? Qu’il appelle les presbytres de l’Église et
qu’ils prient sur lui, après l’avoir oint d’huile au nom du
Seigneur. La prière de la foi sauvera le patient, et le Seigneur le
relèvera. S’il a commis des péchés, ils lui seront remis "
(Jc 5, 14-15).
1527 Le sacrement de l’Onction des malades a pour
but de conférer une grâce spéciale au chrétien qui éprouve les
difficultés inhérentes à l’état de maladie grave ou à la
vieillesse.
1528 Le temps opportun pour recevoir la Sainte
Onction est certainement arrivé lorsque le fidèle commence à se
trouver en danger de mort pour cause de maladie ou de vieillesse.
1529 Chaque fois qu’un chrétien tombe gravement
malade, il peut recevoir la Sainte Onction, de même lorsqu’après
l’avoir reçue la maladie s’aggrave.
1530 Seuls les prêtres (presbytres et évêques)
peuvent donner le sacrement de l’Onction des malades ; pour le
conférer ils emploient de l’huile bénite par l’Evêque, ou, au
besoin, par le presbytre célébrant lui-même.
1531 L’essentiel de la célébration de ce
sacrement consiste en l’onction sur le front et les mains du malade
(dans le rite romain) ou sur d’autres parties du corps (en Orient),
onction accompagnée de la prière liturgique du prêtre célébrant
qui demande la grâce spéciale de ce sacrement.
1532 La grâce spéciale
du Sacrement de l’Onction des malades a comme effets :
– l’union du malade à la Passion du Christ,
pour son bien et pour celui de toute l’Église ;
– le réconfort, la paix et le courage pour
supporter chrétiennement les souffrances de la maladie ou de la
vieillesse ;
– le pardon des péchés si le malade n’a pas
pu l’obtenir par le sacrement de la Pénitence ;
– le rétablissement de la santé, si cela
convient au salut spirituel ;
– la préparation au passage à la vie éternelle.
CHAPITRE TROISIÈME
LES SACREMENTS DU SERVICE DE LA COMMUNION
1533 Le Baptême, la Confirmation et
l’Eucharistie sont les sacrements de l’initiation chrétienne. Ils
fondent la vocation commune de tous les disciples du Christ, vocation à
la sainteté et à la mission d’évangéliser le monde. Ils confèrent
les grâces nécessaires pour la vie selon l’Esprit en cette vie de pèlerins
en marche vers la patrie.
1534 Deux autres sacrements, l’Ordre et le
Mariage, sont ordonnés au salut d’autrui. S’ils contribuent également
au salut personnel, c’est à travers le service des autres qu’ils le
font. Ils confèrent une mission particulière dans l’Église et
servent à l’édification du peuple de Dieu.
1535 En ces sacrements, ceux qui ont été déjà
consacrés par le Baptême et la Confirmation (cf. LG 10) pour le
sacerdoce commun de tous les fidèles, peuvent recevoir des consécrations
particulières. Ceux qui reçoivent le sacrement de l’Ordre sont consacrés
pour être, au nom du Christ, " par la parole et la grâce de
Dieu les pasteurs de l’Église " (LG 11). De leur côté,
" les époux chrétiens, pour accomplir dignement les devoirs
de leur état, sont fortifiés et comme consacrés par un
sacrement spécial " (GS 48, 2).
ARTICLE 6
LE SACREMENT DE L’ORDRE
1536 L’Ordre est le sacrement grâce auquel la
mission confiée par le Christ à ses Apôtres continue à être exercée
dans l’Église jusqu’à la fin des temps : il est donc le
sacrement du ministère apostolique. Il comporte trois degrés :
l’épiscopat, le presbytérat et le diaconat.
[Sur l’institution et la mission du ministère
apostolique par le Christ v. N. 871 s. Ici, il n’est question que de
la voie sacramentelle par laquelle est transmis ce ministère]
I. Pourquoi ce nom de sacrement de l’ordre ?
1537 Le mot Ordre, dans l’antiquité
romaine, désignait des corps constitués au sens civil, surtout le
corps de ceux qui gouvernent. Ordinatio désigne l’intégration
dans un ordo. Dans l’Église, il y a des corps constitués que
la Tradition, non sans fondements dans l’Écriture Sainte (cf. He 5, 6 ;
7, 11 ; Ps 110, 4), appelle dès les temps anciens du nom de taxeis
(en grec), d’ordines : ainsi la liturgie parle de l’ordo
episcoporum, de l’ordo presbyterorum, de l’ordo
diaconorum. D’autres groupes, reçoivent aussi ce nom d’ordo :
les catéchumènes, les vierges, les époux, les veuves...
1538 L’intégration dans un de ces corps de
l’Église se faisait par un rite appelé ordinatio, acte
religieux et liturgique, qui était une consécration, une bénédiction
ou un sacrement. Aujourd’hui le mot ordinatio est réservé à
l’acte sacramentel qui intègre dans l’ordre des évêques, des
presbytres et des diacres et qui va au delà d’une simple élection,
désignation, délégation ou institution par la
communauté, car elle confère un don du Saint-Esprit permettant
d’exercer un " pouvoir sacré " (sacra potestas :
cf. LG 10) qui ne peut venir que du Christ lui-même, par son Église.
L’ordination est aussi appelée consecratio car elle est une
mise à part et une investiture par le Christ lui-même, pour son Église.
L’imposition des mains de l’évêque, avec la prière consécratoire,
constituent le signe visible de cette consécration.
II. Le sacrement de l’Ordre dans l’économie
du salut
Le sacerdoce de l’Ancienne Alliance
1539 Le peuple élu fut constitué par Dieu comme
" un royaume de prêtres et une nation consacrée "
(Ex 19, 6 ; cf. Is 61, 6). Mais au-dedans du peuple d’Israël,
Dieu choisit l’une des douze tribus, celle de Lévi, mise à part pour
le service liturgique (cf. Nb 1, 48-53) ; Dieu lui-même est sa
part d’héritage (cf. Jos 13, 33). Un rite propre a consacré les
origines du sacerdoce de l’Ancienne Alliance (cf. Ex 29, 1-30 ;
Lv 8). Les prêtres y sont " établis pour intervenir en
faveur des hommes dans leur relations avec Dieu, afin d’offrir dons et
sacrifices pour les péchés " (cf. He 5, 1)
1540 Institué pour annoncer la parole de Dieu
(cf. Ml 2, 7-9) et pour rétablir la communion avec Dieu par les
sacrifices et la prière, ce sacerdoce reste pourtant impuissant à opérer
le salut, ayant besoin de répéter sans cesse les sacrifices, et ne
pouvant aboutir à une sanctification définitive (cf. He 5, 3 ; 7,
27 ; 10, 1-4), que seul devait opérer le sacrifice du Christ.
1541 La liturgie de l’Église voit cependant
dans le sacerdoce d’Aaron et le service des lévites, tout comme dans
l’institution des soixante-dix " Anciens " (cf. Nb
11, 24-25), des préfigurations du ministère ordonné de la Nouvelle
Alliance. Ainsi, dans le rite latin, l’Église prie dans la préface
consécratoire de l’ordination des évêques :
Dieu et Père de Jésus Christ notre Seigneur,
(...) tout au long de l’ancienne Alliance tu commençais à donner
forme à ton Église ; dès l’origine, tu as destiné le
peuple issu d’Abraham à devenir un peuple saint ; tu as
institué des chefs et des prêtres et toujours pourvu au service de
ton sanctuaire ... (Pontificale Romanum. De Ordinatione Episcopi,
presbyterorum et diaconorum 47 ; ed. typica altera,
Polyglotte Vaticane 1990 p. 24)
1542 Lors de l’ordination
des prêtres, l’Église prie :
" Seigneur, Père très saint, ... déjà
dans l’Ancienne Alliance, et comme pour annoncer les sacrements à
venir, tu avais mis à la tête du peuple des grands prêtres chargés
de le conduire, mais tu as aussi choisi d’autres hommes que tu as
associés à leur service et qui les ont secondés dans leur tâche.
C’est ainsi que tu as communiqué à soixante-dix hommes, pleins
de sagesse, l’esprit que tu avais donné à Moïse, et tu as fait
participer les fils d’Aaron à la consécration que leur père
avait reçue " (ibid n. 159 p. 91-92).
1543 Et dans la prière consécratoire pour
l’ordination des diacres, l’Église confesse :
" Père très saint ... , pour l’édification
de ce temple nouveau (l’Église), tu as établi des ministres des
trois ordres différents, les évêques, les prêtres et les
diacres, chargés, les uns et les autres, de te servir, comme
autrefois, dans l’Ancienne Alliance, pour le service de ta
demeure, tu avais mis à part les fils de la tribu de Lévi et tu étais
leur héritage " (ibid n. 207).
L’unique sacerdoce du Christ
1544 Toutes les préfigurations du sacerdoce de
l’Ancienne Alliance trouvent leur accomplissement dans le Christ Jésus
" unique médiateur entre Dieu et les hommes " (1 Tm
2, 5). Melchisédech, " prêtre du Dieu Très Haut "
(Gn 14, 18), est considéré par la Tradition chrétienne comme une préfiguration
du sacerdoce du Christ, unique " Grand prêtre selon l’ordre
de Melchisédech " (He 5, 10 ; 6, 20), " saint,
innocent, immaculé " (He 7, 26), qui, " par une
oblation unique a rendu parfaits pour toujours ceux qu’il sanctifie "
(He 10, 14), c’est-à-dire par l’unique sacrifice de sa Croix.
1545 Le sacrifice rédempteur du Christ est
unique, accompli une fois pour toutes. Et pourtant, il est rendu présent
dans le sacrifice eucharistique de l’Église. Il en est de même de
l’unique sacerdoce du Christ : il est rendu présent par le
sacerdoce ministériel sans que soit diminuée l’unicité du sacerdoce
du Christ : " Aussi le Christ est-Il le seul vrai prêtre,
les autres n’étant que ses ministres " (S. Thomas d’A.,
Hebr. 7, 4).
Deux participations à l’unique sacerdoce du Christ
1546 Le Christ, grand prêtre et unique médiateur,
a fait de l’Église " un Royaume de prêtres pour son Dieu
et Père " (Ap 1, 6 ; cf. Ap 5, 9-10 ; 1 P 2, 5. 9).
Toute la communauté des croyants est, comme telle, sacerdotale. Les fidèles
exercent leur sacerdoce baptismal à travers leur participation, chacun
selon sa vocation propre, à la mission du Christ, Prêtre, Prophète et
Roi. C’est par les sacrements du Baptême et de la Confirmation que
les fidèles sont " consacrés pour être ... un sacerdoce
saint " (LG 10).
1547 Le sacerdoce ministériel ou hiérarchique
des évêques et des prêtres, et le sacerdoce commun de tous les fidèles,
bien que " l’un et l’autre, chacun selon son mode propre,
participent de l’unique sacerdoce du Christ " (LG 10), diffèrent
cependant essentiellement, tout en étant " ordonnés l’un
à l’autre " (LG 10). En quel sens ? Alors que le
sacerdoce commun des fidèles se réalise dans le déploiement de la grâce
baptismale, vie de foi, d’espérance et de charité, vie selon
l’Esprit, le sacerdoce ministériel est au service du sacerdoce
commun, il est relatif au déploiement de la grâce baptismale de tous
les chrétiens. Il est un des moyens par lesquels le Christ ne
cesse de construire et de conduire son Église. C’est pour cela
qu’il est transmis par un sacrement propre, le sacrement de l’Ordre.
En la personne du Christ-Tête (In persona Christi
Capitis)...
1548 Dans le service ecclésial du ministre
ordonné, c’est le Christ lui-même qui est présent à son Église en
tant que Tête de son corps, Pasteur de son troupeau, grand prêtre du
sacrifice rédempteur, Maître de la Vérité. C’est ce que l’Église
exprime en disant que le prêtre, en vertu du sacrement de l’Ordre,
agit in persona Christi Capitis (cf. LG 10 ; 28 ; SC 33 ;
CD 11 ; PO 2 ; 6) :
C’est le même Prêtre, le Christ Jésus, dont
en vérité le ministre tient le rôle. Si, en vérité, celui-ci
est assimilé au Souverain Prêtre, à cause de la consécration
sacerdotale qu’il a reçue, il jouit du pouvoir d’agir par la
puissance du Christ lui-même qu’il représente (virtute ac
persona ipsius Christi) (Pie XII, enc. " Mediator Dei ").
Le Christ est la source de tout le sacerdoce :
car le prêtre de l’ancienne loi était figure du Christ et le prêtre
de la nouvelle agit en la personne du Christ (S. Thomas d’A., s.
th. 3, 22 , 4).
1549 Par le ministère ordonné, spécialement
des évêques et des prêtres, la présence du Christ comme chef de l’Église,
est rendue visible au milieu de la communauté des croyants (cf. LG 21).
Selon la belle expression de S. Ignace d’Antioche, l’évêque est typos
tou Patros, il est comme l’image vivante de Dieu le Père (Trall.
3, 1 ; cf. Magn. 6, 1).
1550 Cette présence du Christ dans le ministre
ne doit pas être comprise comme si celui-ci était prémuni contre
toutes les faiblesses humaines, l’esprit de domination, les erreurs,
voire le péché. La force de l’Esprit Saint ne garantit pas de la même
manière tous les actes des ministres. Tandis que dans les sacrements
cette garantie est donnée, de sorte que même le péché du ministre ne
peut empêcher le fruit de grâce, il existe beaucoup d’autres actes où
l’empreinte humaine du ministre laisse des traces qui ne sont pas
toujours le signe de la fidélité à l’Evangile, et qui peuvent nuire
par conséquent à la fécondité apostolique de l’Église.
1551 Ce sacerdoce est ministériel. " Cette
charge, confiée par le Seigneur aux pasteurs de son peuple, est un véritable
service " (LG 24). Il est entièrement référé au
Christ et aux hommes. Il dépend entièrement du Christ et de son
sacerdoce unique, et il a été institué en faveur des hommes et de la
communauté de l’Église. Le sacrement de l’Ordre communique " un
pouvoir sacré ", qui n’est autre que celui du Christ.
L’exercice de cette autorité doit donc se mesurer d’après le modèle
du Christ qui par amour s’est fait le dernier et le serviteur de tous
(cf. Mc 10, 43-45 ; 1 P 5, 3). " Le Seigneur a dit
clairement que le soin apporté à son troupeau était une preuve
d’amour pour Lui " (S. Jean Chrysostome, sac. 2, 4 : PG
48, 635 D ; cf. Jn 21, 15-17).
" Au nom de toute l’Église "
1552 Le sacerdoce ministériel n’a pas
seulement pour tâche de représenter le Christ – Tête de l’Église
– face à l’assemblée des fidèles, il agit aussi au nom de toute
l’Église lorsqu’il présente à Dieu la prière de l’Église (cf.
SC 33) et surtout lorsqu’il offre le sacrifice eucharistique (cf. LG
10).
1553 " Au nom de toute l’Église ",
cela ne veut pas dire que les prêtres soient les délégués de la
communauté. La prière et l’offrande de l’Église sont inséparables
de la prière et de l’offrande du Christ, son Chef. C’est toujours
le culte du Christ dans et par son Église. C’est toute l’Église,
corps du Christ, qui prie et qui s’offre, " per ipsum et cum
ipso et in ipso ", dans l’unité du Saint-Esprit, à Dieu le
Père. Tout le corps, " caput et membra ", prie et
s’offre, et c’est pourquoi ceux qui, dans le corps, en sont spécialement
les ministres, sont appelés ministres non seulement du Christ, mais
aussi de l’Église. C’est parce que le sacerdoce ministériel représente
le Christ qu’il peut représenter l’Église.
III. Les trois degrés du sacrement de l’ordre
1554 " Le ministère ecclésiastique,
institué par Dieu, est exercé dans la diversité des ordres par ceux
que déjà depuis l’antiquité on appelle évêques, prêtres, diacres "
(LG 28). La doctrine catholique, exprimée dans la liturgie, le magistère
et la pratique constante de l’Église, reconnaît qu’il existe deux
degrés de participation ministérielle au sacerdoce du Christ :
l’épiscopat et le presbytérat. Le diaconat est destiné à les aider
et à les servir. C’est pourquoi le terme sacerdos désigne,
dans l’usage actuel, les évêques et les prêtres, mais non pas les
diacres. Néanmoins, la doctrine catholique enseigne que les degrés de
participation sacerdotale (épiscopat et presbytérat) et le degré de
service (diaconat) sont tous les trois conférés par un acte
sacramentel appelé " ordination ", c’est-à-dire
par le sacrement de l’Ordre :
Que tous révèrent les diacres comme Jésus-Christ,
comme aussi l’évêque, qui est l’image du Père, et les
presbytres comme le sénat de Dieu et comme l’assemblée des apôtres :
sans eux on ne peut parler d’Église (S. Ignace d’Antioche,
Trall. 3, 1).
L’ordination épiscopale – plénitude du
sacrement de l’Ordre
1555 " Parmi les différents ministères
qui s’exercent dans l’Église depuis les premiers temps, la première
place, au témoignage de la Tradition, appartient à la fonction de ceux
qui, établis dans l’épiscopat, dont la ligne se continue depuis les
origines, sont les sarments par lesquels se transmet la semence
apostolique " (LG 20).
1556 Pour remplir leur haute mission, " les
apôtres furent enrichis par le Christ d’une effusion spéciale de
l’Esprit Saint descendant sur eux ; eux-mêmes, par
l’imposition des mains, transmirent à leurs collaborateurs le don
spirituel qui s’est communiqué jusqu’à nous à travers la consécration
épiscopale " (LG 21).
1557 Le deuxième Concile du Vatican " enseigne
que, par la consécration épiscopale, est conférée la plénitude
du sacrement de l’Ordre, que la coutume liturgique de l’Église
et la voix des saints Pères désignent en effet sous le nom de
sacerdoce suprême, de réalité totale (summa) du ministère
sacré " (Ibid.).
1558 " La consécration épiscopale, en
même temps que la charge de sanctifier, confère aussi des charges
d’enseigner et de gouverner ... En effet, ... par l’imposition des
mains et par les paroles de la consécration, la grâce de l’Esprit
Saint est donnée et le caractère sacré imprimé, de telle sorte que
les évêques, d’une façon éminente et visible, tiennent la place du
Christ lui-même, Maître, Pasteur et Pontife et jouent son rôle (in
Eius persona agant) " (ibid.). " Aussi, par
l’Esprit Saint qui leur a été donné, les évêques ont-ils été
constitués de vrais et authentiques maîtres de la foi, pontifes et
pasteurs " (CD 2).
1559 " C’est en vertu de la consécration
sacramentelle et par la communion hiérarchique avec le chef du collège
et ses membres que quelqu’un est fait membre du corps épiscopal "
(LG 22). Le caractère et la nature collégiale de l’ordre épiscopal
se manifestent entre autres dans l’antique pratique de l’Église qui
veut que pour la consécration d’un nouvel évêque plusieurs évêques
participent au sacre (cf. ibid). Pour l’ordination légitime d’un Evêque,
une intervention spéciale de l’Evêque de Rome est requise
aujourd’hui, en raison de sa qualité de lien suprême visible de la
communion des Églises particulières dans l’Église une et de garant
de leur liberté.
1560 Chaque évêque a, comme vicaire du Christ,
la charge pastorale de l’Église particulière qui lui a été confiée,
mais en même temps il porte collégialement avec tous ses frères dans
l’épiscopat la sollicitude pour toutes les Églises :
" Si chaque évêque n’est pasteur propre que de la portion
du troupeau confiée à ses soins, sa qualité de légitime successeur
des Apôtres par institution divine le rend solidairement responsable de
la mission apostolique de l’Église " (Pie XII, enc. " Fidei
donum " ; cf. LG 23 ; CD 4 ; 36 ; 37 ;
AG 5 ; 6 ; 38).
1561 Tout ce qu’on vient de dire explique
pourquoi l’Eucharistie célébrée par l’évêque a une
signification toute spéciale comme expression de l’Église réunie
autour de l’autel sous la présidence de celui qui représente
visiblement le Christ, Bon Pasteur et Tête de son Église (cf. SC 41 ;
LG 26).
L’ordination des presbytres – coopérateurs des
évêques
1562 " Le Christ, que le Père a
consacré et envoyé dans le monde, a, par les apôtres, fait leurs
successeurs, c’est-à-dire les évêques, participants de sa consécration
et de sa mission. A leur tour, les évêques ont légitimement transmis,
à divers membres de l’Église, et suivant des degrés divers, la
charge de leur ministère " (LG 28). " Leur fonction
ministérielle a été transmise aux prêtres à un degré subordonné :
ceux-ci sont établis dans l’Ordre du presbytérat pour être les
coopérateurs de l’Ordre épiscopal dans
l’accomplissement de la mission apostolique confiée par le Christ "
(PO 2).
1563 " La fonction des prêtres, en
tant qu’elle est unie à l’Ordre épiscopal, participe à
l’autorité par laquelle le Christ lui-même construit, sanctifie et
gouverne son Corps. C’est pourquoi le sacerdoce des prêtres, s’il
suppose les sacrements de l’initiation chrétienne, est cependant conféré
au moyen du sacrement particulier qui, par l’onction du Saint-Esprit,
les marque d’un caractère spécial, et les configure ainsi au Christ
Prêtre pour les rendre capables d’agir au nom du Christ Tête en
personne " (PO 2).
1564 " Tout en n’ayant pas charge
suprême du pontificat et tout en dépendant des évêques dans
l’exercice de leur pouvoir, les prêtres leur sont cependant unis dans
la dignité sacerdotale ; et par la vertu du sacrement de
l’Ordre, à l’image du Christ prêtre suprême et éternel (cf. He
5, 1-10 ; 7, 24 ; 9, 11-28) ils sont consacrés pour prêcher
l’Evangile, pour être les pasteurs des fidèles et pour célébrer le
culte divin en vrais prêtres du Nouveau Testament "
(LG 28).
1565 En vertu du sacrement de l’Ordre les prêtres
participent aux dimensions universelles de la mission confiée par le
Christ aux Apôtres. Le don spirituel qu’ils ont reçu dans
l’ordination les prépare, non pas à une mission limitée et
restreinte, " mais à une mission de salut d’ampleur
universelle, ‘jusqu’aux extrémités de la terre’ "(PO
10), " prêts au fond du cœur à prêcher l’Evangile en
quelque lieu que ce soit " (OT 20).
1566 " C’est dans le culte ou synaxe
eucharistique que s’exerce par excellence leur charge sacrée :
là, tenant la place du Christ et proclamant son mystère, ils joignent
les demandes des fidèles au sacrifice de leur chef, rendant présent et
appliquant dans le sacrifice de la messe, jusqu’à ce que le Seigneur
vienne, l’unique sacrifice du Nouveau Testament, celui du Christ
s’offrant une fois pour toutes à son Père en victime immaculée "
(LG 28). De ce sacrifice unique, tout leur ministère sacerdotal
tire sa force (cf. PO 2).
1567 " Coopérateurs avisés de
l’ordre épiscopal dont ils sont l’aide et l’instrument, appelés
à servir le peuple de Dieu, les prêtres constituent, avec leur évêque,
un seul presbyterium aux fonctions diverses. En chaque lieu où
se trouve une communauté de fidèles, ils rendent d’une certaine façon
présent l’évêque auquel ils sont associés d’un cœur confiant et
généreux, assumant pour leur part ses charges et sa sollicitude, et
les mettant en œuvre dans leur souci quotidien des fidèles "
(LG 28). Les prêtres ne peuvent exercer leur ministère qu’en dépendance
de l’évêque et en communion avec lui. La promesse d’obéissance
qu’ils font à l’évêque au moment de l’ordination et le baiser
de paix de l’évêque à la fin de la liturgie de l’ordination
signifient que l’évêque les considère comme ses collaborateurs, ses
fils, ses frères et ses amis, et qu’en retour ils lui doivent amour
et obéissance.
1568 " Du fait de leur ordination, qui
les a fait entrer dans l’ordre du presbytérat, les prêtres sont tous
intimement liés entre eux par la fraternité sacramentelle ; mais,
du fait de leur affectation au service d’un diocèse en dépendance de
l’évêque local, ils forment tout spécialement à ce niveau un
presbyterium unique " (PO 8). L’unité du presbyterium
trouve une expression liturgique dans l’usage qui veut que les
presbytres imposent à leur tour les mains, après l’évêque, pendant
le rite de l’ordination.
L’ordination des diacres – " en vue du
service "
1569 " Au degré inférieur de la hiérarchie,
se trouvent les diacres auxquels on a imposé les mains ‘non pas en
vue du sacerdoce, mais en vue du service’ " (LG 29 ;
cf. CD 15). Pour l’ordination au diaconat, seul l’évêque impose
les mains, signifiant ainsi que le diacre est spécialement rattaché à
l’évêque dans les tâches de sa " diaconie "
(cf. S. Hippolyte, trad. ap. 8).
1570 Les diacres participent d’une façon spéciale
à la mission et à la grâce du Christ (cf. LG 41 ; AA 16). Le
sacrement de l’Ordre les marque d’une empreinte (" caractère ")
que nul ne peut faire disparaître et qui les configure au Christ qui
s’est fait le " diacre ", c’est-à-dire le
serviteur de tous (cf. Mc 10, 45 ; Lc 22, 27 ; S. Polycarpe,
ep. 5, 2). Il appartient entre autres aux diacres d’assister l’évêque
et les prêtres dans la célébration des divins mystères, surtout de
l’Eucharistie, de la distribuer, d’assister au mariage et de le bénir,
de proclamer l’Evangile et de prêcher, de présider aux funérailles
et de se consacrer aux divers services de la charité (cf. LG 29 ;
SC 35, § 4 ; AG 16).
1571 Depuis le deuxième Concile du Vatican, l’Église
latine a rétabli le diaconat " en tant que degré propre et
permanent de la hiérarchie " (LG 29), alors que les Églises
d’Orient l’avaient toujours maintenu. Ce diaconat permanent,
qui peut être conféré à des hommes mariés, constitue un
enrichissement important pour la mission de l’Église. En effet, il
est approprié et utile que des hommes qui accomplissent dans l’Église
un ministère vraiment diaconal, soit dans la vie liturgique et
pastorale, soit dans les œuvres sociales et caritatives " soient
fortifiés par l’imposition des mains transmise depuis les apôtres et
plus étroitement unis à l’autel, pour qu’ils s’acquittent de
leur ministère plus efficacement, au moyen de la grâce sacramentelle
du diaconat " (AG 16).
IV. La célébration de ce sacrement
1572 La célébration de l’ordination d’un évêque,
de prêtres ou de diacres, de par son importance pour la vie de l’Église
particulière, réclame le concours du plus grand nombre possible de fidèles.
Elle aura lieu de préférence le dimanche et à la cathédrale, avec
une solennité adaptée à la circonstance. Les trois ordinations, de
l’évêque, du prêtre et du diacre, suivent le même mouvement. Leur
place est au sein de la liturgie eucharistique.
1573 Le rite essentiel du sacrement de
l’Ordre est constitué, pour les trois degrés, de l’imposition des
mains par l’évêque sur la tête de l’ordinand ainsi que de la prière
consécratoire spécifique qui demande à Dieu l’effusion de
l’Esprit Saint et de ses dons appropriés au ministère pour lequel le
candidat est ordonné (cf. Pie XII, const. ap. " Sacramentum
Ordinis " : DS 3858).
1574 Comme dans tous les sacrements, des rites
annexes entourent la célébration. Variant fortement dans les différentes
traditions liturgiques, ils ont en commun d’exprimer les multiples
aspects de la grâce sacramentelle. Ainsi, les rites initiaux, dans le
rite latin, – la présentation et l’élection de l’ordinand,
l’allocution de l’évêque, l’interrogatoire de l’ordinand, les
litanies des saints – attestent que le choix du candidat s’est fait
conformément à l’usage de l’Église et préparent l’acte
solennel de la consécration, après laquelle plusieurs rites viennent
exprimer et achever d’une manière symbolique le mystère qui s’est
accompli : pour l’évêque et le prêtre l’onction du saint chrême,
signe de l’onction spéciale du Saint-Esprit qui rend fécond leur
ministère ; remise du livre des Évangiles, de l’anneau, de la
mitre et de la crosse à l’évêque en signe de sa mission apostolique
d’annonce de la Parole de Dieu, de sa fidélité à l’Église, épouse
du Christ, de sa charge de pasteur du troupeau du Seigneur ; remise
au prêtre de la patène et du calice, " l’offrande du
peuple saint " qu’il est appelé à présenter à Dieu ;
remise du livre des Évangiles au diacre qui vient de recevoir mission
d’annoncer l’Evangile du Christ.
V. Qui peut conférer ce sacrement ?
1575 C’est le Christ qui a choisi les Apôtres
et leur a donné part à sa mission et à son autorité. Élevé à la
droite du Père, il n’abandonne pas son troupeau, mais le garde par
les Apôtres sous sa constante protection et le dirige encore par ces mêmes
pasteurs qui continuent aujourd’hui son œuvre (cf. MR, Préface des
Apôtres). C’est donc le Christ " qui donne " aux
uns d’être apôtres, aux autres, pasteurs (cf. Ep 4, 11). Il continue
d’agir par les évêques (cf. LG 21).
1576 Puisque le sacrement de l’Ordre est le
sacrement du ministère apostolique, il revient aux évêques en tant
que successeurs des Apôtres, de transmettre " le don
spirituel " (LG 21), " la semence apostolique "
(LG 20). Les évêques validement ordonnés, c’est-à-dire qui sont
dans la ligne de la succession apostolique, confèrent validement les
trois degrés du sacrement de l’Ordre (cf. DS 794 et 802 ; CIC,
can. 1012 ; CCEO, can. 744 ; 747).
VI. Qui peut recevoir ce sacrement ?
1577 " Seul un homme (vir)
baptisé reçoit validement l’ordination sacrée " (CIC,
can. 1024). Le Seigneur Jésus a choisi des hommes (viri) pour
former le collège des douze apôtres (cf. Mc 3, 14-19 ; Lc 6,
12-16), et les apôtres ont fait de même lorsqu’ils ont choisi les
collaborateurs (cf. 1 Tm 3, 1-13 ; 2 Tm 1, 6 ; Tt 1, 5-9) qui
leur succèderaient dans leur tâche (S. Clément de Rome, Cor. 42, 4 ;
44, 3). Le collège des évêques, avec qui les prêtres sont unis dans
le sacerdoce, rend présent et actualise jusqu’au retour du Christ le
collège des douze. L’Église se reconnaît liée par ce choix du
Seigneur lui-même. C’est pourquoi l’ordination des femmes n’est
pas possible (cf. MD 26-27 ; CDF, décl. " Inter
insigniores ").
1578 Nul n’a un droit à recevoir le
sacrement de l’Ordre. En effet, nul ne s’arroge à soi-même cette
charge. On y est appelé par Dieu (cf. He 5, 4). Celui qui croit reconnaître
les signes de l’appel de Dieu au ministère ordonné, doit soumettre
humblement son désir à l’autorité de l’Église à laquelle
revient la responsabilité et le droit d’appeler quelqu’un à
recevoir les ordres. Comme toute grâce, ce sacrement ne peut être reçu
que comme un don immérité.
1579 Tous les ministres ordonnés de l’Église
latine, à l’exception des diacres permanents, sont normalement
choisis parmi les hommes croyants qui vivent en célibataires et qui ont
la volonté de garder le célibat " en vue du Royaume
des cieux " (Mt 19, 12). Appelés à se consacrer sans partage
au Seigneur et à " ses affaires " (cf. 1 Co 7, 32),
ils se donnent tout entier à Dieu et aux hommes. Le célibat est un
signe de cette vie nouvelle au service de laquelle le ministre de l’Église
est consacré ; accepté d’un cœur joyeux, il annonce de façon
rayonnante le Règne de Dieu (cf. PO 16).
1580 Dans les Églises Orientales, depuis des siècles,
une discipline différente est en vigueur : alors que les évêques
sont choisis uniquement parmi les célibataires, des hommes mariés
peuvent être ordonnés diacres et prêtres. Cette pratique est depuis
longtemps considérée comme légitime ; ces prêtres exercent un
ministère fructueux au sein de leurs communautés (cf. PO 16).
D’ailleurs, le célibat des prêtres est très en honneur dans les Églises
Orientales, et nombreux sont les prêtres qui l’ont choisi librement,
pour le Royaume de Dieu. En Orient comme en Occident, celui qui a reçu
le sacrement de l’Ordre ne peut plus se marier.
VII. Les effets du sacrement de l’Ordre
Le caractère indélébile
1581 Ce sacrement configure au Christ par une grâce
spéciale de l’Esprit Saint, en vue de servir d’instrument du Christ
pour son Église. Par l’ordination l’on est habilité à agir comme
représentant du Christ, Tête de l’Église, dans sa triple fonction
de prêtre, prophète et roi.
1582 Comme dans le cas du Baptême et de la
Confirmation, cette participation à la fonction du Christ est accordée
une fois pour toutes. Le sacrement de l’Ordre confère, lui aussi, un caractère
spirituel indélébile et il ne peut pas être réitéré ni être
conféré temporairement (cf. Cc. Trente : DS 1767 ; LG 21 ;
28 ; 29 ; PO 2).
1583 Un sujet validement ordonné peut, certes,
pour de graves motifs, être déchargé des obligations et des fonctions
liées à l’ordination ou être interdit de les exercer (cf. CIC, can.
290-293 ; 1336, § 1, 3°. 5° ; 1338, § 2), mais il ne peut
plus redevenir laïc au sens strict (cf. Cc. Trente : DS 1774) car
le caractère imprimé par l’ordination l’est pour toujours. La
vocation et la mission reçues au jour de son ordination le marquent
d’une façon permanente.
1584 Puisque en fin de compte c’est le Christ
qui agit et opère le salut à travers le ministre ordonné,
l’indignité de celui-ci n’empêche pas le Christ d’agir (cf. Cc.
Trente : DS 1612 ; DS 1154). S. Augustin le dit avec force :
Quant au ministre orgueilleux, il est à ranger avec
le diable. Le don du Christ n’en est pas pour autant profané, ce qui
s’écoule à travers lui garde sa pureté, ce qui passe par lui reste
limpide et vient jusqu’à la terre fertile. ... La vertu spirituelle
du sacrement est en effet pareille à la lumière : ceux qui
doivent être éclairés la reçoivent dans sa pureté et, si elle
traverse des êtres souillés, elle ne se souille pas (Augustin, ev. Jo.
5, 15).
La grâce du Saint-Esprit
1585 La grâce du Saint-Esprit propre à ce
sacrement est celle d’une configuration au Christ Prêtre, Maître et
Pasteur dont l’ordonné est constitué le ministre.
1586 Pour l’évêque, c’est d’abord une grâce
de force (" L’Esprit qui fait chefs " : Prière
de consécration de l’évêque du rite latin – Pontificale
Romanum. De Ordinatione Episcopi, presbyterorum et diaconorum, 47) :
celle de guider et de défendre avec force et prudence son Église comme
un père et un pasteur, avec un amour gratuit pour tous et une prédilection
pour les pauvres, les malades et les nécessiteux (cf. CD 13 et 16).
Cette grâce le pousse à annoncer l’Evangile à tous, à être le modèle
de son troupeau, à le précéder sur le chemin de la sanctification en
s’identifiant dans l’Eucharistie avec le Christ Prêtre et Victime,
sans craindre de donner sa vie pour ses brebis :
Accorde, Père qui connais les cœurs, à ton
serviteur que tu as choisi pour l’épiscopat, qu’il fasse paître
ton saint troupeau et qu’il exerce à ton égard le souverain
sacerdoce sans reproche, en te servant nuit et jour ; qu’il
rende sans cesse ton visage propice et qu’il offre les dons de ta
sainte Église ; qu’il ait en vertu de l’esprit du
souverain sacerdoce le pouvoir de remettre les péchés suivant ton
commandement, qu’il distribue les charges suivant ton ordre et
qu’il délie de tout lien en vertu du pouvoir que tu as donné aux
apôtres ; qu’il te plaise par sa douceur et son cœur pur,
en t’offrant un parfum agréable, par ton Enfant Jésus-Christ ...
(S. Hippolyte, trad. ap. 3).
1587 Le don spirituel que confère l’ordination
presbytérale est exprimé par cette prière propre au rite byzantin.
L’évêque, en imposant la main, dit entre autres :
Seigneur, remplis du don du Saint-Esprit celui
que tu as daigné élever au degré du sacerdoce afin qu’il soit
digne de se tenir sans reproche devant ton autel, d’annoncer
l’Evangile de ton Royaume, d’accomplir le ministère de ta
parole de vérité, de t’offrir des dons et des sacrifices
spirituels, de renouveler ton peuple par le bain de la régénération ;
de sorte que lui-même aille à la rencontre de notre grand Dieu et
Sauveur Jésus-Christ, ton Fils unique, au jour de son second avènement,
et qu’il reçoive de ton immense bonté la récompense d’une fidèle
administration de son ordre (Liturgia Byzantina. 2 oratio
chirotoniae presbyteralis, Euchologion, [Roma 1873] p. 136).
1588 Quant aux diacres, " la grâce
sacramentelle leur donne la force nécessaire de servir le peuple de
Dieu dans la ‘diaconie’ de la liturgie, de la parole et de la charité,
en communion avec l’évêque et son presbyterium " (LG 29).
1589 Devant la grandeur de la grâce et de la
charge sacerdotales, les saints docteurs ont ressenti l’urgent appel
à la conversion afin de correspondre par toute leur vie à Celui dont
le sacrement les constitue les ministres. Ainsi, S. Grégoire de
Nazianze, tout jeune prêtre, s’écrie :
Il faut commencer par se purifier avant de
purifier les autres ; il faut être instruit pour pouvoir
instruire ; il faut devenir lumière pour éclairer,
s’approcher de Dieu pour en rapprocher les autres, être sanctifié
pour sanctifier, conduire par la main et conseiller avec
intelligence (Or. 2, 71 : PG 35, 480B ; Or. 2, 74 :
PG 46, 481B ; Or. 2, 73 : PG 35, 481A). Je sais de qui
nous sommes les ministres, à quel niveau nous nous trouvons et quel
est celui vers lequel nous nous dirigeons. Je connais la hauteur de
Dieu et la faiblesse de l’homme, mais aussi sa force (ibid., 74).
[Qui est donc le prêtre ? Il est] le défenseur de la vérité,
il se dresse avec les anges, il glorifie avec les archanges, il fait
monter sur l’autel d’en haut les victimes des sacrifices, il
partage le sacerdoce du Christ, il remodèle la créature, il rétablit
[en elle] l’image [de Dieu], il la recrée pour le monde d’en
haut, et, pour dire ce qu’il y a de plus grand, il est divinisé
et il divinise (ibid., 73).
Et le saint Curé d’Ars : " C’est
le prêtre qui continue l’œuvre de rédemption sur la terre "
... " Si l’on comprenait bien le prêtre sur la terre,
on mourrait non de frayeur, mais d’amour " ... " Le
Sacerdoce, c’est l’amour du cœur de Jésus " (Nodet,
Jean-Marie Vianney 100).
En bref
1590 S. Paul dit à son disciple Timothée :
" Je t’invite à raviver le don que Dieu a déposé en
toi par l’imposition de mes mains " (2 Tm 1, 6), et
" celui qui aspire à la charge d’évêque, désire une
noble fonction " (1 Tm 3, 1). A Tite, il disait :
" Si je t’ai laissé en Crète, c’est pour y achever
l’organisation, et pour établir dans chaque ville des presbytres,
conformément à mes instructions " (Tt 1, 5).
1591 Toute l’Église est un peuple sacerdotal.
Grâce au Baptême, tous les fidèles participent au sacerdoce du
Christ. Cette participation s’appelle " sacerdoce commun
des fidèles ". Sur sa base et à son service existe une
autre participation à la mission du Christ ; celle du ministère
conféré par le sacrement de l’Ordre, dont la tâche est de
servir au nom et en la personne du Christ-Tête au milieu de la
communauté.
1592 Le sacerdoce ministériel diffère
essentiellement du sacerdoce commun des fidèles parce qu’il confère
un pouvoir sacré pour le service des fidèles. Les ministres ordonnés
exercent leur service auprès du peuple de Dieu par l’enseignement
(munus docendi), le culte divin (munus liturgicum) et
par le gouvernement pastoral (munus regendi).
1593 Depuis les origines, le ministère ordonné
a été conféré et exercé à trois degrés : celui des Évêques,
celui des presbytres et celui des diacres. Les ministères conférés
par l’ordination sont irremplaçables pour la structure organique
de l’Église : Sans l’Evêque, les presbytres et les
diacres, on ne peut parler d’Église (cf. S. Ignace d’Antioche,
Trall. 3,1).
1594 L’Evêque reçoit la plénitude du
sacrement de l’Ordre qui l’insère dans le Collège épiscopal
et fait de lui le chef visible de l’Église particulière qui lui
est confiée. Les Évêques, en tant que successeurs des Apôtres et
membres du Collège, ont part à la responsabilité apostolique et
à la mission de toute l’Église sous l’autorité du Pape,
successeur de S. Pierre.
1595 Les presbytres sont unis aux évêques dans
la dignité sacerdotale et en même temps dépendent d’eux dans
l’exercice de leur fonctions pastorales ; ils sont
appelés à être les coopérateurs avisés des Évêques ; ils
forment autour de leur Evêque le " presbyterium "
qui porte avec lui la responsabilité de l’Église particulière.
Ils reçoivent de l’évêque la charge d’une communauté
paroissiale ou d’une fonction ecclésiale déterminée.
1596 Les diacres sont des ministres ordonnés
pour les tâches de service de l’Église ; ils ne reçoivent
pas le sacerdoce ministériel, mais l’ordination leur confère des
fonctions importantes dans le ministère de la Parole, du culte
divin, du gouvernement pastoral et du service de la charité, tâches
qu’ils doivent accomplir sous l’autorité pastorale de leur Evêque.
1597 Le sacrement de l’Ordre est conféré par
l’imposition des mains suivie d’une prière consécratoire
solennelle qui demande à Dieu pour l’ordinand les grâces du
Saint Esprit requises pour son ministère. L’ordination imprime un
caractère sacramentel indélébile.
1598 L’Église confère le sacrement de
l’Ordre seulement à des hommes (viris) baptisés, dont les
aptitudes pour l’exercice du ministère ont été dûment
reconnues. C’est à l’autorité de l’Église que revient la
responsabilité et le droit d’appeler quelqu’un à recevoir les
ordres.
1599 Dans l’Église latine, le sacrement de
l’Ordre pour le presbytérat n’est conféré normalement qu’à
des candidats qui sont prêts à embrasser librement le célibat et
qui manifestent publiquement leur volonté de le garder pour
l’amour du Royaume de Dieu et du service des hommes.
1600 Il revient aux Évêques de conférer le
sacrement de l’Ordre dans les trois degrés.
ARTICLE 7
LE SACREMENT DU MARIAGE
1601 " L’alliance matrimoniale, par
laquelle un homme et une femme constituent entre eux une communauté de
toute la vie, ordonnée par son caractère naturel au bien des conjoints
ainsi qu’à la génération et à l’éducation des enfants, a été
élevée entre baptisés par le Christ Seigneur à la dignité de
sacrement " (CIC, can. 1055, § 1).
I. Le Mariage dans le dessein de Dieu
1602 L’Écriture Sainte s’ouvre sur la création
de l’homme et de la femme à l’image et à la ressemblance de Dieu
(cf. Gn 1, 26-27) et s’achève sur la vision des " noces de
l’Agneau " (Ap 19, 7. 9). D’un bout à l’autre l’Écriture
parle du mariage et de son " mystère ", de son
institution et du sens que Dieu lui a donné, de son origine et de sa
fin, de ses réalisations diverses tout au long de l’histoire du
salut, de ses difficultés issues du péché et de son renouvellement
" dans le Seigneur " (1 Co 7, 39), dans l’Alliance
nouvelle du Christ et de l’Église (cf. Ep 5, 31-32).
Le mariage dans l’ordre de la création
1603 " La communauté profonde de vie
et d’amour que forme le couple a été fondée et dotée de ses lois
propres par le Créateur. Dieu lui-même est l’auteur du mariage "
(GS 48, § 1). La vocation au mariage est inscrite dans la nature même
de l’homme et de la femme, tels qu’ils sont issus de la main du Créateur.
Le mariage n’est pas une institution purement humaine, malgré les
variations nombreuses qu’il a pu subir au cours des siècles, dans les
différentes cultures, structures sociales et attitudes spirituelles.
Ces diversités ne doivent pas faire oublier les traits communs et
permanents. Bien que la dignité de cette institution ne transparaisse
pas partout avec la même clarté (cf. GS 47, § 2), il existe cependant
dans toutes les cultures un certain sens pour la grandeur de l’union
matrimoniale. " Car le bien-être de la personne et de la société
est étroitement lié à la prospérité de la communauté conjugale et
familiale " (GS 47, § 1).
1604 Dieu qui a créé l’homme par amour, l’a
aussi appelé à l’amour, vocation fondamentale et innée de tout être
humain. Car l’homme est créé à l’image et à la ressemblance du
Dieu (cf. Gn 1, 27) qui est lui-même Amour (cf. 1 Jn 4, 8. 16). Dieu
l’ayant créé homme et femme, leur amour mutuel devient une image de
l’amour absolu et indéfectible dont Dieu aime l’homme. Il est bon,
très bon, aux yeux du Créateur (cf. Gn 1, 31). Et cet amour que Dieu bénit
est destiné à être fécond et à se réaliser dans l’œuvre commune
de la garde de la création : " Et Dieu les bénit et il
leur dit : ‘Soyez féconds, multipliez-vous, remplissez la terre
et soumettez-la’ " (Gn 1, 28).
1605 Que l’homme et la femme soient créés
l’un pour l’autre, l’Écriture Sainte l’affirme : " Il
n’est pas bon que l’homme soit seul " (Gn 2, 18). La
femme, " chair de sa chair " (cf. Gn 2, 23), son égale,
toute proche de lui, lui est donnée par Dieu comme un " secours "
(cf. Gn 2, 18), représentant ainsi le " Dieu en qui est notre
secours " (cf. Ps 121, 2). " C’est pour cela que
l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme,
et les deux deviennent une seule chair " (Gn 2, 24). Que cela
signifie une unité indéfectible de leur deux vies, le Seigneur lui-même
le montre en rappelant quel a été, " à l’origine ",
le dessein du Créateur (cf. Mt 19, 4) : " Ainsi, ils ne
sont plus deux, mais une seule chair " (Mt 19, 6).
Le mariage sous le régime du péché
1606 Tout homme fait l’expérience du mal,
autour de lui et en lui-même. Cette expérience se fait aussi sentir
dans les relations entre l’homme et la femme. De tout temps, leur
union a été menacée par la discorde, l’esprit de domination,
l’infidélité, la jalousie et par des conflits qui peuvent aller
jusqu’à la haine et la rupture. Ce désordre peut se manifester de façon
plus ou moins aiguë, et il peut être plus ou moins surmonté, selon
les cultures, les époques, les individus, mais il semble bien avoir un
caractère universel.
1607 Selon la foi, ce désordre que nous
constatons douloureusement, ne vient pas de la nature de
l’homme et de la femme, ni de la nature de leurs relations, mais du péché.
Rupture avec Dieu, le premier péché a comme première conséquence la
rupture de la communion originelle de l’homme et de la femme. Leurs
relations sont distordues par des griefs réciproques (cf. Gn 3, 12) ;
leur attrait mutuel, don propre du créateur (cf. Gn 2, 22), se change
en rapports de domination et de convoitise (cf. Gn 3, 16 b) ; la
belle vocation de l’homme et de la femme d’être féconds, de se
multiplier et de soumettre la terre (cf. Gn 1, 28) est grevée des
peines de l’enfantement et du gagne-pain (cf. Gn 3, 16-19).
1608 Pourtant, l’ordre de la création
subsiste, même s’il est gravement perturbé. Pour guérir les
blessures du péché, l’homme et la femme ont besoin de l’aide de la
grâce que Dieu, dans sa miséricorde infinie, ne leur a jamais refusée
(cf. Gn 3, 21). Sans cette aide, l’homme et la femme ne peuvent
parvenir à réaliser l’union de leurs vies en vue de laquelle Dieu
les a créés " au commencement ".
Le mariage sous la pédagogie de la Loi
1609 Dans sa miséricorde, Dieu n’a pas
abandonné l’homme pécheur. Les peines qui suivent le péché, les
douleurs de l’enfantement (cf. Gn 3, 16), le travail " à la
sueur de ton front " (Gn 3, 19), constituent aussi des remèdes
qui limitent les méfaits du péché. Après la chute, le mariage aide
à vaincre le repliement sur soi-même, l’égoïsme, la quête du
propre plaisir, et à s’ouvrir à l’autre, à l’aide mutuelle, au
don de soi.
1610 La conscience morale concernant l’unité
et l’indissolubilité du mariage s’est développée sous la pédagogie
de la Loi ancienne. La polygamie des patriarches et des rois n’est pas
encore explicitement critiquée. Cependant, la Loi donnée à Moïse
vise à protéger la femme contre l’arbitraire d’une domination par
l’homme, même si elle porte aussi, selon la parole du Seigneur, les
traces de " la dureté du cœur " de l’homme en
raison de laquelle Moïse a permis la répudiation de la femme (cf. Mt
19, 8 ; Dt 24, 1).
1611 En voyant l’Alliance de Dieu avec Israël
sous l’image d’un amour conjugal exclusif et fidèle (cf. Os 1-3 ;
Is 54 ; 62 ; Jr 2-3 ; 31 ; Ez 16 ; 23), les
prophètes ont préparé la conscience du Peuple élu à une
intelligence approfondie de l’unicité et de l’indissolubilité du
mariage (cf. Ml 2, 13-17). Les livres de Ruth et de Tobie donnent des témoignages
émouvants du sens élevé du mariage, de la fidélité et de la
tendresse des époux. La Tradition a toujours vu dans le Cantique des
Cantiques une expression unique de l’amour humain en tant qu’il est
reflet de l’amour de Dieu, amour " fort comme la mort "
que " les torrents d’eau ne peuvent éteindre "
(Ct 8, 6-7).
Le mariage dans le Seigneur
1612 L’alliance nuptiale entre Dieu et son
peuple Israël avait préparé l’alliance nouvelle et éternelle dans
laquelle le Fils de Dieu, en s’incarnant et en donnant sa vie, s’est
uni d’une certaine façon toute l’humanité sauvée par lui (cf. GS
22), préparant ainsi " les noces de l’Agneau "
(Ap 19, 7. 9).
1613 Au seuil de sa vie publique, Jésus opère
son premier signe – à la demande de sa Mère – lors d’une fête
de mariage (cf. Jn 2, 1-11). L’Église accorde une grande importance
à la présence de Jésus aux noces de Cana. Elle y voit la confirmation
de la bonté du mariage et l’annonce que désormais le mariage sera un
signe efficace de la présence du Christ.
1614 Dans sa prédication, Jésus a enseigné
sans équivoque le sens originel de l’union de l’homme et de la
femme, telle que le Créateur l’a voulue au commencement : la
permission, donnée par Moïse, de répudier sa femme, était une
concession à la dureté du cœur (cf. Mt 19, 8) ; l’union
matrimoniale de l’homme et de la femme est indissoluble : Dieu
lui-même l’a conclue : " Que l’homme ne sépare donc
pas ce que Dieu a uni " (Mt 19, 6).
1615 Cette insistance sans équivoque sur
l’indissolubilité du lien matrimonial a pu laisser perplexe et apparaître
comme une exigence irréalisable (cf. Mt 19, 10). Pourtant Jésus n’a
pas chargé les époux d’un fardeau impossible à porter et trop lourd
(cf. Mt 11, 29-30), plus pesant que la Loi de Moïse. En venant rétablir
l’ordre initial de la création perturbé par le péché, il donne
lui-même la force et la grâce pour vivre le mariage dans la dimension
nouvelle du Règne de Dieu. C’est en suivant le Christ, en renonçant
à eux-mêmes, en prenant leurs croix sur eux (cf. Mc 8, 34) que les époux
pourront " comprendre " (cf. Mt 19, 11) le sens
originel du mariage et le vivre avec l’aide du Christ. Cette grâce du
Mariage chrétien est un fruit de la Croix du Christ, source de toute
vie chrétienne.
1616 C’est ce que l’Apôtre Paul fait saisir
en disant : " Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a
aimé l’Église ; il s’est livré pour elle, afin de la
sanctifier " (Ep 5, 25-26), en ajoutant aussitôt :
" ’Voici donc que l’homme quittera son père et sa mère
pour s’attacher à sa femme, et les deux ne feront qu’une seule
chair’ : ce mystère est de grande portée ; je veux dire
qu’il s’applique au Christ et à l’Église " (Ep 5,
31-32).
1617 Toute la vie chrétienne porte la marque de
l’amour sponsal du Christ et de l’Église. Déjà le Baptême, entrée
dans le peuple de Dieu, est un mystère nuptial : il est, pour
ainsi dire, le bain de noces (cf. Ep 5, 26-27) qui précède le repas de
noces, l’Eucharistie. Le Mariage chrétien devient à son tour signe
efficace, sacrement de l’alliance du Christ et de l’Église.
Puisqu’il en signifie et communique la grâce, le mariage entre baptisés
est un vrai sacrement de la Nouvelle Alliance (cf. DS 1800 ; CIC,
can. 1055, § 2).
La virginité pour le Royaume
1618 Le Christ est le centre de toute vie chrétienne.
Le lien avec Lui prend la première place devant tous les autres liens,
familiaux ou sociaux (cf. Lc 14, 26 ; Mc 10, 28-31). Dès le début
de l’Église, il y a eu des hommes et des femmes qui ont renoncé au
grand bien du mariage pour suivre l’Agneau partout où il va (cf. Ap
14, 4), pour se soucier des choses du Seigneur, pour chercher à Lui
plaire (cf. 1 Co 7, 32), pour aller au devant de l’Epoux qui vient
(cf. Mt 25, 6). Le Christ lui-même a invité certains à le suivre en
ce mode de vie dont Il demeure le modèle :
Il y a des eunuques qui le sont de naissance, dès
le sein de leur mère ; il y a aussi des eunuques qui le sont
devenus par la main des hommes ; et il y en a qui se sont faits
eunuques eux-mêmes à cause du Royaume des cieux. Que celui qui
peut comprendre, comprenne (Mt 19, 12).
1619 La virginité pour le Royaume des Cieux est
un déploiement de la grâce baptismale, un signe puissant de la prééminence
du lien au Christ, de l’attente ardente de son retour, un signe qui
rappelle aussi que le mariage est une réalité de l’éon présent qui
passe (cf. Mc 12, 25 ; 1 Co 7, 31).
1620 Les deux, le sacrement du Mariage et la
virginité pour le Royaume de Dieu, viennent du Seigneur lui-même.
C’est Lui qui leur donne sens et leur accorde la grâce indispensable
pour les vivre conformément à sa volonté (cf. Mt 19, 3-12).
L’estime de la virginité pour le Royaume (cf. LG 42 ; PC 12 ;
OT 10) et le sens chrétien du Mariage sont inséparables et se
favorisent mutuellement :
Dénigrer le mariage, c’est amoindrir du même
coup la gloire de la virginité ; en faire l’éloge, c’est
rehausser l’admiration qui est due à la virginité ... Car enfin,
ce qui ne paraît un bien que par comparaison avec un mal ne peut être
vraiment un bien, mais ce qui est mieux encore que des biens
incontestés est le bien par excellence (S. Jean Chrysostome, virg.
10, 1 : PG 48, 540A) ; cf. FC 16).
II. La célébration du mariage
1621 Dans le rite latin, la célébration du
mariage entre deux fidèles catholiques a normalement lieu au cours de
la Sainte Messe, en raison du lien de tous les sacrements avec le Mystère
Pascal du Christ (cf. SC 61). Dans l’Eucharistie se réalise le mémorial
de la Nouvelle Alliance, en laquelle le Christ s’est uni pour toujours
à l’Église, son épouse bien-aimée pour laquelle il s’est livré
(cf. LG 6). Il est donc convenable que les époux scellent leur
consentement à se donner l’un à l’autre par l’offrande de leurs
propres vies, en l’unissant à l’offrande du Christ pour son Église,
rendue présente dans le sacrifice eucharistique, et en recevant
l’Eucharistie, afin que, communiant au même Corps et au même Sang du
Christ, ils " ne forment qu’un corps " dans le
Christ (cf. 1 Co 10, 17).
1622 " En tant que geste sacramentel de
sanctification, la célébration liturgique du mariage ... doit être
par elle-même valide, digne et fructueuse " (FC 67). Il
convient donc que les futurs époux se disposent à la célébration de
leur mariage en recevant le sacrement de pénitence.
1623 Selon la tradition latine, ce sont les époux
qui, comme ministres de la grâce du Christ, se confèrent mutuellement
le sacrement du Mariage en exprimant devant l’Église leur
consentement. Dans la tradition des Eglises orientales, les prêtres ou
évêques qui officient sont les témoins du consentement mutuel échangé
par les époux (cf. CCEO, can. 817), mais leur bénédiction est nécessaire
aussi à la validité du sacrement (cf. CCEO, can. 828).
1624 Les diverses liturgies sont riches en prières
de bénédiction et d’épiclèse demandant à Dieu sa grâce et la bénédiction
sur le nouveau couple, spécialement sur l’épouse. Dans l’épiclèse
de ce sacrement les époux reçoivent l’Esprit Saint comme Communion
d’amour du Christ et de l’Église (cf. Ep 5, 32). C’est Lui le
sceau de leur alliance, la source toujours offerte de leur amour, la
force où se renouvellera leur fidélité.
III. Le consentement matrimonial
1625 Les protagonistes de l’alliance
matrimoniale sont un homme et une femme baptisés, libres de contracter
le mariage et qui expriment librement leur consentement. " Etre
libre " veut dire :
– ne pas subir de contrainte ;
– ne pas être empêché par une loi naturelle ou
ecclésiastique.
1626 L’Église considère l’échange des
consentements entre les époux comme l’élément indispensable " qui
fait le mariage " (CIC, can. 1057, § 1). Si le consentement
manque, il n’y a pas de mariage.
1627 Le consentement consiste en un " acte
humain par lequel les époux se donnent et se reçoivent mutuellement "
(GS 48, § 1 ; cf. CIC, can. 1057, § 2) : " Je te
prends comme ma femme " – " Je te prends comme mon
mari " (OcM 45). Ce consentement qui lie les époux entre eux,
trouve son accomplissement en ce que les deux " deviennent une
seule chair " (cf. Gn 2, 24 ; Mc 10, 8 ; Ep 5, 31).
1628 Le consentement doit être un acte de la
volonté de chacun des contractants, libre de violence ou de crainte
grave externe (cf. CIC, can. 1103). Aucun pouvoir humain ne peut se
substituer à ce consentement (CIC, can. 1057, § 1). Si cette liberté
manque, le mariage est invalide.
1629 Pour cette raison (ou pour d’autres
raisons qui rendent nul et non avenu le mariage : cf. CIC, can.
1095-1107), l’Église peut, après examen de la situation par le
tribunal ecclésiastique compétent, déclarer " la nullité
du mariage ", c’est-à-dire que le mariage n’a jamais
existé. En ce cas, les contractants sont libres de se marier, quitte à
se tenir aux obligations naturelles d’une union antérieure (cf. CIC,
can. 1071).
1630 Le prêtre (ou le diacre) qui assiste à la
célébration du mariage, accueille le consentement des époux au nom de
l’Église et donne la bénédiction de l’Église. La présence du
ministre de l’Église (et aussi des témoins) exprime visiblement que
le mariage est une réalité ecclésiale.
1631 C’est pour cette raison que l’Église
demande normalement pour ses fidèles la forme ecclésiastique
de la conclusion du mariage (cf. Cc. Trente : DS 1813-1816 ;
CIC, can. 1108). Plusieurs raisons concourent à expliquer cette détermination :
– Le mariage sacramentel est un acte liturgique.
Il est dès lors convenable qu’il soit célébré dans la liturgie
publique de l’Église.
– Le mariage introduit dans un ordo ecclésial,
il crée des droits et des devoirs dans l’Église, entre les époux et
envers les enfants.
– Puisque le mariage est un état de vie dans l’Église,
il faut qu’il y ait certitude sur le mariage (d’où l’obligation
d’avoir des témoins).
– Le caractère public du consentement protège le
" Oui " une fois donné et aide à y rester fidèle.
1632 Pour que le " Oui " des
époux soit un acte libre et responsable, et pour que l’alliance
matrimoniale ait des assises humaines et chrétiennes solides et
durables, la préparation au mariage est de première importance :
L’exemple et l’enseignement donnés par les
parents et par les familles restent le chemin privilégié de cette préparation.
Le rôle des pasteurs et de la communauté chrétienne
comme " famille de Dieu " est indispensable pour la
transmission des valeurs humaines et chrétiennes du mariage et de la
famille (cf. CIC, can. 1063), et ceci d’autant plus qu’à notre époque
beaucoup de jeunes connaissent l’expérience des foyers brisés qui
n’assurent plus suffisamment cette initiation :
Il faut instruire à temps les jeunes, et de manière
appropriée, de préférence au sein de la famille, sur la dignité
de l’amour conjugal, sa fonction, son exercice : ainsi formés
à la chasteté, ils pourront, le moment venu, s’engager dans le
mariage après des fiançailles vécues dans la dignité (GS 49, §
3).
Les mariages mixtes et la disparité de culte
1633 Dans de nombreux pays, la situation du mariage
mixte (entre catholique et baptisé non-catholique) se présente de
façon assez fréquente. Elle demande une attention particulière des
conjoints et des pasteurs. Le cas des mariages avec disparité de
culte (entre catholique et non-baptisé) une circonspection plus
grande encore.
1634 La différence de confession entre les
conjoints ne constitue pas un obstacle insurmontable pour le mariage,
lorsqu’ils parviennent à mettre en commun ce que chacun d’eux a reçu
dans sa communauté, et à apprendre l’un de l’autre la façon dont
chacun vit sa fidélité au Christ. Mais les difficultés des mariages
mixtes ne doivent pas non plus être sous-estimées. Elles sont dues au
fait que la séparation des chrétiens n’est pas encore surmontée.
Les époux risquent de ressentir le drame de la désunion des chrétiens
au sein même de leur foyer. La disparité de culte peut encore aggraver
ces difficultés. Des divergences concernant la foi, la conception même
du mariage, mais aussi des mentalités religieuses différentes, peuvent
constituer une source de tensions dans le mariage, principalement à
propos de l’éducation des enfants. Une tentation peut se présenter
alors : l’indifférence religieuse.
1635 D’après le droit en vigueur dans l’Église
latine, un mariage mixte a besoin, pour sa licéité, de la permission
expresse de l’autorité ecclésiastique (cf. CIC, can. 1124). En
cas de disparité de culte une dispense expresse de
l’empêchement est requise pour la validité du mariage (cf. CIC, can.
1086). Cette permission ou cette dispense supposent que les deux parties
connaissent et n’excluent pas les fins et les propriétés
essentielles du mariage et aussi que la partie catholique confirme ses
engagements, portés aussi à la connaissance explicite de la partie non
catholique, de conserver sa foi et d’assurer le baptême et l’éducation
des enfants dans l’Église catholique (cf. CIC, can. 1125).
1636 Dans beaucoup de régions, grâce au
dialogue œcuménique, les communautés chrétiennes concernées ont pu
mettre sur pied une pastorale commune pour les mariages mixtes.
Sa tâche est d’aider ces couples à vivre leur situation particulière
à la lumière de la foi. Elle doit aussi les aider à surmonter les
tensions entre les obligations des conjoints l’un envers l’autre et
envers leurs communautés ecclésiales. Elle doit encourager l’épanouissement
de ce qui leur est commun dans la foi, et le respect de ce qui les sépare.
1637 Dans les mariages avec disparité de culte
l’époux catholique a une tâche particulière : " Car
le mari non croyant se trouve sanctifié par sa femme, et la femme non
croyante se trouve sanctifiée par le mari croyant " (1 Co 7,
14). C’est une grande joie pour le conjoint chrétien et pour l’Église
si cette " sanctification " conduit à la conversion
libre de l’autre conjoint à la foi chrétienne (cf. 1 Co 7, 16).
L’amour conjugal sincère, la pratique humble et patiente des vertus
familiales et la prière persévérante peuvent préparer le conjoint
non croyant à accueillir la grâce de la conversion.
IV. Les effets du sacrement du Mariage
1638 " Du mariage valide naît entre
les conjoints un lien de par sa nature perpétuel et exclusif ;
en outre, dans le mariage chrétien, les conjoints sont fortifiés et
comme consacrés par un sacrement spécial pour les devoirs et la
dignité de leur état " (CIC, can. 1134).
Le lien matrimonial
1639 Le consentement par lequel les époux se
donnent et s’accueillent mutuellement, est scellé par Dieu lui-même
(cf. Mc 10, 9). De leur alliance " une institution, que la
loi divine confirme, naît ainsi, au regard même de la société "
(GS 48, § 1). L’alliance des époux est intégrée dans l’alliance
de Dieu avec les hommes : " L’authentique amour
conjugal est assumé dans l’amour divin " (GS 48, § 2).
1640 Le lien matrimonial est donc établi
par Dieu lui-même, de sorte que le mariage conclu et consommé entre
baptisés ne peut jamais être dissout. Ce lien qui résulte de l’acte
humain libre des époux et de la consommation du mariage, est une réalité
désormais irrévocable et donne origine à une alliance garantie par la
fidélité de Dieu. Il n’est pas au pouvoir de l’Église de se
prononcer contre cette disposition de la sagesse divine (cf. CIC, can.
1141).
La grâce du sacrement du Mariage
1641 " En leur état de vie et dans
leur ordre, [les époux chrétiens] ont dans le peuple de Dieu leurs
dons propres " (LG 11). Cette grâce propre du sacrement du
Mariage est destinée à perfectionner l’amour des conjoints, à
fortifier leur unité indissoluble. Par cette grâce " ils
s’aident mutuellement à se sanctifier dans la vie conjugale, dans
l’accueil et l’éducation des enfants " (LG 11 ; cf.
LG 41).
1642 Le Christ est la source de cette grâce.
" De même que Dieu prit autrefois l’initiative d’une
alliance d’amour et de fidélité avec son peuple, ainsi, maintenant,
le Sauveur des hommes, Epoux de l’Église, vient à la rencontre des
époux chrétiens par le sacrement du Mariage " (GS 48, § 2).
Il reste avec eux, il leur donne la force de le suivre en prenant leur
croix sur eux, de se relever après leurs chutes, de se pardonner
mutuellement, de porter les uns les fardeaux des autres (cf. Ga 6, 2),
d’être " soumis les uns aux autres dans la crainte du
Christ " (Ep 5, 21) et de s’aimer d’un amour surnaturel, délicat
et fécond. Dans les joies de leur amour et de leur vie familiale il
leur donne, dès ici-bas, un avant-goût du festin des noces de
l’Agneau :
Où vais-je puiser la force de décrire de manière
satisfaisante le bonheur du mariage que l’Église ménage, que
confirme l’offrande, que scelle la bénédiction ; les anges
le proclament, le Père céleste le ratifie... Quel couple que celui
de deux chrétiens, unis par une seule espérance, un seul désir,
une seule discipline, le même service ! Tous deux enfants
d’un même Père, serviteurs d’un même Maître ; rien ne
les sépare, ni dans l’esprit ni dans la chair ; au
contraire, ils sont vraiment deux en une seule chair. Là où la
chair est une, un aussi est l’esprit (Tertullien, ux. 2, 9 ;
cf. FC 13).
V. Les biens et les exigences de l’amour
conjugal
1643 " L’amour conjugal comporte une
totalité où entrent toutes les composantes de la personne – appel du
corps et de l’instinct, force du sentiment et de l’affectivité,
aspiration de l’esprit et de la volonté – ; il vise une unité
profondément personnelle, celle qui, au-delà de l’union en une seule
chair, conduit à ne faire qu’un cœur et qu’une âme ; il
exige l’indissolubilité et la fidélité dans la
donation réciproque définitive ; et il s’ouvre sur la fécondité.
Il s’agit bien des caractéristiques normales de tout amour
conjugal naturel, mais avec une signification nouvelle qui, non
seulement les purifie et les consolide, mais les élève au point d’en
faire l’expression de valeurs proprement chrétiennes " (FC
13).
L’unité et l’indissolubilité du mariage
1644 L’amour des époux exige, par sa nature même,
l’unité et l’indissolubilité de leur communauté de personnes qui
englobe toute leur vie : " ainsi ils ne sont plus deux,
mais une seule chair " (Mt 19, 6 ; cf. Gn 2, 24). " Ils
sont appelés à grandir sans cesse dans leur communion à travers la
fidélité quotidienne à la promesse du don mutuel total que comporte
le mariage " (FC 19). Cette communion humaine est confirmée,
purifiée et parachevée par la communion en Jésus-Christ donnée par
le sacrement de Mariage. Elle s’approfondit par la vie de la foi
commune et par l’Eucharistie reçue en commun.
1645 " L’égale dignité personnelle
qu’il faut reconnaître à la femme et à l’homme dans l’amour plénier
qu’ils se portent l’un à l’autre fait clairement apparaître
l’unité du mariage, confirmée par le Seigneur " (GS 49, §
2). La polygamie est contraire à cette égale dignité et à
l’amour conjugal qui est unique et exclusif (cf. FC 19).
La fidélité de l’amour conjugal
1646 L’amour conjugal exige des époux, de par
sa nature même, une fidélité inviolable. Ceci est la conséquence du
don d’eux-mêmes que se font l’un à l’autre les époux. L’amour
veut être définitif. Il ne peut être " jusqu’à nouvel
ordre ". " Cette union intime, don réciproque de
deux personnes, non moins que le bien des enfants, exigent l’entière
fidélité des époux et requièrent leur indissoluble unité "
(GS 48, § 1).
1647 Le motif le plus profond se trouve dans la
fidélité de Dieu à son alliance, du Christ à son Église. Par le
sacrement de mariage les époux sont habilités à représenter cette
fidélité et à en témoigner. Par le sacrement, l’indissolubilité
du mariage reçoit un sens nouveau et plus profond.
1648 Il peut paraître difficile, voire
impossible, de se lier pour la vie à un être humain. Il est d’autant
plus important d’annoncer la bonne nouvelle que Dieu nous aime d’un
amour définitif et irrévocable, que les époux ont part à cet amour,
qu’il les porte et les soutient, et que par leur fidélité ils
peuvent être les témoins de l’amour fidèle de Dieu. Les époux qui,
avec la grâce de Dieu, donnent ce témoignage, souvent dans des
conditions bien difficiles, méritent la gratitude et le soutien de la
communauté ecclésiale (cf. FC 20).
1649 Il existe cependant des situations où la
cohabitation matrimoniale devient pratiquement impossible pour des
raisons très diverses. En de tels cas, l’Église admet la séparation
physique des époux et la fin de la cohabitation. Les époux ne
cessent pas d’être mari et femme devant Dieu ; ils ne sont pas
libres de contracter une nouvelle union. En cette situation difficile,
la solution la meilleure serait, si possible, la réconciliation. La
communauté chrétienne est appelée à aider ces personnes à vivre chrétiennement
leur situation, dans la fidélité au lien de leur mariage qui reste
indissoluble (cf. FC 83 ; CIC, can.
1151-1155).
1650 Nombreux sont aujourd’hui, dans bien des
pays, les catholiques qui ont recours au divorce selon les
lois civiles et qui contractent civilement une nouvelle union.
L’Église maintient, par fidélité à la parole de Jésus Christ
(" Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre, commet
un adultère à l’égard de la première ; et si une femme répudie
son mari et en épouse un autre, elle commet un adultère " :
Mc 10, 11-12), qu’elle ne peut reconnaître comme valide une nouvelle
union, si le premier mariage l’était. Si les divorcés sont remariés
civilement, ils se trouvent dans une situation qui contrevient
objectivement à la loi de Dieu. Dès lors ils ne peuvent pas accéder
à la communion eucharistique, aussi longtemps que persiste cette
situation. Pour la même raison ils ne peuvent pas exercer certaines
responsabilités ecclésiales. La réconciliation par le sacrement de pénitence
ne peut être accordée qu’à ceux qui se sont repentis d’avoir violé
le signe de l’Alliance et de la fidélité au Christ, et se sont engagés
à vivre dans une continence complète.
1651 A l’égard des chrétiens qui vivent en
cette situation et qui souvent gardent la foi et désirent élever chrétiennement
leurs enfants, les prêtres et toute la communauté doivent faire preuve
d’une sollicitude attentive, afin qu’ils ne se considèrent pas
comme séparés de l’Église, à la vie de laquelle ils peuvent et
doivent participer en tant que baptisés :
On les invitera à écouter la Parole de Dieu, à
assister au Sacrifice de la messe, à persévérer dans la prière,
à apporter leur contribution aux œuvres de charité et aux
initiatives de la communauté en faveur de la justice, à élever
leurs enfants dans la foi chrétienne, à cultiver l’esprit de pénitence
et à en accomplir les actes, afin d’implorer, jour après jour,
la grâce de Dieu (FC 84).
L’ouverture à la fécondité
1652 " C’est par sa nature même que
l’institution du mariage et l’amour conjugal sont ordonnés à la
procréation et à l’éducation qui, tel un sommet, en constituent le
couronnement " (GS 48, § 1) :
Les enfants sont le don le plus excellent du
mariage et ils contribuent grandement au bien des parents eux-mêmes.
Dieu lui-même qui a dit : " Il n’est pas bon que
l’homme soit seul " (Gn 2, 18) et qui " dès
l’origine a fait l’être humain homme et femme " (Mt
19, 4), a voulu lui donner une participation spéciale dans son œuvre
créatrice ; aussi a-t-il béni l’homme et la femme, disant :
" Soyez féconds et multipliez-vous " (Gn 1,
28). Dès lors, un amour conjugal vrai et bien compris, comme toute
la structure de la vie familiale qui en découle, tendent, sans
sous-estimer pour autant les autres fins du mariage, à rendre les
époux disponibles pour coopérer courageusement à l’amour du Créateur
et du Sauveur qui, par eux, veut sans cesse agrandir et enrichir sa
propre famille (GS 50, § 1).
1653 La fécondité de l’amour conjugal s’étend
aux fruits de la vie morale, spirituelle et surnaturelle que les parents
transmettent à leurs enfants par l’éducation. Les parents sont les
principaux et premiers éducateurs de leurs enfants (cf. GE 3). En ce
sens, la tâche fondamentale du mariage et de la famille est d’être
au service de la vie (cf. FC 28).
1654 Les époux auxquels Dieu n’a pas donné
d’avoir des enfants, peuvent néanmoins avoir une vie conjugale pleine
de sens, humainement et chrétiennement. Leur mariage peut rayonner
d’une fécondité de charité, d’accueil et de sacrifice.
VI. L’Église domestique
1655 Le Christ a voulu naître et grandir au sein
de la Sainte Famille de Joseph et de Marie. L’Église n’est autre
que la " famille de Dieu ". Dès ses origines, le
noyau de l’Église était souvent constitué par ceux qui, " avec
toute leur maison ", étaient devenus croyants (cf. Ac 18, 8).
Lorsqu’ils se convertissaient, ils désiraient aussi que " toute
leur maison " soit sauvée (cf. Ac 16, 31 et 11, 14). Ces
familles devenues croyantes étaient des îlots de vie chrétienne dans
un monde incroyant.
1656 De nos jours, dans un monde souvent étranger
et même hostile à la foi, les familles croyantes sont de première
importance, comme foyers de foi vivante et rayonnante. C’est pour cela
que le IIe Concile du Vatican appelle la famille, avec une vielle
expression, " Ecclesia domestica " (LG 11 ; cf.
FC 21). C’est au sein de la famille que les parents sont " par
la parole et par l’exemple ... pour leurs enfants les premiers hérauts
de la foi, au service de la vocation propre de chacun et tout spécialement
de la vocation sacrée " (LG 11).
1657 C’est ici que s’exerce de façon privilégiée
le sacerdoce baptismal du père de famille, de la mère,
des enfants, de tous les membres de la famille, " par la réception
des sacrements, la prière et l’action de grâce, le témoignage
d’une vie sainte, et par leur renoncement et leur charité effective "
(LG 10). Le foyer est ainsi la première école de vie chrétienne et
" une école d’enrichissement humain " (GS 52, §
1). C’est ici que l’on apprend l’endurance et la joie du travail,
l’amour fraternel, le pardon généreux, même réitéré, et surtout
le culte divin par la prière et l’offrande de sa vie.
1658 Il faut encore faire mémoire de certaines
personnes qui sont, à cause des conditions concrètes dans lesquelles
elles doivent vivre – et souvent sans l’avoir voulu, – particulièrement
proches du cœur de Jésus et qui méritent donc affection et
sollicitude empressée de l’Église et notamment des pasteurs :
le grand nombre de personnes célibataires. Beaucoup
d’entre elles restent sans famille humaine, souvent à cause
des conditions de pauvreté. Il y en a qui vivent leur situation dans
l’esprit des Béatitudes, servant Dieu et le prochain de façon
exemplaire. A elles toutes il faut ouvrir les portes des foyers, " Églises
domestiques ", et de la grande famille qu’est l’Église.
" Personne n’est sans famille en ce monde : l’Église
est la maison et la famille de tous, en particulier de ceux qui
‘peinent et ploient sous le fardeau’ (Mt 11, 28) " (FC
85).
En bref
1659 S. Paul dit : " Maris, aimez
vos femmes, comme le Christ a aimé l’Église... Ce mystère est de
grande portée ; je veux dire qu’il s’applique au Christ et
à l’Église " (Ep 5, 25. 32).
1660 L’alliance matrimoniale, par laquelle un
homme et une femme constituent entre eux une intime communauté de vie
et d’amour, a été fondée et dotée de ses lois propres par le Créateur.
De par sa nature elle est ordonnée au bien des conjoints ainsi qu’à
la génération et à l’éducation des enfants. Elle a été élevée
entre baptisés par le Christ Seigneur à la dignité de sacrement
(cf. GS 48, § 1 ; CIC, can. 1055, § 1).
1661 Le sacrement du mariage signifie l’union du
Christ et de l’Église. Il donne aux époux la grâce de s’aimer
de l’amour dont le Christ a aimé son Église ; la grâce du
sacrement perfectionne ainsi l’amour humain des époux, affermit
leur unité indissoluble et les sanctifie sur le chemin de la vie éternelle
(cf. Cc. Trente : DS 1799).
1662 Le mariage se fonde sur le consentement des
contractants, c’est à dire sur la volonté de se donner
mutuellement et définitivement dans le but de vivre une alliance
d’amour fidèle et fécond.
1663 Puisque le mariage établit les conjoints dans
un état public de vie dans l’Église, il convient que sa célébration
soit publique, dans le cadre d’une célébration liturgique, devant
le prêtre (ou le témoin qualifié de l’Église), les témoins et
l’assemblée des fidèles.
1664 L’unité, l’indissolubilité et
l’ouverture à la fécondité sont essentielles au mariage. La
polygamie est incompatible avec l’unité du mariage ; le
divorce sépare ce que Dieu a uni ; le refus de la fécondité détourne
la vie conjugale de son " don le plus excellent ",
l’enfant (GS 50, § 1).
1665 Le remariage des divorcés du vivant du
conjoint légitime contrevient au Dessein et à la Loi de Dieu enseignés
par le Christ. Ils ne sont pas séparés de l’Église, mais ils ne
peuvent accéder à la communion eucharistique. Ils mèneront leur vie
chrétienne notamment en éduquant leurs enfants dans la foi.
1666 Le foyer chrétien est le lieu où les enfants
reçoivent la première annonce de la foi. Voila pourquoi la maison
familiale est appelée à bon droit " l’Église domestique ",
communauté de grâce et de prière, école des vertus humaines et de
la charité chrétienne.
CHAPITRE QUATRIÈME
LES AUTRES CÉLÉBRATIONS LITURGIQUES
ARTICLE 1
LES SACRAMENTAUX
1667 " La sainte Mère Église a
institué des sacramentaux, qui sont des signes sacrés par lesquels,
selon une certaine imitation des sacrements, des effets surtout
spirituels sont signifiés et sont obtenus par la prière de l’Église.
Par eux, les hommes sont disposés à recevoir l’effet principal des
sacrements, et les diverses circonstances de la vie sont sanctifiées "
(SC 60 ; cf. CIC, can. 1166 ; CCEO, can. 867)
Les traits caractéristiques des sacramentaux
1668 Ils sont institués par l’Église en vue
de la sanctification de certains ministères de l’Église, de certains
états de vie, de circonstances très variées de la vie chrétienne,
ainsi que de l’usage des choses utiles à l’homme. Selon les décisions
pastorales des évêques, ils peuvent aussi répondre aux besoins, à la
culture et à l’histoire propres au peuple chrétien d’une région
ou d’une époque. Ils comportent toujours une prière, souvent
accompagnée d’un signe déterminé, comme l’imposition de la main,
le signe de la croix, l’aspersion d’eau bénite (qui rappelle le
Baptême).
1669 Ils relèvent du sacerdoce baptismal :
tout baptisé est appelé à être une " bénédiction "
(cf. Gn 12, 2) et à bénir (cf. Lc 6, 28 ; Rm 12, 14 ; 1 P 3,
9). C’est pourquoi des laïcs peuvent présider certaines bénédictions
(cf. SC 79 ; CIC, can. 1168) ; plus une bénédiction concerne
la vie ecclésiale et sacramentelle, plus sa présidence est réservée
au ministère ordonné (évêques, prêtres ou diacres ; cf. De
Benedictionibus, Praenotanda generalia 16 et 18, ed. typica 1984 p.
13-15).
1670 Les sacramentaux ne confèrent pas la grâce
de l’Esprit saint à la manière des sacrements, mais par la prière
de l’Église ils préparent à recevoir la grâce et disposent à y
coopérer. " Chez les fidèles bien disposés, presque tous
les événements de la vie sont sanctifiés par la grâce divine qui découle
du Mystère pascal de la Passion, de la Mort et de la Résurrection du
Christ, car c’est de lui que tous les sacrements et sacramentaux
tirent leur vertu ; et il n’est à peu près aucun usage
honorable des choses matérielles qui ne puisse être dirigé vers cette
fin : la sanctification de l’homme et la louange de Dieu "
(SC 61).
Les formes variées des sacramentaux
1671 Parmi les sacramentaux figurent d’abord
les bénédictions (de personnes, de la table, d’objets, de
lieux). Toute bénédiction est louange de Dieu et prière pour obtenir
ses dons. Dans le Christ, les chrétiens sont bénis par Dieu le Père
" de toutes sortes de bénédictions spirituelles "
(Ep 1, 3). C’est pourquoi l’Église donne la bénédiction en
invoquant le nom de Jésus et en faisant habituellement le signe saint
de la Croix du Christ.
1672 Certaines bénédictions ont une portée
durable : elles ont pour effet de consacrer des personnes à
Dieu et de réserver à l’usage liturgique des objets et des lieux.
Parmi celles qui sont destinées à des personnes – à ne pas
confondre avec l’ordination sacramentelle – figurent la bénédiction
de l’abbé ou de l’abbesse d’un monastère, la consécration des
vierges et des veuves, le rite de la profession religieuse et les bénédictions
pour certains ministères d’Église (lecteurs, acolytes, catéchistes,
etc.). Comme exemple de celles qui concernent des objets, on peut
signaler la dédicace ou la bénédiction d’une église ou d’un
autel, la bénédiction des saintes huiles, des vases et des vêtements
sacrés, des cloches, etc.
1673 Quand l’Église demande publiquement et
avec autorité, au nom de Jésus-Christ, qu’une personne ou un objet
soit protégé contre l’emprise du Malin et soustrait à son empire,
on parle d’exorcisme. Jésus l’a pratiqué (cf. Mc 1, 25-26),
c’est de lui que l’Église tient le pouvoir et la charge
d’exorciser (cf. Mc 3, 15 ; 6, 7. 13 ; 16,17). Sous une
forme simple, l’exorcisme est pratiqué lors de la célébration du
Baptême. L’exorcisme solennel, appelé " grand exorcisme ",
ne peut être pratiqué que par un prêtre et avec la permission de l’évêque.
Il faut y procéder avec prudence, en observant strictement les règles
établies par l’Église. L’exorcisme vise à expulser les démons ou
à libérer de l’emprise démoniaque et cela par l’autorité
spirituelle que Jésus a confié à son Église. Très différent est le
cas des maladies, surtout psychiques, dont le soin relève de la science
médicale. Il est important, donc, de s’assurer, avant de célébrer
l’exorcisme, qu’il s’agit d’une présence du Malin, et non pas
d’une maladie. (cf. CIC, can. 1172).
La religiosité populaire
1674 Hors de la Liturgie sacramentelle et des
sacramentaux, la catéchèse doit tenir compte des formes de la piété
des fidèles et de la religiosité populaire. Le sens religieux du
peuple chrétien a , de tout temps, trouvé son expression dans des
formes variées de piété qui entourent la vie sacramentelle de l’Église,
tels que la vénération des reliques, les visites aux sanctuaires, les
pèlerinages, les processions, le chemin de croix, les danses
religieuses, le rosaire, les médailles, etc. (cf. Cc. Nicée II :
DS 601 ; 603 ; Cc. Trente : DS 1822).
1675 Ces expressions prolongent la vie liturgique
de l’Église, mais ne la remplacent pas : " Ils doivent
être réglés en tenant compte des temps liturgiques et de façon à
s’harmoniser avec la liturgie, à en découler d’une certaine manière
et à y introduire le peuple, parce que la liturgie, de sa nature, leur
est de loin supérieure " (SC 13).
1676 Un discernement pastoral est nécessaire
pour soutenir et appuyer la religiosité populaire et, le cas échéant,
pour purifier et rectifier le sens religieux qui sous-tend ces dévotions
et pour les faire progresser dans la connaissance du Mystère au Christ
(cf. CT 54). Leur exercice est soumis au soin et au jugement des évêques
et aux normes générales de l’Église (cf. CT 54).
La religiosité populaire, pour l’essentiel,
est un ensemble de valeurs qui, avec sagesse chrétienne, répond
aux grandes interrogations de l’existence. Le bon sens populaire
catholique est fait de capacité de synthèse pour l’existence.
C’est ainsi qu’il fait aller ensemble, de façon créative, le
divin et l’humain, le Christ et Marie, l’esprit et le corps, la
communion et l’institution, la personne et la communauté, la foi
et la patrie, l’intelligence et le sentiment. Cette sagesse est un
humanisme chrétien qui affirme radicalement la dignité de tout être
comme fils de Dieu, instaure une fraternité fondamentale, apprend
à rencontrer la nature comme à comprendre le travail, et donne des
raisons de vivre dans la joie et la bonne humeur, même aux milieu
des duretés de l’existence. Cette sagesse est aussi pour le
peuple un principe de discernement, un instinct évangélique qui
lui fait percevoir spontanément quand l’Evangile est le premier
servi dans l’Église, ou quand il est vidé de son contenu et
asphyxié par d’autres intérêts (Document de Puebla ; cf.
EN 48).
En bref
1677 On appelle sacramentaux les signes sacrés
instituées par l’Église dont le but est de préparer les hommes à
recevoir le fruit des sacrements et de sanctifier les différentes
circonstances de la vie.
1678 Parmi les sacramentaux, les bénédictions
occupent une place importante. Elles comportent à la fois la louange
de Dieu pour ses œuvres et ses dons, et l’intercession de l’Église
afin que les hommes puissent faire usage des dons de Dieu selon
l’esprit de l’Evangile.
1679 En plus de la Liturgie, la vie chrétienne se
nourrit des formes variées de piété populaire, enracinées dans les
différentes cultures. Tout en veillant à les éclairer par la lumière
de la foi, l’Église favorise les formes de religiosité populaire
qui expriment un instinct évangélique et une sagesse humaine et qui
enrichissent la vie chrétienne.
ARTICLE 2
LES FUNÉRAILLES CHRÉTIENNES
1680 Tous les sacrements, et principalement ceux
de l’initiation chrétienne, avaient pour but la dernière Pâque de
l’enfant de Dieu, celle qui, par la mort, le fait entrer dans la Vie
du Royaume. Alors s’accomplit ce qu’il confessait dans la foi et
dans l’espérance : " J’attends la Résurrection des
morts et la Vie du monde à venir " (Symbole de Nicée-Constantinople).
I. La dernière Pâque du Chrétien
1681 Le sens chrétien de la mort est révélé
dans la lumière du Mystère pascal de la mort et de la résurrection
du Christ, en qui repose notre unique espérance. Le chrétien qui meurt
dans le Christ Jésus " quitte ce corps pour aller demeurer
auprès du Seigneur " (2 Co 5, 8).
1682 Le jour de la mort inaugure pour le chrétien,
au terme de sa vie sacramentelle, l’achèvement de sa nouvelle
naissance commencée au Baptême, la " ressemblance "
définitive à " l’image du Fils " conférée par
l’Onction de l’Esprit Saint et la participation au Festin du Royaume
qui était anticipée dans l’Eucharistie, même si d’ultimes
purifications lui sont encore nécessaires pour revêtir la robe
nuptiale.
1683 L’Église qui, comme Mère, a porté
sacramentellement en son sein le chrétien durant son pèlerinage
terrestre, l’accompagne au terme de son cheminement pour le remettre
" entre les mains du Père ". Elle offre au Père,
dans le Christ, l’enfant de sa grâce, et elle dépose en terre, dans
l’espérance, le germe du corps qui ressuscitera dans la gloire (cf. 1
Co 15, 42-44). Cette offrande est pleinement célébrée par le
Sacrifice eucharistique ; les bénédictions qui précèdent et qui
suivent sont des sacramentaux.
II. La célébration des funérailles
1684 Les funérailles chrétiennes sont une célébration
liturgique de l’Eglise. Par celle-ci, le ministère de l’Église a
en vue dans ce cas aussi bien d’exprimer la communion efficace avec le
défunt que d’y faire participer la communauté rassemblée
pour les obsèques et de lui annoncer la vie éternelle.
1685 Les différents rites des funérailles
expriment le caractère Pascal de la mort chrétienne et répondent
aux situations et aux traditions de chaque région, même en ce qui
concerne la couleur liturgique (cf. SC 81).
1686 L’Ordo exsequiarum (OEx) de la
liturgie romaine propose trois types de célébration des funérailles,
correspondant aux trois lieux de son déroulement (la maison, l’église,
le cimetière), et selon l’importance qu’y attachent la famille, les
coutumes locales, la culture et la piété populaire. Ce déroulement
est d’ailleurs commun à toutes les traditions liturgiques et il
comprend quatre moments principaux :
1687 L’accueil de la communauté. Une
salutation de foi ouvre la célébration. Les proches du défunt sont
accueillis par une parole de " consolation " (au
sens du Nouveau Testament : la force de l’Esprit Saint dans
l’espérance ; cf. 1 Th 4, 18). La communauté priante qui se
rassemble attend aussi " les paroles de la vie éternelle ".
La mort d’un membre de la communauté (ou le jour anniversaire, le
septième ou le trentième jour) est un événement qui doit faire dépasser
les perspectives de " ce monde-ci " et attirer les
fidèles dans les véritables perspectives de la foi au Christ ressuscité.
1688 La Liturgie de la Parole, lors de funérailles,
exige une préparation d’autant plus attentive que l’assemblée
alors présente peut comprendre des fidèles peu assidus à la liturgie
et des amis du défunt qui ne sont pas chrétiens. L’homélie, en
particulier, doit " éviter le genre littéraire de l’éloge
funèbre " (OEx 41) et illuminer le mystère de la mort chrétienne
dans la lumière du Christ ressuscité.
1689 Le Sacrifice eucharistique. Lorsque
la célébration a lieu dans l’église, l’Eucharistie est le cœur
de la réalité Pascale de la mort chrétienne (cf. OEx 1). C’est
alors que l’Église exprime sa communion efficace avec le défunt :
offrant au Père, dans l’Esprit Saint, le sacrifice de la mort et de
la résurrection du Christ, elle lui demande que son enfant soit purifié
de ses péchés et de ses conséquences et qu’il soit admis à la plénitude
Pascale de la table du Royaume (cf. OEx 57). C’est par l’Eucharistie
ainsi célébrée que la communauté des fidèles, spécialement la
famille du défunt, apprend à vivre en communion avec celui qui " s’est
endormi dans le Seigneur ", en communiant au Corps du Christ
dont il est membre vivant et en priant ensuite pour lui et avec lui.
1690 L’adieu (" à-Dieu ")
au défunt est sa " recommandation à Dieu " par
l’Église. C’est " le dernier adieu par lequel la
communauté chrétienne salue un de ses membres avant que le corps de
celui-ci ne soit porté à sa tombe " (OEx 10). La tradition
byzantine l’exprime par le baiser d’adieu au défunt :
Par ce salut final " on chante pour son
départ de cette vie et pour sa séparation, mais aussi parce
qu’il y a une communion et une réunion. En effet, morts nous ne
sommes nullement séparés les uns des autres, car tous nous
parcourons le même chemin et nous nous retrouverons dans le même
lieu. Nous ne serons jamais séparés, car nous vivons pour le
Christ, et maintenant nous sommes unis au Christ, allant vers lui...
nous serons tous ensemble dans le Christ " (Saint Syméon
de Thessalonique, De ordine sepulturae, 367 : PG 155,
685B).
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